[e-med] Acc�s aux soins et l'utilisation des services de sant�

E-MED: Acc�s aux soins et l'utilisation des services de sant�
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Communication r�alis�e aux XXVI�mes Journ�es des �conomistes Fran�ais de la
Sant� "SANTE ET DEVELOPPEMENT" Clermont-Ferrand, CERDI, 9 - 10 janvier 2003

Etude de l'acc�s aux soins et l'utilisation des services de sant�: une
analyse comparative entre quatre capitales ouest-africaine.
Boubou Cisse Inserm Marseille
cisse@marseille.inserm.fr

L��tude que j�ai pr�sent� au CERDI lors de la 26i�me JEFS s�intitulait : �Le
paiement des soins par les usagers : une source d�iniquit� dans le recours
aux soins�. Cette �tude s�int�ressait � la sant� des populations en milieu
urbain, et plus sp�cifiquement aux probl�mes li�s � l�acc�s et � l�
utilisation des services de sant� modernes par les couches les plus
d�favoris�es, dans un contexte de mise en place du paiement des soins par
les usagers.

L��tude avait pour objectif g�n�ral d��valuer et de comparer pour quatre
capitales ouest-africaines (Abidjan, Bamako, Conakry, et Dakar), l�
importance des d�terminants des itin�raires th�rapeutiques des m�nages
d�munis comparativement aux m�nages non d�munis. Ses objectifs sp�cifiques
consistaient d�une part � identifier parmi l�ensemble des variables
influen�ant la demande des services de sant� (variables �conomiques et
socio-d�mographiques, variables li�es � la nature de la maladie et la
qualit� per�ue des structures de sant�, etc...) celles qui sont
statistiquement significatives; et d�autre part � estimer la sensibilit� des
diff�rentes couches de la population (en particulier les m�nages
d�favoris�s) face � une introduction ou une augmentation de la tarification
des soins.

Pour ce faire, l��tude s�est fond�e sur l�utilisation de donn�es originales
provenant d�enqu�tes socio-�conomiques similaires r�alis�es aupr�s d�
�chantillons repr�sentatifs des m�nages d�Abidjan, Bamako, Conakry et Dakar,
dans le cadre du � Programme de Sant� Urbaine �, financ� conjointement par l
�Unicef et la Coop�ration Fran�aise. R�alis�es entre fin 1998 et d�but 1999
selon une proc�dure d��chantillonnage al�atoire et stratifi�e, ces enqu�tes
ont permis de collecter (i) des informations sur les caract�ristiques
d�mographiques, �conomiques et socioculturelles, (ii) des informations sur
la nature et l�incidence de la maladie ainsi que les comportements en
mati�re de choix de soins, et enfin (iii) des informations relatives � la
perception qu�ont les malades de la qualit� des formations sanitaires
fr�quent�es.

L�analyse des donn�es d�enqu�tes nous a permis de montrer que sur l�
ensemble des individus ayant d�clar� un �pisode morbide durant les deux mois
pr�c�dant l�enqu�te, pr�s ou plus de la moiti� n�ont pas cherch� de soins
dans le secteur moderne : 51.6% � Abidjan, 54.4% � Bamako, 42.4% � Dakar,
et 60% � Conakry. Cette d�cision de ne recourir aux structures sanitaires
modernes varie non seulement en fonction des villes, mais �galement selon la
cat�gorie sociale. En effet, le � non recours aux formations modernes �
reste une pratique significativement plus r�pandue chez les m�nages
pauvres � que chez les m�nages � non pauvres �. Interrog�s, les malades ont
r�pondu dans l�ensemble que les raisons qui les contraignaient � ne chercher
de soins vers les structures modernes �taient essentiellement d�ordre
financi�res (principalement invoqu�es par les m�nages d�munis), ainsi que la
nature de la maladie jug�e comme � non s�v�re � (motif essentiellement
invoqu� par les m�nages non d�munis). Il est � noter ici que l�accessibilit�
g�ographique n�est pas d�terminante dans la justification de la d�cision de
ne recourir aux soins en cas d��pisode morbide.

Et lorsque les malades d�cident de solliciter des soins dans les structures
sanitaires modernes, l�analyse des donn�es a fait ressortir que dans la
majorit� des cas, les malades ont eu recours � un dispensaire public ou
parapublic (38% � Abidjan, 59% � Dakar, 39% � Conakry) et/ou � une
formation priv�e � but non lucrative (43.3% � Bamako). D�autres options
telles que l�h�pital (22% � Abidjan, 20.3% � Dakar, 16.5% � Bamako, 40% �
Conakry ) et le priv� lucratif (31.5% � Abidjan, 8.7% � Dakar, 22% �
Bamako ) sont �galement sollicit�s par les malades.

A cet �gard, nous avons pu remarquer que les options choisies par les
malades diff�rent selon la ville d�une part, et suivant la cat�gorie sociale
d�autre part. Par exemple � Dakar, si l�h�pital et les dispensaires publics
sont utilis�s respectivement par 20.3% et 59.1% des malades qui d�cident de
recourir aux soins, nous remarquons que le priv� lucratif n�est utilis� que
par 8.7% de ces malades. Or � Abidjan, seuls 38% des malades ayant d�cider
de recourir aux soins modernes vont vers les dispensaires publics, alors qu�
ils sont pr�s de 32% � aller vers les structures sanitaires priv�es � but
lucratif ; de m�me � Bamako, il semble que ce soit le � priv� non lucratif �
qui attire le plus de malades (43.3%), alors que cette proportion est
beaucoup moindre dans les villes d�Abidjan (8.5%) et de Dakar (11.9%).

