[e-med] 61ème session du comité régionale de l’OMS-Afrique (suite)

Financement de la santé: La leçon du Rwanda à l’Afrique
Les cadres et les politiques africains sont-ils en train de prendre
conscience que l’avenir de l’Afrique se fera par les Africains et avec les
Africains ? Ce sentiment était très perceptible mardi au deuxième jour de la
61ème session du comité régionale de l’OMS-Afrique qui se déroule en ce
moment pour la première fois en Côte d’Ivoire à Yamoussoukro à la Fondation
Félix Houphouët Boigny.
http://www.notrevoie.com/a_la_une.asp?id=40692

« Arrêtez de tendre la main. Ayons une vision, une stratégie, prenons des
résolutions (…) combattons la corruption dans nos systèmes (…) coordonnez
vos partenaires dans le sens de votre vision. Ceux qui ne veulent pas,
refusez leur argent (…) Nous ne sommes pas pauvres. Nous sommes riches et
exploitons nos richesses », s’est révoltée Dr. Agnès Binagwaho, ministre de
la santé du Rwanda lors du débat sur le financement de la santé en Afrique.
La salle a fortement salué son intervention. « Le ministre de la santé du
Rwanda est plein de dynamisme », a reconnu Dr. Margaret Chan, directrice
générale de l’OMS. « C’est le meilleur débat que j’aie jamais eu depuis
longtemps. L’Afrique est pour moi, le continent de l’espoir», a-t-elle
avoué.

En fait, selon plusieurs experts présents à Yamoussoukro, le Rwanda est cité
en exemple avec quelques autres pays africains comme ayant un bon système de
santé. « A défaut d’une saine gestion, nous n’allons pas avoir un retour sur
investissement », abonde dans le même sens le ministre nigérian de la santé.
« Allons dans le sens d’un financement basé sur les résultats et une lutte
assidue contre la corruption », soutient le Burkinabé. « Nous avons
introduit, des audits cliniques », révèle pour sa part le ministre ghanéen
de la santé.

Gaspillage de ressource
Pour les panélistes, s’il est vrai que les systèmes de santé des pays
africains pêchent par une insuffisance des crédits alloués, ils pêchent
aussi à cause du grand gaspillage des ressources allouées. Selon Dr David
Evans, directeur du Financement de la Santé à l’OMS, « beaucoup de dépenses
inadéquates sont faites. Il faut savoir réduire pour mieux gérer même sans
de nouveaux investissements. » « Il faut être beaucoup plus efficace dans
l’utilisation des ressources disponibles », ajoute un autre panéliste. C’est
la même réflexion que fait Dr. Agnès Soucat, Directeur du Développement
humain à la Banque africaine de Développement (BAD) qui a exposé sur
pourquoi investir dans la santé. Pour elle, plusieurs facteurs expliquent le
retard de l’Afrique en matière de financement de son système de santé. Mais,
il y a des facteurs clés : « premièrement, il y a pas eu des ressources
suffisantes pour le développement et le maintien des systèmes de santé.
Deuxièmement, les ressources disponibles ont été utilisées de manière non
rationnelle, en partie à cause du manque d’utilisation systématique de
processus et d’outils pour fixer les priorités dans l’utilisation des
maigres ressources. Troisièmement, les ressources supplémentaires n’ont pas
été déployées de manière efficiente. » Mais, le seul financement ne suffit
pas, pense Dr. Evans. « Si vous avez un système de santé mal structuré, le
financement ne va pas régler vos problèmes », a-t-il soutenu. De même, il a
affirmé que dans la perspective d’une allocation accrue des finances au
secteur de la santé, « l’aide ne doit pas être la seule source de
financement. Il doit y avoir une complémentarité entre l’aide extérieure et
les finances internes. » « Mais, les donateurs internationaux doivent avoir
un rôle catalyseur », ajoute Dr. Soucat. En clair, l’Afrique ne doit pas
compter sur l’aide pour financer son système de santé. Elle doit compter sur
elle-même. Et selon les experts, des pistes existent rien qu’en regardant
les bonnes pratiques des pays comme le Ghana, le Lesotho, le Rwanda. « On
n’a pas besoin d’aller chercher les bons exemples ailleurs. Il faut faire
fonctionner la coopération sud-sud », estime un expert dans la salle.

Invités exceptionnellement pour cette session, les ministres de l’économie
et des finances de 20 pays ont aussi eu une participative active. Le
ministre de l’économie et des finances du Niger a révélé que son budget est
financé à 60% par l’aide extérieur. « Ça veut dire que c’est le bailleurs
qui fixe ses priorités. C’est dire que vous n’êtes pas libre de
l’affectation des ressources », a-t-il expliqué pour justifier qu’il est
difficile d’atteindre la part de 15% du budget national à affecter à la
santé selon la déclaration des Chefs d’Etat à Abuja au Nigeria en 2000.
Mais, pour le Rwanda, les 15% sont atteints dans la mesure où le calcul ne
prend pas en compte les dépenses faites par d’autres ministères dans les
infrastructures routières, dans l’assainissement, l’électrification qui
selon elle, sont des dépenses qui profitent à la santé et à rendre le
système de santé performant. De son côté, Dr. Chan a estimé que les
ministres de la santé doivent mieux expliquer l’apport de la santé à
l’économie. Elle a plaidé comme beaucoup dans la salle pour une vision dans
les politiques à mettre en œuvre avec la qualité des prestations au service
des populations afin d’arriver à l’accès universel. Selon elle, le meilleur
moyen pour accéder à l’universalité, c’est de mettre l’accès sur la santé de
la mère et de l’enfant. Les participants ont abondamment présenté
l’assurance maladie comme l’une des solutions à encourager pour arriver à un
accès universel. Le Ghana, le Rwanda ont très souvent été cités en exemple
pour ce cas de figure.

Coulibaly Zié Oumar Envoyé Spécial

En ma qualité de membre fondateur du "Fonds Spécial de la Santé pour l'Afrique" au même titre que certains fonctionnaires des Nations Unies, fonds créé en 1990 sous l'égide de l'OUA et de l'OMS/Afrique, sur la base de la Déclaration AHG/DECL.1 (XXIII) des chefs d'Etat et de Gouvernement de l'OUA à la 23ème session ordinaire à Addis Abéba 27-29 juillet 1987 , je pense qu'il aurait été souhaitable que toute la lumière soit faite sur ce fonds (s'il est encore fonctionnel ...!!! ) lors des échanges entre les "Panélistes" afin d'éviter les erreurs passées. Il y a eu certainement des "redites".... la non utilisation rationnelle des maigres ressources, la mauvaise gestion d'une manière générale du système de santé, y compris les pratiques traditionnelles de soins. Le constat d'un sentiment qu'une prise de conscience par les cadres et les politiques va s'opérer ne date pas d'aujourd'hui. Puisse le dynamisme du Ministre de la santé du Rwanda gagner ses homologues des autres pays pour voir généralisée l'application des 15% de la déclaration des chefs d'Etat à Abuja en 2000

Pr Mamadou Koumaré ancien conseiller régional OMS/Afrique chargé des technologies sanitaires modernes et traditionnelles