[e-med] EPN déclaration sur le PEPFAR

Décrivons nos expériences avec le PEPFAR ?

Chers collègues, nous avons récemment livré une déclaration sur le PEPFAR
(ci dessous) au regard des premières expériences de nos membres sur le
terrain. Nous aimerions avoir un partage d’expériences avec ceux qui sont
impliqués dans le PEPFAR, et avoir les points de vues de ceux qui ne sont
pas d’accord avec nos préoccupations. Un tel débat sera utile pour ceux qui
s’apprêtent à se joindre au PEPFAR. Je pense que ce sujet pourrait attirer
plus d’attention vu que plusieurs pays ont entamé maintenant la phase d’
exécution, et vu que le sort du «système de chaîne d’approvisionnement» est
connu. Ainsi, plutôt nous signalons les problèmes, mieux cela vaudra!

Je vous remercie. Eva Ombaka, coordinatrice, EPN Nairobi

(traduit par Hans Peter Bollinger, chargé de programme, EPN Burkina Faso)

Déclaration du Réseau Pharmaceutique Oecuménique (EPN) sur le Plan d’Urgence
du Président des Etats-Unis contre le SIDA (PEPFAR)
Moshi / Tanzanie, le 7 octobre 2004

Le Réseau Pharmaceutique Oecuménique (EPN), qui comprend des associations
chrétiennes de santé, des hôpitaux, des organisations d’approvisionnement en
médicaments à but non lucratif et des agences de développement
confessionnelles, venus de 22 pays pour prendre part à l’Assemblée Générale
Annuelle, tenue du 5 au 7 octobre 2004 à Moshi en Tanzanie, a livré cette
déclaration sur le Plan d’Urgence du Président des Etats-Unis contre le SIDA
(PEPFAR) :

Nous reconnaissons que le renforcement de l’assistance médicale et les soins
des hommes, des femmes et des enfants dans nos communautés qui sont
infectées et affectées par le fléau du VIH/SIDA doit se poursuivre. Par
conséquent, nous accueillons l’initiative et les objectifs de la réponse d’
urgence des Etats-Unis en vue de pourvoir aux ressources nécessaires pour
les soins et le soutien en matière de VIH/SIDA; d’accroître le nombre des
patients sous traitement; et de contribuer à l’amélioration des
infrastructures requises dans la lutte contre le VIH/SIDA. Cela suscite
beaucoup d’espoir pour les personnes vivant avec le VIH/SIDA.

Cependant en tant que réseau de prestataires de services de santé, nous
exprimons notre sincère préoccupation sur certains aspects du PEPFAR,
identifié comme applicable de façon générale mais à des degrés variables
selon les pays bénéficiaires:

1. L’insistance du PEPFAR pour l’approbation du FDA pour tous les
médicaments acquis et l’exigence d’ «acheter américain» pour les médicaments
autres que les ARVs, engendrent des retards inutiles qui entravent la
disponibilité des médicaments d’une importance vitale, et peuvent être
inconsistant avec les protocoles nationaux de traitement.

2. La préférence notoire du PEPFAR pour les médicaments de spécialités et
les barrières à l’utilisation des ARVs et des médicaments contre les
infections opportunistes génériques plus abordables suscitent quatre
préoccupations majeures :

a. Cela crée une situation où les patients reçoivent différentes marques du
même produit créant ainsi un système multi-cadre pour plusieurs groupes de
malade au sein d’une institution, conduisant non pas seulement à des
incompréhensions mais également à du travail supplémentaire pour un
personnel de santé déjà surchargé.

b. Pour les institutions, il sera difficile de continuer le même traitement
à la fin du programme PEPFAR.

c. Utiliser uniquement les produits approuvés par le FDA pourrait mettre en
péril les industries locales et partant menacer la pérennisation des chaînes
d’approvisionnement déjà existantes. Cela est particulièrement vrai dans le
cas des médicaments contre les infections opportunistes qui sont produits
localement à des prix abordables.

d. Utiliser des médicaments de marques chères alors qu’il existe des
alternatives de médicaments de même qualité et moins chers, n’est pas une
bonne utilisation des ressources.

3. Dans certains cas, le PEPFAR passe outre la réglementation nationale en
matière de médicaments et les systèmes locaux de gestion des chaînes d’
approvisionnement, ce qui pourrait être préjudiciable aux systèmes de santé
nationaux, singulièrement au secteur pharmaceutique.

