Ghana : 3,8 millions de dollars à rembourser au Fonds mondial pour des
préservatifs défectueux
16 Dec 2014
Lauren Gelfand
http://www.aidspan.org/fr/gfo_article/ghana-3-8-millions-de-dollars-a-rembo
urser-au-fonds-mondial-pour-des-preservatifs-defectueux
Un appel d'offres de plus de 120 millions de préservatifs entaché par la
fraude -- et des produits de piètre qualité
Le ministère de la Santé du Ghana a dépensé environ 3,8 millions de
dollars d'une subvention du Fonds mondial pour des préservatifs défectueux
achetés dans le cadre d'un appel d'offres qui a été entaché par la fraude,
selon le Bureau de l'inspecteur général du Fonds mondial. En plus
d'élaborer un plan de recouvrement des fonds, le Secrétariat effectuera
tous les achats du Ghana dans le cadre du mécanisme d'achats groupés et
exigera un suivi stratégique accru de l'agent local du Fonds.
Le rapport d'enquête publié le 11 décembre confirme que 128 millions de
préservatifs masculins achetés pour le Service de santé du Ghana entre
2010 et 2013 étaient « de qualité inférieure, trop chers et obtenus à
travers un processus d'appel d'offres non compétitif impliquant de faux
documents ».
Ce processus d'appel d'offres a été vicié dès le départ, selon le rapport.
Annoncé seulement localement pendant une durée très courte, l'offre a été
réduite à une seule source avec la disqualification immédiate de deux
autres soumissionnaires. Une évaluation menée par le Conseil central des
appels d'offres du Ghana n'a pas été examinée, entraînant effectivement
l'opacité du processus.
Un mois après l'approbation de l'offre, le ministère de la Santé a accepté
une augmentation de 35% par unité de coût - soit l'équivalent de près d'un
million de dollars sur ce qui avait été un contrat à prix fixe qui ne
faisait visiblement pas l'objet d'ajustements. Selon l'enquête, aucune
preuve n'atteste que le prestataire, Global Unilink, ait fourni au Service
de santé du Ghana les documents contenant des données sur les prix du
marché pour justifier la hausse des prix.
En outre, l'appel d'offres était fondé sur des documents falsifiés. Global
Unilink a fourni des informations trompeuses concernant le lieu de
fabrication des préservatifs, notamment un faux certificat affirmant que
le fabricant de préservatifs était certifié par l'OMS.
Cette situation a engendré un autre problème majeur : les préservatifs
étaient effectivement de qualité inférieure. L'enquête confirme que le
fournisseur ne s'est pas procuré le produit auprès d'un fabricant certifié
par l'OMS, conformément au contrat. Les préservatifs achetés ne répondent
pas aux caractéristiques ou normes de l'OMS, même si les échantillons
soumis au cours de l'appel d'offres pour des tests de qualité provenaient
d'un fabricant certifié par l'OMS. En d'autres termes, les préservatifs de
qualité ont été fournis aux essais et ceux de qualité inférieure à
l'emploi.
Ces problèmes de qualité ont été relevés lorsque les utilisateurs finaux
ont indiqué qu'ils éclataient trop facilement, ne contenaient pas
suffisamment de lubrifiant et, selon un rapport des médias ghanéens,
n¹étaient pas assez grands.
Il reste à déterminer pourquoi le Service de santé du Ghana n'a pas
continué à réaliser des tests de contrôle de la qualité sur les
préservatifs Be Safe¹. Pour la suite, Aidspan a appris auprès du
Secrétariat du Fonds mondial que : « Le Secrétariat fournira à l'Office
ghanéen de contrôle des médicaments et des produits alimentaires un
préavis d'expédition des produits de santé et des biens essentiels achetés
pour les programmes du Fonds mondial provenant de toute source. L'Agent
local du Fonds vérifiera que la qualité des tests a été assurée avant la
distribution ».
D'autres garanties ont été mises en place, spécifiquement liées à l'achat
de produits de santé et et autres marchandises pour le Ghana. Depuis 2012,
le Ghana participe au mécanisme d'achats groupés et au Service
pharmaceutique mondial, ce qui explique que les ARV, les trousses de
dépistage du VIH, les médicaments et les kits de dépistage du paludisme et
les médicaments antituberculeux, sont tous actuellement achetés par le
Fonds mondial pour le Ghana. Actuellement, le ministère de la santé est
seulement responsable de l'achat de produits tels que des gants et des
cotons-tiges.
Le Secrétariat du Fonds mondial devrait poursuivre le recouvrement de la
totalité des 3,84 millions de dollars dépensés sur les préservatifs
défectueux -- un montant que le Ghana tente lui-même de récupérer depuis
2013 auprès du fournisseur, Global Unilink, à en croire les médias
ghanéens.
La majorité des préservatifs défectueux restent non distribués, stockés
dans un entrepôt du ministère de la Santé publique qui a fait lui-même
l'objet d'un examen minutieux en raison de la piètre qualité des
conditions d¹entreposage. Selon la presse locale, le service a été décrit
comme ayant un toit qui suinte et de mauvais contrôles de température --
des conditions moins qu¹idéales, même dans les meilleures circonstances.
Les préservatifs doivent être retirés et détruits par le ministère de la
Santé et le Service de santé du Ghana conformément aux «procédures et
règles environnementales internationales » - mais cette éventualité reste
incertaine.
Le Ghana a un taux de séroprévalence généralisée de moins de 2%, mais dans
certains groupes clés, y compris les travailleuses du sexe et les hommes
ayant des rapports homosexuels, ce taux est beaucoup plus élevé. Les
résultats d'une enquête démographique et de santé soutenue par le Fonds
mondial devraient être publiés en 2015, ce qui constituera le meilleur
moyen de déterminer si le taux d'infection a augmenté. Il ne sera
cependant pas possible d'établir un rapport de causalité entre une
augmentation des infections et le recours à ces mesures de prévention
douteuses.