[e-med] Le placebo aurait un effet z�ro

E-MED: Le placebo aurait un effet z�ro
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Le placebo aurait un effet z�ro
Coup de tonnerre dans le milieu m�dical : 2 chercheurs danois, tr�s
controvers�s, clament l'inefficacit� de cette pilule sans mol�cule active,
cens�e soulager l'asthme, ou faire baisser la pression art�rielle. Cette
remise en cause pourrait bouleverser toute l'organisation des essais
th�rapeutiques.

Docteur Jean-Michel Bader
Publi� le 26 mai 2001, page 12
Le figaro
http://www.lefigaro.fr

Le placebo serait sans valeur. Cette information d�rangeante a �t� publi�e
avant-hier dans le �New England Journal of Medicine�. Deux chercheurs danois
du Panum Institute et de l'universit� de Copenhague, Asbjorn Hrobjartsson et
Peter Gotzsche, signent dans la revue m�dicale nord-am�ricaine un long
article, fruit de l'analyse de 727 �tudes cliniques r�alis�es entre 1946 et
1998 : �Nous n'avons d�tect� aucun effet significatif du placebo par
comparaison � l'absence totale de traitement�, concluent les auteurs.

Depuis plus de quarante ans, on estime dans le monde m�dical qu'environ un
tiers (35%) des patients � qui l'on donne une pilule ayant le m�me go�t et
la m�me forme que le m�dicament � tester, mais ne contenant aucune substance
active, ressentent une am�lioration objective de leurs sympt�mes. S'appuyant
sur ce chiffre, de nombreux m�decins prescrivent des placebos � leurs
patients, persuad�s de b�n�ficier de la derni�re mol�cule mise au point
dans les laboratoires.

Tout a commenc� en 1955, avec la publication dans le �Journal of The
American Medical Association (Jama)� d'un article intitul� �Le puissant
placebo� par le docteur Henry Beecher, anesth�siste au Massachusetts General
Hospital de Boston. Le docteur Beecher avait pass� en revue une dizaine
d'�tudes comparant le placebo avec un traitement actif.
C'est lui qui avait conclu que le placebo avait des vertus particuli�res :
�Et c'est lui qui avait sorti de son chapeau le chiffre magique de 35% qui
est ensuite entr� dans la mythologie moderne du placebo�, dit le docteur
Hrobjartsson.

Ce chiffre ressass� depuis des lustres par les revues, les journaux
m�dicaux, et les industriels du m�dicament, le docteur Hrobjartsson, par
curiosit�, a voulu savoir d'o� il venait. Comme dans toute bonne rumeur, les
articles en citaient d'autres plus anciens, qui eux-m�mes ne faisaient que
citer des publications ant�rieures. Et c'est en tombant sur l'article
princeps de Beecher que le m�decin danois a voulu en savoir plus. Et de
citer Beecher : �Il est �vident que les placebos ont un haut degr�
d'efficacit� dans le traitement des r�actions subjectives, am�liorent
r�ellement le malade, ses effets th�rapeutiques �tant produits dans 35,2% (+
ou - 2,2%) des cas.�

Depuis c'est � l'aune de cet �talon que l'on �value l'efficacit� r�elle des
vrais m�dicaments. L'effet du placebo est donc la diff�rence entre le niveau
de base du patient du groupe placebo dans un essai randomis�, avant et apr�s
traitement. �Avec cette approche, estiment les chercheurs de Copenhague,
l'effet du placebo ne peut pas �tre distingu� de l'histoire naturelle de la
maladie, ni avec la r�gression � la moyenne statistique, ou l'effet d'autres
facteurs. Les effets importants du placebo pourraient bien n'�tre que des
artefacts dus � des m�thodes de recherche inadapt�es.�

Dans leur comparaison moderne des r�sultats d'essais de m�dicaments, les
m�decins danois trouvent plusieurs facteurs confondants. D'abord, l'histoire
naturelle de la maladie �volue souvent par pouss�es et r�missions. Si le
m�decin est consult� � l'apog�e d'une crise, quel que soit le m�dicament
choisi, il y a des chances pour que l'am�lioration vienne toujours. Le
professeur Claude Abbou, urologue au CHU Henri-Mondor (Cr�teil) fait partie
de ceux qui pensent que �c'est possible. Ce n'est pas stupide. Nos patients
atteints d'ad�nomes prostatiques ont ces fluctuations de sympt�mes. Ils
viennent nous voir quand leur maladie s'exacerbe. En sortant du cabinet
m�dical, ils vont d�j� mieux. C'est tr�s multifactoriel�.

Ensuite, soulignent les Danois, lorsque l'on compare le nouveau traitement
propos� non seulement � un placebo, mais aussi � une abstention
th�rapeutique (pas de m�dicament, ni d'intervention), les malades
appartenant au groupe sans traitement ont souvent une am�lioration identique
� celle des malades sous placebo !

A la rescousse du docteur Hrobjartsson, la revue francophone
d'ethnopsychiatrie citait en d�cembre 1999 le m�decin fran�ais Philippe
Pignarre : �En r�alit�, on appelle placebo une s�rie entass�e de m�canismes
baroques non contr�l�s : am�liorations ou gu�risons spontan�es,
modifications ind�pendantes de toutes actions, sentiment subjectif - et
peut-�tre illusoire - d'am�lioration, etc. C'est l'entassement de ces
ph�nom�nes communs qui est magnifi� et r�ifi� sous le nom d'effet placebo.�

Bien entendu, il y a de nombreux sceptiques � cette nouvelle th�orie, comme
le professeur David Freedman, statisticien � l'universit� de Berkeley
(Californie). Selon ce sp�cialiste, les m�thodes statistiques employ�es pour
la m�ta-analyse des Danois, qui consiste � m�langer des donn�es d'�tudes
m�thodologiquement tr�s diff�rentes, peuvent induire en erreur. �La force de
la preuve de l'effet placebo est peut-�tre un peu moins grande que je ne le
pensais, mais en tout cas il existe bel et bien.�

�Si le placebo ne sert � rien, nous dit un sp�cialiste fran�ais du
m�dicament, comment se fait-il que dans certaines �tudes on observe, et dans
d'autres on n'observe pas, de diff�rences entre placebo et le nouveau
traitement ?� Une chose est certaine : il faudra plus qu'un article sur le
placebo pour convaincre industriels, autorit�s r�glementaires et m�decins
que sa statue immense doit �tre imm�diatement d�boulonn�e.

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