Quant aux diff�rences observ�es dans le choix des options entre les
diff�rentes cat�gories sociales, nous constatons que : dans le choix de l�
h�pital, il n�existe pas r�ellement de diff�rences significatives entre les
classes sociales, les d�munis utilisant autant l�h�pital que les non d�munis
; pour les formations sanitaires priv�es lucratives, elles sont g�n�ralement
plus utilis�es par les malades des classes ais�es que par ceux des classes
d�munies (34.3% contre 25.8% � Abidjan, 11.8% contre 4.3% � Dakar, 24.2%
contre 16.9% � Bamako) ; quant aux dispensaires publics et parapublics et
aux formations sanitaires priv�es � but non lucratif, ils attirent quasiment
autant les d�munis que les non d�munis, avec toutefois une l�g�re diff�rence
significative en faveur des d�munis.

Nous avons �galement proc�der � une analyse �conom�trique, analyse qui s�est
bas�e sur l��laboration d�un mod�le �conomique th�orique aboutissant � l�
�criture d�une fonction de demande de soins de sant� dont on estime ensuite
les param�tres (les r�sultats sont disponibles pour deux capitales). Ainsi,
nous avons pu observer que le prix des prestations et le co�t du traitement
agissent n�gativement sur l�utilisation des services de sant� modernes,
aussi bien chez les pauvres que chez les non pauvres, alors que le temps
effectivement accord� par le m�decin au patient a un effet positif sur la
demande. Contrairement aux pauvres pour qui la dur�e de l�attente n�est pas
un obstacle � l�utilisation des services de sant�, le temps d�attente agit
n�gativement et significativement sur l�utilisation des formations
sanitaires modernes par les non pauvres : plus le temps d�attente est long
dans une formation sanitaire, moins les riches auront recours � celle ci. La
gravit� de la maladie influence significativement l�utilisation des
formations sanitaires publiques aussi bien chez les pauvres que chez les non
pauvres ; ce r�sultat pourrait s�expliquer par le fait que certaines
affectations graves sont sp�cifiquement trait�es dans les structures
publiques (notamment, les h�pitaux) qui disposent d��quipements ad�quats et
de personnels comp�tents. Pour les m�nages pauvres, le revenu constitue un
facteur important de l�utilisation des formations sanitaires, quel que soit
le type : plus leur revenu augmente, plus les pauvres utilisent davantage
les services de sant� modernes. Par contre, pour les riches, le revenu a un
effet significativement positif sur la demande des formations sanitaires
publiques et priv�es � but lucratif et un effet n�gatif sur la demande
adress�e aux formations priv�es � but non lucratif:

Pour �tudier l�ampleur de l�effet du prix et du revenu, nous avons �galement
estimer la sensibilit� des pauvres et des non pauvres face � une
introduction ou une augmentation du prix des prestations ou du co�t du
traitement d�une part, et du revenu d�autre part (elasticit�-prix et
�lasticit�-revenu). A cet effet, nous avons pu remarquer qu�un doublement
du tarif des prestations r�sulterait en une baisse de la demande de soins
des m�nages pauvres de 67% � 72% dans les formations sanitaires publiques
(FSP), et de 45 � 50% dans les formations sanitaires priv�es � but non
lucratif (FSPNL). Ce m�me doublement des tarifs entra�nerait simplement une
r�duction de la demande de soins chez les m�nages non pauvres de 7 � 10%
dans les FSP, et de moins de 2% dans les FSPNL.

D�autre part, nous avons pu observer avec le calcul des elasticit�s-revenus
que les soins de sant� modernes, qu�ils soient fournis par une formation
sanitaire publique ou priv�e � but lucratif ou non, sont consid�r�s par les
m�nages pauvres comme des biens normaux, une augmentation de leur revenu se
traduisant par une augmentation respective de la demande de soins dans ces
formations. Par contre les oins fournis par les formations sanitaires
priv�es � but non lucratif sont consid�r�s par les m�nages non pauvres comme
des biens inf�rieurs, une augmentation de leur revenu entra�nant une
diminution de la demande de ce type de soins.

Ces derniers r�sultats font ressortir clairement que l�introduction de la
tarification affecte principalement les cat�gories dont la situation sociale
est la plus pr�caire. Ainsi, il conviendrait de proc�der effectivement � la
mise en place de m�canismes de financement facilitant l�acc�s aux soins des
d�munis, � la cr�ation de formes multiples de solidarit�. Parmi ces
m�canismes visant � prot�ger les pauvres, on peut distinguer par exemple un
m�canisme de discrimination des tarifs en fonction des facteurs tels que le
revenu ou l�age, ou encore un m�canisme fond� sur des crit�res explicites et
qui exempterait les individus les plus pauvres du paiement des soins.

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