[e-med] Note d'information de l'OMS sur l'anémie hémolytique tardive après le traitement à l'artésunate , Octobre 2013

Note d¹information de l¹OMS sur l¹anémie hémolytique tardive après le
traitement à l¹artésunate
Octobre 2013
http://www.who.int/malaria/publications/atoz/who_note_haemolytic_anaemia/fr/index.html

L¹artésunate injectable réduit de façon considérable la mortalité due au
Plasmodium falciparum, et il est le traitement de choix pour les patients
atteints de paludisme grave. Lors de deux essais contrôlés randomisés de
grande ampleur sur ce type de patients, le traitement parentéral à
l¹artésunate a réduit le nombre des décès de 34,7 % (essai asiatique
SEAQUAMAT) et de 22,5 % (essai africain AQUAMAT) par rapport à la quinine
injectable1,2. Actuellement, l¹OMS recommande l¹artésunate (en
intraveineuse ou en intramusculaire) comme traitement de première
intention pour la prise en charge initiale du paludisme grave3.

Un certain nombre de cas d¹anémie hémolytique tardive ont été identifiés à
la suite du traitement du paludisme grave à l¹artésunate injectable. La
fondation MMV (Medicines for Malaria Venture) a convoqué, en mars 2013,
une réunion d¹experts pour étudier les données disponibles sur ce
problème. Le rapport intégral de cette réunion peut être consulté sur la
page internet de MMV
(http://www.mmv.org/newsroom/events/expert-group-meeting-safety-profile-inj
ectable-artesunate).

La présente note d¹information rend compte de la position actuelle de
l¹OMS et du Programme de lutte antipaludique (GMP), établie d¹après les
résultats de la réunion et en consultation avec les coprésidents du Groupe
d¹experts techniques de l¹OMS sur la chimiothérapie antipaludique.

Résumé

On a observé des cas d¹anémie hémolytique tardive à la suite du traitement
à l¹artésunate injectable chez des voyageurs non-immuns présentant un
paludisme grave à P. falciparum, en particulier les patients ayant une
hyperparasitémie. L¹anémie hémolytique post-thérapeutique n¹est pas
spécifique à des formulations particulières d¹artésunate injectable et
elle a été décrite après l¹administration de ce produit, mais aussi
d¹artéméther en intramusculaire et d¹artéméther-luméfantrine per os.

Les données disponibles proviennent principalement de rapports de cas et
d¹études rétrospectives, avec des différences au niveau de la conception,
des définitions de cas, des paramètres cliniques et des définitions de
l¹anémie tardive. Les définitions du paludisme grave étaient également
diverses. Par conséquent, l¹incidence et les facteurs de prédisposition
(autres que l¹hyperparasitémie) restent incertains.

Les mécanismes de l¹anémie hémolytique tardive à la suite du traitement du
paludisme grave sont multiples et ne sont pas totalement compris. La
fièvre bilieuse hémoglobinurique (hémolyse massive et brutale avec
hémoglobinurie associée au paludisme) et l¹hémolyse grave provoquée par le
paludisme lui-même pourraient se superposer à l¹anémie hémolytique
tardive. Dans certains cas, il pourrait y avoir la contribution d¹une
hémolyse auto-immune.

Les données préliminaires donnent à penser que le principal avantage
pharmacodynamique de l¹artésunate par rapport à la quinine est qu¹il
détruit les jeunes trophozoites dans la circulation sanguine, avant qu¹ils
ne soient séquestrés dans la microcirculation, ce qui pourrait être à
l¹origine de l¹hémolyse tardive. C¹est ce mécanisme qui explique l¹action
rapide de l¹artésunate et son effet bénéfique sur la mortalité et d¹autres
issues cliniques. La plupart des jeunes trophozoites détruits par
l¹artésunate sont rapidement éliminés dans la rate qui «dénoyaute» les
érythrocytes, c¹est-à-dire que l¹intérieur des globules rouges est
débarrassé du parasite mort. Les hématies « auparavant parasitées »
retournent dans la circulation, mais avec une espérance de vie réduite
d¹environ 7 à 15 jours. La destruction tardive des érythrocytes «
auparavant parasités » correspond à l¹évolution dans le temps de l¹anémie
tardive post-thérapeutique que l¹on observe sur le plan clinique. Les
patients sauvés par l¹artésunate, qui auraient pu mourir s¹ils avaient été
traités à la quinine, sont plus particulièrement ceux qui ont des
parasitémies élevées. Tous les cas signalés d¹anémie hémolytique tardive
après traitement à l¹artésunate injectable ont été pris en charge avec
succès. Il a fallu transfuser certains patients, mais aucun décès n¹a été
rapporté.

Conclusions

Des données très probantes indiquent que l¹artésunate (en intraveineuse ou
en intramusculaire) est en général bien toléré et que c¹est un traitement
salvateur en cas de paludisme grave à Plasmodium falciparum, avec lequel
on obtient une baisse sensible de la mortalité par rapport à la quinine.
Les bénéfices thérapeutiques dépassent donc de loin le risque des effets
indésirables liés à l¹artémisinine, y compris l¹anémie hémolytique tardive
post-thérapeutique.

Recommandations

L¹OMS recommande fortement de continuer à administrer l¹artésunate
injectable pour traiter le paludisme grave. Il faut rappeler et soutenir
la nécessité de poursuivre l¹utilisation de ce médicament et promouvoir
l¹adoption de ce traitement comme médicament de première intention du
paludisme grave à P. falciparum.

Il faut cependant que les professionnels de santé soient mis au courant du
risque d¹anémie hémolytique tardive pouvant survenir jusqu¹à un mois après
le traitement. Il convient de renforcer les systèmes de pharmacovigilance
au niveau des pays en collaboration avec les programme nationaux de lutte
antipaludique et le Centre Collaborateur OMS international de surveillance
du médicament, pour mieux détecter les effets indésirables survenant après
l¹administration de l¹artésunate comme d¹autres médicaments.

L¹utilisation de la même définition de l¹anémie hémolytique tardive et du
paludisme grave est indispensable pour la comparabilité des données entre
les études cliniques. De même, il faut standardiser les méthodes de
pharmacovigilance pour améliorer la collecte des données et
l¹interprétation des résultats.
Prochaines étapes recommandées

? Des études de physiopathologie devraient être menées pour caractériser
les mécanismes de l¹hémolyse et de l¹évolution du cadre hématologique
après le paludisme grave, ainsi que des interventions qui pourraient
prévenir le problème ou améliorer la situation.

? Des essais cliniques prospectifs sont nécessaires

? pour définir la fréquence, la gravité et l¹évolution dans le temps de
l¹anémie hémolytique tardive post-thérapeutique,

? pour déterminer les facteurs prédictifs/pronostiques de l¹anémie
hémolytique post-thérapeutique.

? Il est recommandé d¹harmoniser les études en phase IV, en particulier
celles qui proposent des systèmes de notification spontanée en ligne par
les laboratoires pharmaceutiques.

? Il faut examiner davantage le rôle des registres des cas graves de
paludisme en tant que méthode de surveillance pour obtenir des données et
des informations supplémentaires.