[e-med] Un gel vaginal prometteur pour protéger les femmes du sida

Un gel prometteur pour protéger les femmes du sida
Par Pauline Fréour
20/07/2010 | Mise à jour : 15:25 Réactions (24)
http://www.lefigaro.fr/sante/2010/07/20/01004-20100720ARTFIG00408-un-gel-prometteur-pour-proteger-les-femmes-du-sida.php

Testé en Afrique du Sud, ce gel vaginal contenant un antirétroviral
empêcherait l'infection dans 50% des cas. Une découverte porteuse d'espoir
pour la population féminine, très vulnérable face au VIH.

Pour se protéger contre le sida, les femmes sont souvent plus démunies que
les hommes, surtout dans les pays en développement. Hormis le préservatif
féminin, peu répandu, elles restent tributaires du bon vouloir de leur
partenaire à utiliser un préservatif, ou de sa fidélité. D'où l'intérêt
suscité par les résultats de l'étude Caprisa 004, montrant qu'un gel vaginal
contenant 1% d'antirétroviral s'est avéré efficace contre l'infection pour
environ une femme sur deux.

Menée à Durban par un couple travaillant au Centre pour le programme de
recherche sur le sida en Afrique du Sud (Caprisa), l'étude parue dans la
revue Science a porté sur 890 femmes, dont la moitié s'est vu remettre le
gel avec Tenofovir, et l'autre moitié un gel sans antirétroviral.
Séronégatives mais présentant un fort risque de contracter le virus, ces
femmes de 18 à 40 ans devaient utiliser une dose de ce gel microbicide
environ douze heures avant une relation sexuelle, puis une seconde dans les
douze heures après. Suivies régulièrement par une équipe médicale, il leur
était recommandé d'éviter les sources de contagion et des préservatifs leur
étaient distribués.

Pas d'effets secondaires
L'expérience a montré que le risque de contamination baissait en moyenne de
50% au bout d'un an, et de 39% au bout de deux ans et demi. Les femmes qui
utilisaient le plus régulièrement le gel actif ont été protégées à 54% sur
trente mois. Il n'y a pas eu d'effets négatifs constatés ni, chez les femmes
infectées, de signe de résistance au Tenofovir, un médicament utilisé
habituellement pour soigner les personne séropositives.
«Notre défi maintenant, c'est de comprendre sur quelle base biologique
certaines femmes sont infectées en dépit du Tenofovir et surtout d'essayer
d'améliorer le suivi du traitement», a déclaré l'un des instigateurs de
l'étude, Salim Abdoul Karim. Près de 40% des femmes participant à l'étude
ont en effet utilisé le gel, dont l'applicateur a la forme d'une seringue à
bout arrondi, moins d'une fois sur deux, même si aucun problème d'inconfort
n'aurait été relevé.

Un produit très intéressant en Afrique
L'essai, qui n'est encore qu'en phase 2 - pour établir l'innocuité et
l'efficacité d'un produit sur un échantillon relativement réduit - doit être
maintenant confirmé par une troisième phase de l'étude, comptant plus de
4.000 femmes et déjà engagée. Mais les résultats ont été accueillis avec
enthousiasme par les participants à la conférence internationale sur le sida
de Vienne.
Pour Hugues Fischer, coordinateur prévention et recherche préventive à Act
Up Paris, ce microbicide est particulièrement intéressant pour les pays
africains, où les femmes, qui représentent 60% des nouvelles contaminations,
sont un vecteur important de transmission, et où la population a moins
facilement accès au préservatif. «En revanche en France, la question se pose
différemment. D'abord, ce sont des résultats encore sommaires, qui devront
être détaillés. Ensuite, on a sûrement intérêt à promouvoir ce nouveau
produit en France, mais il faut bien réfléchir à la population cible et dans
quelles modalités. Certes, ce gel se fait plus oublier qu'un préservatif,
mais il est aussi moins efficace».
«Au-delà de son efficacité propre, qui est peut-être un peu en-dessous de ce
que la rumeur laissait espérer, ce gel peut avoir un intérêt dans le cadre
d'une stratégie de prévention combinée, estime de son côté Christian Andreo,
directeur des actions nationales au sein de l'association Aides. Par
exemple, on sait qu'un homme séropositif sous antirétroviraux a moins de
chances de transmettre le virus à sa partenaire. Une bonne observance du
traitement alliée à ce gel permettrait à un couple sérodifférent d'avoir une
vie sexuelle sans préservatif, donc proche d'un couple séronégatif».

Vingt ans de recherches
Michel Sidibé, directeur exécutif du programme de l'Onu Onusida, a salué de
son côté une avancée déterminante. «Si ces résultats se confirment, ce
microbicide constituera une arme puissante en matière de prévention et
devrait nous aider à enrayer le développement de l'épidémie de sida»,
s'est-il réjoui. Les recherches sur les microbicides menées depuis 20 ans
n'avaient connu jusqu'à maintenant que des revers, avec au mieux une absence
d'effet de protection, au pire une surcontamination avec des produits
toxiques pour la muqueuse vaginale.
Nombre de questions persistent toutefois, notamment sur la nécessité de
proposer un placebo à la moitié des femmes de la cohorte, dont 60 ont été
contaminées pendant l'étude, contre 38 chez celles qui avaient le
microbicide. Des inconnues planent également sur la mise sur le marché du
produit.

voir la vidéo et différents documents
http://blog.aids2010.org/post/2010/07/20/Understanding-the-CAPRISA-Microbicide-Trial-Results.aspx

L'étude : http://www.sciencemag.org/cgi/rapidpdf/science.1193748.pdf