[e-med] Antisepsie pré-opératoire : la chlorhexidine alcoolique, médaille d'or

[il serait également intéressant d'étudier s'il y a une différence de
coût.CB]

Antisepsie pré-opératoire : la chlorhexidine alcoolique, médaille d’or
Publié le 11/01/2010
http://www.jim.fr/e-docs/00/01/BB/AD/document_actu_med.phtml

Les infections du site opératoire demeurent une complication dont la
fréquente est estimée aujourd’hui à environ 1 % des interventions
chirurgicales aux Etats-Unis. Ce risque dépend à la fois de la technicité du
chirurgien, du type d’intervention (classée en « chirurgie propre », «
chirurgie propre contaminée », « chirurgie contaminée » et « chirurgie sale
et infectée ») (voir tableau) et du patient lui-même (état général et
colonisation éventuelle par un Staphylococcus aureus). On conçoit donc que
l’un des facteurs principaux sur lequel on puisse espérer agir
préventivement soit l’antisepsie cutanée. Mais malgré l’importance de la
question on ne disposait pas jusqu’ici d’études randomisées de grande
ampleur permettant de comparer entre elles différentes préparations
antiseptiques dans cette indication.

Cette lacune est comblée avec la publication du travail d’une équipe
américaine multicentrique. Rabih Darouiche et coll. ont inclus 897 sujets
devant bénéficier d’une chirurgie « propre contaminée » dans cette étude.
Les interventions concernaient le tube digestif, le thorax, l’appareil
gynécologique ou le système urinaire. Ces patients ont été randomisés entre
une antisepsie du site opératoire par une préparation de chlorhexidine
alcoolique (2 % de gluconate de chlorhexidine et 70 % d’alcool) ou par une
solution aqueuse de 10 % de povidone iodée. Le critère principal de jugement
était la survenue dans les 30 jours d’une infection du site opératoire. Ce
diagnostic était porté par des investigateurs ignorant à quel antiseptique
les patients avaient été assignés.
Une réduction du risque de 41 %

Les résultats de 849 participants ont pu être analysés en intention de
traiter. La chlorexidine s’est révélée significativement plus efficace que
la povidone iodée avec 9,5 % d’infections du site opératoire contre 16,1 %
(diminution du risque de 41 % avec la chlorexidine [intervalle de confiance
à 95 % entre 15 et 59 % ; p=0,004]). Dans le détail, les taux d’infections
superficielles et profondes de la plaie opératoire ont été respectivement de
4,2 et 1 % avec la chlorexidine et de 8,6 et 3 % avec la povidone iodée. En
revanche les infections d’un organe profond ont eu une fréquence similaire
dans les deux groupes (4,4 et 4,5 %). La tolérance des deux produits a été
équivalente (0,7 % de prurit ou d’érythème au niveau de la plaie opératoire
dans les deux groupes). Sur le plan microbiologique, le type de bactéries
isolées des plaies infectées était similaire dans les deux groupes à
l’exception d’une sous-représentation des streptocoques chez les patients
traités par povidone iodée.

La chorhexidine qui s’était déjà révélé plus efficace que la povidone iodée
pour la prévention des infections systémiques après pose d’un cathéter lui
est donc supérieure pour réduire le risque d’infection de la plaie
opératoire. Pour les auteurs, cet avantage clinique doit être lié à son
action antiseptique plus rapide et plus prolongée.

Pour l’éditorialiste du New England Journal of Medicine (2), la chorhexidine
alcoolique doit donc être préféré dès maintenant à la povidone iodée comme
antiseptique cutané pré-opératoire.

Tableau
Classe I : Chirurgie propre Incisions primitivement fermées non
drainées, non traumatiques, sans inflammation ni faille dans la technique
d'asepsie, en l'absence d'ouverture de l'oro-pharynx, du tube digestif, de
l'appareil génito-urinaire ou des voies respiratoires.
Classe II : Chirurgie propre contaminée

Ouverture de l'appareil génito-urinaire en l'absence d'uroculture positive ;
ouverture des voies respiratoires, du tube digestif dans de bonnes
conditions et sans contamination anormale ; ouverture de l'oro-pharynx ou
des voies biliaires en l'absence de bile infectée ; ruptures minimes
d'asepsie et drainages mécaniques.
Classe III : Chirurgie contaminée Plaies traumatiques récentes (moins
de 4 heures) ; ouverture du tractus biliaire ou génito-urinaire en présence
de bile ou d'urines infectées ; contaminations importantes par le contenu du
tube digestif ; ruptures majeures d'asepsie ; interventions en présence
d'inflammation aiguë sans pus.
Classe IV : Chirurgie sale et infectée Plaies traumatiques
souillées ou traitées de façon retardée (plus de 4 heures) ; présence de
tissus dévitalisés, d'inflammation bactérienne avec pus, de contamination
fécale ou de corps étrangers ; viscères perforés.

Dr Céline Dupin

1) Darouiche R et coll. : Chorhexidine-alcohol versus povidone-iodine for
surgical-site antisepsis. N Engl J Med 2010 ; 362 : 18-26.
http://content.nejm.org/cgi/content/abstract/362/1/18
2) Wenzel R. Minimizing surgical-site infections. N Engl J Med 2010 ; 362 :
75-77.
http://content.nejm.org/cgi/content/abstract/362/1/9

Vous pouvez lire sur un thème proche :

    * Antisepsie lors de la pose d'un cathéter péridural : utiliser la
chlorhexidine.

Belle étude. Il faudrait faire, comme Carinne le dit, une étude
comparative des coûts en production industrielle ou en reconditionnement au
niveau des hopitaux en respectant les conditions de préparation décrites par
les auteurs. Mais il est à noter que le plateau technique, l'expérience des
chirurgiens, les soins post opératoires, l'utilisation abusive des
antibiotique en Afrique, etc. peuvent être des facteurs non négligeables
qui pourraient fausser les données de cette étude. Autre aspect: le devenir
de la polividone iodée. Souvent, après une étude, des décisions ou des
directives tombent soudainement et demandent le changement de pratiques sans
évaluer suffisamment les conditions de mise en oeuvre. Attention donc au
changement brusque des habitudes au risque de péremption de quantités énormes de polividone iodée (qui reste dans une certaine mesure comparable à la chlorhexidine alcoolique). Mes chaleureuses salutations à toutes et tous et bonne et heureuse année 2010.

Dr Arsène OUEDRAOGO
Pharmacien
Burkina Faso
Ministère de la Santé
DGPML