dimanche 6 mars 2005, 17h10
La première usine pharmaceutique d'Afrique centrale bientôt en marche
LIBREVILLE (AFP) - La première usine de médicaments génériques contre le
sida et le paludisme d'Afrique centrale s'apprête à démarrer son activité au
Gabon, avec pour objectif d'alimenter à terme l'ensemble de la région en
molécules bon marché "made in Africa".
"Inaugurée" le mois dernier lors d'un sommet de la Communauté économique et
monétaire d'Afrique centrale (Cémac), la fabrique n'est encore qu'un
bâtiment de tôle silencieux posé au milieu des autres entrepôts de la zone
industrielle d'Owendo, en banlieue de Libreville. Mais à l'intérieur, les
machines sont prêtes à cracher leurs premières gélules.
"Les équipements sont en place et, si tout va bien, nous devrions être en
mesure de commencer la production avant la fin de l'été", assure le patron
de l'usine gabonaise, Thomas Haahr.
Quelques mois seulement ont suffi à faire sortir de terre cette installation
qui, selon son concepteur belge, préfigure une nouvelle race de petites
usines, particulièrement adaptées au continent africain.
"La fabrication de médicaments en Afrique coûte très cher, notamment à cause
des contraintes sanitaires qui pèsent sur notre activité", explique le
patron du groupe Propharex, Jean-François Capart. "Grâce à sa petite taille
et son design modulable, notre micro-usine permet de réduire
considérablement les coûts de fonctionnement et d'entretien".
Toutes les parties sensibles (machines, salles blanches) du site ont ainsi
été pré-assemblées en Europe dans des conteneurs maritimes qui, une fois à
destination, sont réunis pour former le squelette de l'usine. Avec, là
encore, un gain de temps et de prix appréciable.
Au final, l'usine affiche un prix clé en main de 3,28 milliards de francs
CFA (5 millions d'euros), entièrement payés par l'Etat gabonais. A plein
régime, elle devrait produire jusqu'à 40.000 tablettes et 200.000 comprimés
de médicaments génériques par heure.
Parmi ses premières productions figurent un remède contre le paludisme
réalisé à base d'artemisia, une plante d'origine chinoise, et plusieurs
combinaisons antirétrovirales contre le virus du sida.
"L'installation de cette unité entre dans notre politique nationale de
santé, qui vise à favoriser l'accès de toutes les couches sociales aux
traitements", souligne le docteur Adolphe Mabongo, directeur du médicament
au ministère de la Santé. "Sa production vise d'abord à satisfaire le marché
gabonais mais elle pourra à terme couvrir toute la région".
A terme, c'est donc un marché étendu de 30 millions de personnes que visent
les promoteurs de l'usine, gage de la rentabilité de leur opération.
Il leur reste cependant, avant toute autre chose, à recruter puis former la
trentaine de personnes chargées de faire tourner le site. "Nous allons
démarrer avec seulement deux expatriés et former le reste du personnel sur
place", explique Thomas Haahr. "L'idée est que les Gabonais puissent se
débrouiller seuls d'ici deux ans".
"Il est clair qu'il est plus facile d'exporter des médicaments vers
l'Afrique que d'y installer une usine", renchérit jean-François Capart,
"mais nous avons fait un pari. Celui de transmettre notre savoir-faire".
Avant même la sortie de sa première pilule gabonaise, le groupe Propharex
prépare ainsi l'implantation d'autres exemplaires de sa micro-usine dans des
pays comme le Bénin, la Tanzanie, l'Ouganda ou le Congo-Kinshasa.
Les autorités gabonaises, elles, ont déjà ouvert un nouveau front dans la
"bataille" pour leur indépendance en matière de médicaments, selon le mot du
ministre de la Santé Paulette Missambo. Des contacts "avancés" sont en
cours, avec le Brésil cette fois, pour la construction d'une deuxième usine
de médicaments antirétroviraux.