[e-med] La suspension des subventions VIH/SIDA du Fonds mondial au Nigéria est «regrettable» - activistes

La suspension des subventions VIH/SIDA du Fonds mondial est «regrettable» -
activistes

ABUJA, le 2 mai (IRIN) - La décision du Fonds mondial de lutte contre le
VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme de suspendre deux subventions sida
accordées au Nigeria en 2003 pour cause de mauvaises performances a été
jugée 'regrettable' par les activistes mardi.

Après des mois d'incertitude, le Conseil d'administration de l'organisme
international de financement a finalement décidé vendredi à Genève d'annuler
ces deux subventions d'un montant initial de près de 70 millions de dollars
sur cinq ans, suivant les recommandations de son secrétariat qui s'était dit
«peu satisfait» des résultats obtenus par ce pays.

«Ce qui arrive est très triste, ... parce que les gouvernements africains
ont des difficultés à engager suffisamment de ressources pour fournir des
traitements à ceux qui en ont besoin», a déploré Oba Oladapo, secrétaire
national du Mouvement d'action pour les traitements (TAM, en anglais), une
coalition d'ONG qui milite en faveur de l'accès aux traitements.

«Nous avons été virtuellement transformés en nation mendiante mais même
quand on nous donne de l'argent, comme dans le cas du Fonds mondial, nous ne
sommes pas capable d'en faire quelque chose de bon», a-t-il expliqué à
PlusNews. «C'est regrettable, surtout pour les communautés de personnes qui
vivent avec le VIH/SIDA qui en ressentiront l'impact.»

La position des autorités nigérianes n'était pas encore connue mardi. Selon
le correspondant de PlusNews à Abuja, les responsables de la lutte contre le
sida ont précisé devoir encore réfléchir à la situation et à la meilleure
façon d'y répondre.

La capitale de la fédération nigériane accueille depuis mardi, et pour trois
jours, une rencontre des chefs d'Etat de l'Union africaine, en vue de
préparer la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies
sur le VIH/SIDA, qui se tiendra du 31 mai au 2 juin à New York.

Selon le Fonds mondial, les premières tranches des subventions concernées,
environ 20 millions de dollars pour 2003-2005, ayant déjà été déboursées, ce
sont donc quelque 50 millions de dollars que vient de perdre le Nigeria.

Ces fonds étaient destinés à accélérer les programmes de distribution de
médicaments antirétroviraux (ARV) et de prévention de la transmission du
virus de la mère à l'enfant (PTME),

En octobre, le Fonds mondial avait envoyé une lettre à l'instance de
coordination nationale (CCM en anglais), l'organe nigérian chargé de gérer
les subventions, pour lui enjoindre de fournir des explications sur
l'utilisation de ces deux financements.

Le Fonds mondial avait dit s'inquiéter de la lenteur de la mise en place des
programmes de distribution d'ARV et des doutes qui pesaient sur la fiabilité
des données fournies par le Comité national de lutte contre le sida (Naca),
principal bénéficiaire des subventions.

<b>Des explications confuses, une exécution trop lente</b>

En novembre, le CCM présidé par le docteur Abdulsalami Nasidi, avait affirmé
avoir répondu aux demandes d'explication de l'organisme international.

Selon le Global Fund Observer, la lettre d'informations de l'ONG <a
href="http://www.aidspan.org/&quot; target="_blank"
style="color:#0000FF">Aidspan</a> basée aux Etats-Unis et dont la mission
est de surveiller l'efficacité des programmes du Fonds mondial, un document
fourni vendredi aux membres du Conseil d'administration a détaillé les
raisons justifiant une suspension des financements au Nigeria.

Ce rapport cite notamment le programme de distribution d'ARV, censé
permettre à 14 000 personnes de recevoir ces traitements à la fin de la
première année de subvention.

Or à cette date, aucun patient ne bénéficiait de ces ARV, selon le GFO, qui
précise que sur les 24 000 personnes qui devaient en bénéficier avant la fin
de la seconde année de financement, seules 6 865 en recevaient
effectivement.

Des retards identiques ont été mentionnés par l'institution en octobre, qui
citait le cas du financement destiné à augmenter le nombre de centres
proposant des services de PTME, un programme qui affichait un retard de six
mois sur le calendrier prévu.

Concernant les doutes sur la fiabilité des données fournies par le Nigeria,
le document a expliqué que «le nombre de personnes que le [Naca] rapporte
comme étant sous traitement» était en fait «le nombre de personnes qui
auraient pu être sous traitement si tous les médicaments envoyés aux centres
de santé avaient été utilisés», selon le GFO.

En réponse aux inquiétudes des activistes et des personnes dont la survie
dépend des ARV, le Fonds mondial a affirmé que les personnes infectées au
VIH déjà sous traitement dans le cadre de ces programmes continueraient à en
bénéficier pendant au moins deux ans, le temps de trouver une solution
alternative.

Une troisième subvention VIH/SIDA d'un montant de 180 millions de dollars
sur cinq ans, validée par le Fonds mondial mais toujours en attente de
signature, n'est pas concernée par la suspension des deux autres, a précisé
Jon Liden, porte-parole du Fonds mondial.

Cette dernière subvention, toujours en négociation, sera administrée «selon
une nouvelle configuration», a expliqué Mark Willis, en charge du dossier
Nigeria au Fonds mondial, alors qu'il se trouvait à Dakar fin mars.

Ce 5ème round de financement doit permettre d'accélérer le programme
national de distribution d'ARV dans le troisième pays au monde le plus
touché par l'épidémie en nombre de personnes infectées avec, selon les
dernières statistiques gouvernementales, plus de trois millions de personnes
vivant avec le virus.

Mais ces déclarations n'ont pas rassuré M. Oladapo.

«Il n'y a plus que des ARV dans la prise en charge du VIH ! D'autres choses
comme promouvoir le soutien aux personnes sous traitement, l'engagement des
communauté ou l'observance du traitement... souffriront incontestablement de
la suspension des financements.»

Environ 40 000 personnes reçoivent gratuitement ces médicaments qui
prolongent l'espérance de vie des personnes vivant avec le sida, une
décision prise en janvier par le gouvernement, selon les statistiques
officielles. Les autorités nigérianes affirmaient vouloir les offrir à 250
000 patients infectés au VIH d'ici juin.

La performance des Etats bénéficiaires dans l'utilisation des financements
alloués par le Fonds mondial est une exigence imposée par l'organisme, qui
espère ainsi convaincre les bailleurs internationaux de continuer à financer
la lutte contre les trois épidémies.

Le Nigeria n'est pas le premier pays à se voir refuser la poursuite d'un
financement du Fonds mondial pour mauvaise performance: en 2005, le
programme paludisme du Sénégal a été suspendu pour des raisons similaires,
une situation qu'a aussi connu un programme VIH/tuberculose en Afrique du
Sud, et plus récemment, une subvention contre le paludisme au Pakistan.

«Peut-être aurions-nous pu éviter cette situation si les bonnes personnes
avaient été au bon endroit, mais aussi si le Fonds mondial n'avait pas
insisté sur certaines conditions telles qu'avoir un seul bénéficiaire
principal qui n'a pas forcément les capacités requises [pour gérer les
subventions]», a conclu M. Oladapo.

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