[e-med] Des dizaines de millions de personnes affrontent la mort dans d’atroces souffrances

Human Rights Watch
Santé mondiale : Des dizaines de millions de personnes affrontent la mort
dans d’atroces souffrances
Les soins palliatifs sont négligés dans le monde entier
Juin 2, 2011
http://www.hrw.org/fr/news/2011/06/02/sant-mondiale-des-dizaines-de-millions
-de-personnes-affrontent-la-mort-dans-d-atroce

« A l'échelle mondiale, les besoins en soins palliatifs sont énormes, mais
de nombreux gouvernements se contentent de les ignorer. Il est inexcusable
de laisser des gens souffrir de douleurs aigües alors qu'il existe des
médicaments peu onéreux qui pourraient les aider. »
Laura Thomas, chercheuse auprès de la division Santé et Droits humains à
Human Rights Watch

(New York, le 2 juin 2011) - Dans le monde entier, des dizaines de millions
de personnes sont privées de traitements abordables pour soulager les
douleurs aigües, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié
aujourd'hui.

Le rapport de 128 pages, intitulé « Global State of Pain Treatment: Access
to Palliative Care as a Human Right » (« Situation du traitement de la
douleur dans le monde : L'accès aux soins palliatifs comme droit humain »),
expose l'échec de nombreux gouvernements à prendre les mesures les plus
élémentaires pour garantir aux personnes souffrant de douleurs aigües dues
au cancer, au VIH, et à d'autres maladies graves l'accès aux soins
palliatifs, un service de santé qui vise à améliorer la qualité de vie. En
conséquence, des millions de patients vivent et meurent dans d'atroces
souffrances, qui pourraient pourtant être facilement évitées, selon Human
Rights Watch.

« A l'échelle mondiale, les besoins en soins palliatifs sont énormes, mais
de nombreux gouvernements se contentent de les ignorer », a affirmé Laura
Thomas, chercheuse auprès de la division Santé et Droits humains à Human
Rights Watch. « Il est inexcusable de laisser des gens souffrir de douleurs
aigües alors qu'il existe des médicaments peu onéreux qui pourraient les
aider. »

Les experts estiment que 60 pour cent des personnes qui décèdent chaque
année dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires - un chiffre
effarant de 33 millions de personnes - ont besoin de soins palliatifs. Dans
ces pays, la plupart des patients atteints de cancer sont diagnostiqués à un
stade avancé de la maladie et ne peuvent plus être guéris. Les soins
palliatifs sont le seul traitement possible. Dans les pays à revenu élevé,
les besoins en soins palliatifs augmentent avec le vieillissement des
populations et l'augmentation de l'incidence du cancer qui en résulte.
Le rapport s'appuie sur un examen des freins politiques qui limitent l'accès
aux soins palliatifs dans 40 pays, et sur une évaluation de la disponibilité
des traitements antidouleur au niveau global.

Human Rights Watch a établi que dans 35 États sur un total de 192 pays
étudiés, moins d'un pour cent des patients souffrant de douleurs modérées à
intenses dues à un cancer en phase terminale ou au VIH ont accès aux
puissants médicaments antidouleur dont ils ont besoin. Ces pays sont situés
essentiellement en Afrique sub-saharienne, mais des États d'Asie, du
Moyen-Orient, d'Afrique du Nord et d'Amérique Centrale sont également
concernés.
Les médicaments antidouleur les plus puissants sont très peu disponibles
dans la plupart des pays les plus peuplés du globe, selon Human Rights
Watch. Au moins 100 000 personnes meurent du cancer ou du VIH/SIDA chaque
année sans avoir accès à un traitement adapté de la douleur dans des pays
comme la Chine, l'Inde, l'Indonésie, le Nigéria, la Russie, et l'Afrique du
Sud.

« Ma jambe me brûlait, comme si vous aviez un piment sur la langue, » a
déclaré à Human Rights Watch Dilawar Joshi, un Népalais atteint d'une tumeur
de l'os et qui vit en Inde. « La douleur était si intense que j'avais
l'impression de mourir. J'avais très peur. J'ai pensé qu'il valait mieux
mourir que de devoir endurer cette souffrance. [J'ai pensé], enlevez-moi la
jambe, et ça ira mieux. Débarrassez-moi de cette jambe pour que je sois
libéré de cette douleur. »
L'étude a mis en évidence de nombreux freins limitant l'accès aux soins
palliatifs dans la plupart des 40 pays examinés à ce sujet. Les trois quart
de ces derniers n'ont pas de politiques nationales relatives aux soins
palliatifs, en dépit d'une recommandation de l'Organisation Mondiale de la
Santé en ce sens. Dans la plupart de ces pays, les personnels médicaux ne
sont pas correctement formés au traitement de la douleur ou aux soins
palliatifs, et dans certains, il n'existe aucune formation. Dans 33 de ces
pays, les gouvernements imposent des restrictions sur les prescriptions de
morphine qui plus strictes que ce qu'exigent les conventions sur les drogues
des Nations Unies.

Human Rights Watch a identifié un certain nombre d'éléments encourageants.
La Colombie, la Jordanie, la Roumanie, l'Ouganda et le Vietnam ont mené à
bien avec succès des programmes complets de réforme pour améliorer l'accès
aux soins palliatifs. Dans ces pays, les représentants du gouvernement ont
travaillé de concert avec la communauté médicale et la société civile pour
identifier et remédier aux obstacles limitant la disponibilité des soins
palliatifs.

L'Organisation Mondiale de la Santé considère les soins palliatifs comme
partie intégrante du traitement du cancer, et a pressé ces différents pays
de travailler à améliorer leur disponibilité. La convention unique sur les
stupéfiants des Nations Unies adoptée en 1961, à laquelle 184 États sont
parties, exige des pays qu'ils garantissent la disponibilité de médicaments
à base de stupéfiants pour soulager la douleur et la souffrance.
« La Colombie, l'Ouganda et les autres pays qui ont œuvré à fournir des
soins palliatifs démontrent de façon éclatante que tous les pays peuvent
faire des progrès », a observé Laura Thomas. « L'élément essentiel est la
volonté politique de rendre disponibles ces services de santé et de soulager
les souffrances des personnes. »