E-MED: (2)Corruption et traffic de m�dicaments en Albanie
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Rebond sur l'article de l'AFP : Corruption et trafic de m�dicaments en
Albanie (23/01/03)
Le d�c�s d'un patient albanais imput� au non paiement de pots-de-vin � ses
chirurgiens a d�clench� une pol�mique sur la corruption du corps m�dical.
Au cours de la derni�re d�cennie, Pharmaciens Sans Fronti�res-Comit�
International a d�velopp� plusieurs programmes en Albanie. L'association a
acquis une certaine connaissance du secteur pharmaceutique et m�dical
albanais. T�moin privil�gi� de pratiques d�ontologiquement condamnables
(dessous de table, � business � de m�dicaments, racket des patients, etc.),
l'article de l'AFP occulte, selon nous, un �l�ment beaucoup plus pr�occupant
: la faillite du syst�me de sant� publique. Vu sous cet angle, ces d�rives
peuvent appara�tre comme les avatars de dysfonctionnements structurels et de
choix politiques partiellement dict�s par les institutions financi�res
internationales.
A la fin des ann�es 80, les infrastructures, la formation et les
r�mun�rations des personnels m�dicaux atteignaient un niveau honorable.
L'acc�s des patients aux soins (co�t, qualit� de prise en charge,
traitements, etc.) �tant garanti par l'�tat. En une quinzaine d'ann�es, la
situation n'a cess� de se d�t�riorer pour atteindre aujourd'hui un niveau
alarmant.
Le secteur pharmaceutique public n'�chappe pas au marasme. M�me si les
h�pitaux consacrent une part tr�s importante de leurs faibles budgets �
l'achat de m�dicaments et de consommables m�dicaux, les besoins sont loin
d'�tre couverts. Pour les patients, l'unique alternative reste alors le
recours � un secteur priv� florissant. Les � officines � priv�es sont l�gion
aux abords des h�pitaux quand elles ne se situent pas � l'int�rieur m�me des
enceintes. Les chances d'y trouver le m�dicament appropri� sont al�atoires
mais une personne en blouse blanche peut souvent proposer un produit de
substitution�
Concernant l'approvisionnement en m�dicaments, les autorit�s
m�dico-sanitaires disposent de moyens trop faibles pour exercer leurs
pr�rogatives. Malgr� l'existence de soci�t�s sp�cialis�es et le timide
d�veloppement de l'industrie pharmaceutique, une large part des produits est
import�e en marge des circuits officiels pour palier la p�nurie chronique.
Faute de contr�les, de surveillance et de scrupules, cette situation laisse
la porte ouverte � tous les d�rapages.
L'assistance humanitaire n'est pas non plus exempte de reproches. Lors de la
� crise du Kosovo �, le pays a facilit� l'arriv�e de l'aide en ouvrant
largement ses fronti�res. PSF-CI a entrepris de centraliser les dons de
m�dicaments en provenance de France (laboratoires, h�pitaux, associations,
etc.) et constat�, une fois encore, les effets n�fastes d'une certaine forme
de g�n�rosit�. L'�tude des donations, toutes origines confondues (Etats
Unis, pays europ�ens et arabes), men�e en collaboration avec l'OMS a montr�
que : la moiti� des produits re�us �tait inadapt�e, les d�nominations de
pr�s d'un tiers des m�dicaments �taient inconnues des pharmaciens albanais,
enfin, 65% des produits �taient p�rim�s ! Parall�lement, des tonnes de
donations directes ont engorg� les pharmacies hospitali�res et d�stabilis�
durablement leur gestion. Le march� noir a su, bien entendu, profiter de
cette manne inesp�r�e�
Au-del� de toute pol�mique, le fait divers r�v�l� dans l'article de l'AFP
illustre une triste r�alit� : l'Etat albanais n'est plus en mesure d'assurer
� ses citoyens l'acc�s � des soins de qualit� et un niveau de r�mun�ration
satisfaisant aux personnels de sant�. D�s lors, les pratiques d�nonc�es ne
sont-elles pas avant tout les funestes cons�quences de l'effondrement du
syst�me de sant� public ? Dans l'affirmative, on peut d�plorer que la survie
de l'offre de soins publique passe par une � privatisation informelle �. Ce
constat peut �tre �tendu � nombre de pays � ressources limit�es. Les effets
de la crise du Kosovo dans les pharmacies hospitali�res albanaises montrent
comment la � g�n�rosit� dangereuse � aggrave la situation et combien elle
est pr�judiciable aux efforts de r�organisation d'un secteur sinistr�. Dans
les pays donateurs, l'adoption de cadres l�gislatifs bas�s sur les
recommandations de l'OMS et les besoins exprim�s par les autorit�s
sanitaires des pays b�n�ficiaires permettraient d'�viter ces �cueils. Face �
l'incons�quence de certains acteurs de l'aide humanitaire, on peut esp�rer
que de telles mesures favoriseraient les politiques de d�veloppement
durable.
Marina BENEDIK (Directeurs des missions) et J�r�me SCHELL (Assistant
technique)
Service Missions, Pharmaciens Sans Fronti�res-Comit� International
m.benedik@psf-ci.org
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