[e-med] La Banque mondiale soutient pour la première fois un vaccin destiné aux PED

La Banque mondiale soutient pour la première fois un vaccin destiné aux pays pauvres
LE MONDE | 13.05.09 | 16h39 • Mis à jour le 13.05.09 | 16h39
http://www.lemonde.fr/planete/article/2009/05/13/la-banque-mondiale-soutient-pour-la-premiere-fois-un-vaccin-destine-aux-pays-pauvres_1192441_3244.html

Un vaccin contre le pneumocoque - une bactérie responsable de la mort de 800 000 enfants par an - va pouvoir être fabriqué et diffusé dans une forme adaptée aux pneumonies et méningites qui sévissent dans les pays pauvres, et ce grâce à un dispositif financier original mis en place par les bailleurs de fonds avec l'aide de la Banque mondiale.
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Ce vaccin existe en théorie, mais les laboratoires pharmaceutiques rechignent à le fabriquer. Son coût, oscillant entre 71 et 84 dollars la dose aux Etats-Unis, est en effet jugé beaucoup trop élevé pour être vendu dans les pays en développement, compte tenu du faible pouvoir d'achat des populations. Comment, alors que le besoin existe, assurer la solvabilité du marché ?

Dans le cadre de l'alliance GAVI (Global Alliance for Vaccines and Immunization), qui regroupe entre autres l'Unicef, l'Organisation mondiale de la santé et la Banque mondiale, six donateurs, l'Italie (635 millions de dollars), le Royaume-Uni (485 millions), le Canada (200 millions), la Russie (80 millions), la Norvège (50 millions) et la Fondation Bill et Melinda Gates (50 millions) se sont engagés à apporter un total de 1,5 milliard de dollars de subventions aux laboratoires au fur et à mesure qu'ils fabriqueront le vaccin destiné aux pays en développement.

Malgré ces engagements, les industriels n'osaient prendre le risque de lancer une chaîne de fabrication très onéreuse. Le conseil d'administration de la Banque mondiale a donc décidé, le 2 avril, de leur promettre que l'institution se substituerait à ces bailleurs s'ils faisaient défaut, à concurrence des 1,5 milliard de dollars. Pour la première fois dans l'histoire, cette promesse sera gagée sur le capital de la Banque.

"Nous avons dû surmonter un autre problème, raconte Philippe Le Houérou, vice-président de la Banque pour les financements concessionnels et les partenariats mondiaux. Sur quel prix de la dose de vaccin devions-nous nous baser pour calculer notre subvention ? Si nous le fixions trop haut, on pourrait nous accuser d'avantager les grands groupes pharmaceutiques. Si nos calculs étaient trop bas, les laboratoires risquaient de ne pas se lancer dans l'aventure."

700 MILLIONS D'ENFANTS

Les coûts de fabrication du vaccin étant tenus secrets par les laboratoires, la Banque mondiale a fait appel à des économistes, dont un Prix Nobel, Eric Maskin, pour fixer un tarif. Sur cette base, "nous proposons donc un prix de 3,50 dollars pendant dix ans, et les laboratoires qui l'accepteront recevront, outre cette recette garantie, une subvention de 3,50 dollars par dose pour environ 20 % des doses qu'ils produiront. Cela afin de leur garantir un amortissement convenable, et avec un processus de révision en cas d'inflation", précise M. Le Houérou. Ce financement particulièrement innovant devrait être techniquement bouclé avant trois mois, ce qui permettra de mettre en production le vaccin au cours de l'année à venir.

La vaccination progressive des 700 millions d'enfants menacés dans le monde par les affections dues au pneumocoque permettrait de sauver 900 000 vies d'ici à 2015 et 7 millions d'ici à 2030.

Si cette "première" réussit, la Banque pourrait l'étendre à d'autres cas où le marché fait défaut. "Le système mis au point pour le pneumocoque semble adapté, par exemple, à la mise au point d'un vaccin contre le paludisme, à la fabrication d'une pilule nutritive "miracle", mais aussi au développement de nouvelles technologies adaptées aux pays pauvres", explique le vice-président de la Banque mondiale, bien décidé à faire jouer à l'établissement son rôle de fédérateur des donateurs publics et privés.
Alain Faujas
Article paru dans l'édition du 14.05.09.