[pour alimenter la réflexion chez les emédiens qui ne sont pas en vacances...CB]
Médecins du Monde
Lâaccès gratuit aux soins de santé primaire
Acces_gratuit_aux_soins_de_sante_primaire.pdf 1,65 MB
http://www.medecinsdumonde.org/fr/thematiques/l_acces_gratuit_aux_soins_de_sante_primaire
Convaincu que la levée de lâobstacle financier constitue une étape décisive vers lâaccès universel aux soins de santé primaire dans les pays à faible revenu, MdM sâest engagé depuis près de deux ans dans plusieurs projets dâamélioration de lâaccessibilité financière aux soins, en particulier au Niger et en Haïti.
Aujourdâhui, près de 10 millions dâenfants à travers le monde meurent tous les ans de maladies qui auraient normalement dû être évitées ou soignées (paludisme, pneumonie, diarrhée, rougeoleâ¦). Avec 11 % de la population de la planète, le continent africain supporte à lui seul 24 % de la charge de morbidité mondiale et ne représente pourtant quâun petit pourcentage du budget global consacré à la santé dans le monde.
LES CONSÃQUENCES DU RECOUVREMENT DES COÃTS
Nombreuses sont les barrières pouvant expliquer les difficultés et les inégalités dâaccès à la santé (éloignement des centres de santé, transport cher et difficile, dysfonctionnement des structures sanitaires, facteurs culturels, discrimination sexuelle), mais lâobligation faite à lâusager de payer les prestations de soins représente un obstacle de première ligne. Câest à la fin des années 1980 que sâest imposée lâidée de recouvrer directement auprès des patients une partie des coûts nécessaires au fonctionnement dâun système de santé. Cette initiative est alors vue comme un moyen de compenser la baisse volontaire des financements publics alloués à la santé. Malheureusement, force est de constater que lâobligation de payer pour accéder aux soins de santé primaire a eu et continue dâavoir des conséquences négatives importantes sur lâétat sanitaire et le niveau de vie des populations, en particulier dans les pays à faible revenu. Au-delà des effets directs sur la santé des populations, lâaccès payant aux soins constitue un facteur dâappauvrissement très important pour de nombreux foyers. Les malades et leurs familles sont bien souvent contraints de procéder à des choix douloureux tels que lâarrêt de la scolarisation des enfants, la vente de tout ou partie de leurs biens ou encore lâendettement auprès des autres membres de la communauté. Parfois, renoncer aux soins devient la seule option possible, faute de moyens pour faire face au coût de prise en charge de la maladie.
LâÃMERGENCE DES POLITIQUES DE GRATUITÃ
Au cours des trois dernières années, plusieurs pays ont décidé de se lancer dans la mise en oeuvre de politiques dâamélioration de lâaccessibilité financière aux soins de santé. Câest particulièrement vrai sur le continent africain. à titre dâexemple, on peut mentionner le Kenya, le Niger ou, encore plus récemment, le Soudan. Tous ces Ãtats ont instauré des politiques publiques visant à garantir lâaccès gratuit à un paquet minimal de soins de santé primaire pour les enfants de moins de 5 ans et/ou les femmes enceintes. Cette remise en cause des politiques de tarification aux usagers constitue une expérience positive pour lâamélioration de la santé des populations. Pour autant, le succès dâune telle entreprise dépend largement de la possibilité de sâappuyer sur une volonté politique forte et réelle des autorités nationales, ainsi que sur des financements stables et pérennes.
âLe succès des politiques de gratuité repose aussi sur nous.â
Olivier Bernard, pédiatre et membre du conseil dâadministration de MdM.
Quelles sont les raisons de lâémergence de cette priorité dâaccès gratuit aux soins ?
O. B.: Elle est avant tout issue dâun constat des équipes présentes sur le terrain. Au Niger, MdM a observé un taux de fréquentation des structures de santé anormalement bas. Un enfant consulte en moyenne 0,2 fois par an alors que lâOMS préconise une consultation annuelle. Lâémergence de cette priorité est aussi associée à une conjoncture internationale favorable à la mise en place de politiques de gratuité.
Quelles sont les difficultés rencontrées sur le terrain dans le cadre de la mise en place de la gratuité des soins ?
O. B. : Il nây a pas de difficultés majeures tant que cette démarche est soutenue par une volonté politique forte des Ãtats et le financement de bailleurs internationaux. La présence dâopérateurs de soutien, comme MdM, permet de limiter les risques de déstabilisation, notamment au niveau du système dâapprovisionnement en médicaments, et de pallier une éventuelle rupture. En parallèle, la crainte dâune surcharge de travail ne sâest pas concrétisée. Les populations cibles étant de diverses régions, elles ne viennent pas consulter aux mêmes heures.
Pourquoi lâappui des pays décisionnaires est-il primordial dans la réussite de ce projet ?
O. B. : Le succès des politiques de gratuité repose en grande partie sur lâaide internationale car elles sont encore dépendantes dâun financement des Ãtats riches. Ce soutien est indispensable car ce mécanisme de subventionnement bénéficie directement aux populations.