4. Le traitement du VIH/SIDA requiert un engagement pour la vie, alors qu’en
ce moment il n’y a pas de stratégie à long terme pour une continuité des
soins à la fin du programme PEPFAR. Le niveau élevé de contrôle par les
donateurs, contre une appropriation nationale ou locale minimale ou
inexistante, réduit en plus la durabilité des soins de santé et autres
services.

5. Dans sa forme actuelle, l’exécution du PEPFAR favorise l’utilisation
extensive des aptitudes et capacités des Etats-Unis (personnel et
institutions) au détriment de l’expertise locale disponible avec une plus
grande compréhension des sujets dans leurs contextes locaux.

6. Il y a des retards excessifs dus à la bureaucratie inhérente et aux
opérations de fonctionnement contradictoires. Les exigences documentaires
lourdes qui prennent beaucoup de temps, les procédures compliquées pour l’
approvisionnement en médicaments et autres articles, et les réglementations
restrictives des dépenses frustrent et sapent les efforts des institutions
qui tentent de mettre en œuvre le PEPFAR.

7. L’exécution du PEPFAR est surtout unilatérale et sape les efforts
internationaux tels «les 3 unes» (une coordination, une stratégie et un
suivi/évaluation) et le projet de pré-qualification de l’ONU conduit par l’
OMS.

Au vu des points ci-dessus mentionnés, nous formulons les recommandations
suivantes:

a. Le PEPFAR devra lever les restrictions de ses fonds pour l’achat exclusif
des médicaments approuvés par FDA de même que la clause «acheter américain»
et permettre plutôt l’achat de médicaments, génériques ou spécialités,
approuvés au plan national, et des antirétroviraux pré-qualifiés par l’OMS.

b. Le PEPFAR devra prendre en compte les craintes des organisations locales
d’approvisionnement en médicaments qui s’estiment victime de tort à cause du
PEPFAR, puis il devra s’engager à renforcer et améliorer les structures et
systèmes locaux.

c. Le PEPFAR devra tenir des consultations avec les partenaires locaux dans
tous les domaines du programme y compris la formulation de politique, la
planification, l’élaboration, la préparation des termes de références et l’
exécution du projet.

d. Le PEPFAR devra rencontrer régulièrement des organes de consultation et
de surveillance, mise en place par la communauté, et composés entre autres
des personnes vivant avec le VIH/SIDA, des organisations confessionnelles
impliqués dans les services sanitaires, ainsi que des experts des soins de
santé.

e. Des discussions devront immédiatement commencer entre le PEPFAR, les
autres donateurs, les gouvernements et les partenaires d’exécution des
projets au sujet de la pérennisation des services après 2008.

f. Le PEPFAR devra identifier et impliquer les experts locaux résidant dans
les pays partenaires pour une exécution efficace des activités.

g. Le PEPFAR devra discuter avec les partenaires d’exécution afin de
reconnaître et d’accepter les données ou les systèmes de collecte des
données locales disponibles, et de simplifier la documentation requise.

h. Le PEPFAR devra coordonner de façon plus efficace avec les programmes
internationaux de VIH/SIDA existant, y compris le Fonds Mondial de lutte
contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, et l’initiative ‘3 millions
d’ici 2005’ de l’OMS, afin de faciliter la mise en œuvre et d’éviter la
duplication au niveau local.

Nous membres de EPN, dans un esprit de bienveillance et de solidarité,
réaffirmons que la lutte contre le VIH/SIDA mérite des efforts concertés de
tous les partenaires afin d’assurer la pérennisation, la bonne utilisation
des ressources, le développement des capacités locales, la réhabilitation
des personnes vivant avec le VIH/SIDA, et la provision du traitement pour
autant de personnes que possible. Pour ce faire, nous nous engageons à jouer
notre partition en nous assurant que le programme PEPFAR est mis en œuvre
pour le plus grand intérêt de ceux que nous servons, et des partenaires d’
exécution et des agences de financement.

Cette déclaration a été paraphée au nom du Réseau Pharmaceutique Œcuménique
(EPN).

M. Albert Petersen, Président du Conseil de EPN; Dr Eva M A Ombaka,
Coordinatrice de EPN

Adresse: epn@wananchi.com