[e-med] CARE International menace de suspendre leur programme sur le SIDA(RCI)

SANTE-COTE D'IVOIRE :
Des bailleurs menacent de suspendre leur programme sur le SIDA
Aly Ouattara
http://ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=5009
KORHOGO, Côte d'Ivoire, 19 août (IPS) - Les bailleurs de fonds des projets
de 'CARE International' -- destinés à la lutte contre le VIH/SIDA --
menacent de suspendre l'aide si les organisations non gouvernementales (ONG)
bénéficiaires ne parviennent pas à justifier l'utilisation des subventions
reçues.

Nina Kaba, la gestionnaire des subventions de 'CARE International' en Côte
d'Ivoire, a déclaré que son organisation comptait dans le pays 58
partenaires opérationnels qui ont bénéficié de 80 subventions octroyées
depuis 2004 pour l'exécution de projets anti-SIDA aux objectifs spécifiques
dans le sud contrôlé à l'époque par les troupes gouvernementales, et dans la
zone centre-nord-ouest occupée par l'ex-rébellion.

Ce sont les projets OASIS (Organisation des actions pour la synergie des
interventions), PREMA (Projet de prévention et de prise en charge en
situation post-conflit) et CARA (Community Assistance for Responding to
Aids). D'un montant total de quelque huit millions de dollars, ces projets
ont été financés par le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, le paludisme
et la tuberculose, et par le Plan d'aide d'urgence à la lutte contre le SIDA
(PEPFAR) du président américain George W. Bush.

Les activités menées sur le terrain par ces projets de la lutte contre le
VIH/SIDA portent sur la sensibilisation et la prise en charge des personnes
infectées par la maladie à travers, à travers notamment la distribution des
médicaments anti-rétroviraux et le financement des activités génératrices de
revenus par des gens pauvres affectés par pandémie. Les menaces de
suspension ont été proférées à Korhogo, dans le nord de la Côte d'Ivoire à
la fin du mois dernier lors d'une réunion de coordination regroupant toutes
les structures qui luttent contre le VIH/SIDA dans ce pays d'Afrique de
l'ouest.

Kaba a indiqué qu'il faudrait au moins 80 pour cent de documents
justificatifs des dépenses effectuées pour bénéficier de nouvelles
subventions comme l'exigent les bailleurs alors que seulement 50 pour cent
des dépenses ont pu être justifiées dans la zone centre-nord-ouest et la
partie sud du pays.

Elle a également énuméré les difficultés rencontrées par les partenaires de
CARE International : le non-respect des clauses contractuelles, le retard de
dépôt des pièces justificatives, le non-respect des procédures apprises, la
mauvaise qualité des pièces justificatives. Kaba a ajouté que des efforts
restaient à faire pour emmener les partenaires à justifier leurs dépenses.

Lançant un cri de cœur aux ONG concernées Kaba a déclaré : "Si les
partenaires ne justifient pas l'utilisation des fonds reçus, le programme va
être suspendu et cette suspension risque d'élever le taux de mortalité des
malades et de contamination au VIH/SIDA dans le pays".

Selon l'enquête sur les indicateurs du SIDA, réalisée en 2005 en Côte
d'Ivoire, le taux de prévalence nationale est de 4,7 pour cent, mais ce taux
est de 6,1 pour cent à Abidjan, la capitale économique, qui reste la ville
la plus touchée du pays.

Toutefois, Dr André Pkaï, chargé de programme de la cellule technique
d'appui aux initiatives locales de la région des savanes dans le nord, une
structure représentant le ministère ivoirien de la Lutte contre le SIDA,
estime que le manque de justification des fonds a d'autres causes dont le
bailleur est parfois responsable. Il cite notamment "le retard dans
l'élaboration et la validation des budgets des partenaires opérationnels par
CARE International, le retard dans la signature des contrats des partenaires
et dans la mise à disposition des fonds".

De son côté, Mamadou Fadiga, président du réseau des acteurs de la lutte
contre le SIDA à Korhogo, a expliqué à IPS : "La justification des
subventions est une préoccupation des structures nationales,
particulièrement celles des zones centre, nord et ouest". La difficulté,
dit-il, est que chaque bailleur a son processus et ses critères
d'explication des subventions auxquels les structures doivent s'adapter. "Si
les structures ne sont pas suffisamment outillées, les justifications liées
à leurs dépenses seront plus ou moins rejetées afin que la structure élabore
selon les critères définis par le bailleur", a souligné Fadiga. "Néanmoins,
la situation s'améliore progressivement et nous sommes en train d'harmoniser
nos efforts pour aider les structures à être à la hauteur et répondre aux
attentes des bailleurs", a-t-il affirmé à IPS.

Pour sa part, Jean Marcel Konan, président du conseil d'administration du
Réseau régional de renforcement des capacités en ligne, une ONG basée à
Abidjan, exprime une opinion différente. "Ces justifications, qui sont
généralement de mauvaise qualité, sont le fait de l'incompétence des ONG
dans l'élaboration des données et de leur ignorance des logiciels des NTIC
(Nouvelles technologies de l'information et de la communication)". Les
carences des ONG, qui continuent d'exercer dans l'informel, montrent
qu'elles ont besoin de formation pour être professionnalisées, estime Konan.
"Avec cette incompétence de la coordination des activités, les données ne
parviennent pas là où il faut, au moment où il faut", dit-il à IPS, ajoutant
: "En matière communautaire, les ONG doivent être formées à l'utilisation
des logiciels des NTIC, en leadership, en management des organisations, en
audit, en gestion financière et en gestion administrative".

Fondé en 1946 par des Américains pour fournir à l'époque des aides à une
Europe ravagée par la Seconde Guerre mondiale, CARE International
intervient, entre autres aujourd'hui, dans l'urgence humanitaire,
l'éducation, la santé et l'assainissement, et la bonne gouvernance dans les
pays en développement. Les antennes de CARE International en Côte d'Ivoire
sont basées à Abidjan, (sud) à Bouaké (centre), Korhogo (nord) et Man
(ouest).

La Côte d'Ivoire est coupée en deux par une rébellion armée qui occupe la
moitié nord du pays. Des ex-soldats de l'armée régulière estiment avoir pris
les armes le 19 septembre 2002 pour lutter contre l'exclusion présumée des
populations de cette partie du pays. Après plus de cinq ans de conflit, le
pays semble avoir amorcé la marche vers une sortie de crise, dont la
première épreuve capitale est la tenue effective de l'élection
présidentielle fixée au 30 novembre prochain. (FIN/2008)