ZIMBABWE: Des ARV moins chers et plus accessibles ?
http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportId=76330
Une entreprise pharmaceutique locale pourrait fabriquer des médicaments
anti-rétroviraux moins chers et plus accessibles
HARARE, 18 janvier 2008 (PlusNews) - Les médicaments anti-rétroviraux (ARV),
susceptibles de prolonger la vie des personnes atteintes du VIH/SIDA, sont
dangereusement rares au Zimbabwe, et restent hors de prix pour une majorité
de Zimbabwéens séropositifs. Pourrait-on les rendre moins chers et plus
accessibles en les fabriquant sur place ?
Les laboratoires Varichem, une entreprise pharmaceutique locale, ont
léquipement nécessaire pour fabriquer des ARV ; or, compte tenu dun cruel
manque de devises, il est difficile dimporter les matières premières
nécessaires à la fabrication de ces médicaments et la société a dû cesser de
les produire.
Linflation galopante et le manque de devises ont paralysé le secteur de la
santé, entrainant des pénuries de médicaments et déquipement médical et un
manque de personnel, qui a migré en quête de salaires plus confortables et
de meilleures conditions de vie.
The Herald, quotidien officiel zimbabwéen, a rapporté la semaine dernière
que la prescription dun traitement dun mois au Stalenev 30, un ARV de
première intention courant, coûtait aujourdhui 85 millions de dollars
zimbabwéens (environ 42,50 dollars au taux de change pratiqué sur le marché
parallèle). Or, la plupart des Zimbabwéens gagnent moins de trois millions
de dollars zimbabwéens par mois (1,5 dollars) ou sont au chômage. Dans les
pharmacies privées, les médicaments peuvent coûter jusquà quatre fois le
prix auquel ils sont vendus dans les dispensaires publics subventionnés.
Néanmoins, les laboratoires Varichem ont annoncé dernièrement la
modernisation de leur usine de fabrication pharmaceutique, en vue dune mise
aux normes internationales ; cette mise aux normes pourrait résoudre le
problème du gouvernement zimbabwéen, qui lutte pour déployer davantage son
programme de traitement national, malgré le manque de moyens financiers dont
il dispose.
Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a versé 2,1
millions de dollars pour financer ce processus de mise à niveau et a formé
le personnel de Varichem à lutilisation des dernières technologies de
fabrication dARV. Selon Tobias Zangare, le directeur, lusine de
fabrication dARV doit encore être testée et agréée par lOrganisation
mondiale de la santé (OMS).
Mais on ignore encore si la fabrication locale de ces médicaments permettra
dapporter un vrai changement. La construction étant achevée, lusine de
fabrication dARV nattend plus quune certification OMS ; cet agrément
permettrait à Varichem de prétendre à obtenir des subventions
internationales pour financer ses opérations.
« Le plus important, cest que nous pourrons demander des fonds aux
bailleurs internationaux, tels que le Fonds mondial de lutte contre le sida,
la tuberculose et le paludisme », a déclaré M. Zangare à la presse.
En effet, en labsence dautorités régulatrices locales, lOMS est
intervenue pour réaliser elle-même une évaluation de qualité rigoureuse ; et
passer le test de préqualification de lOMS est indispensable pour tous les
pays qui souhaitent obtenir des fonds auprès du Fonds mondial, pour financer
la fabrication locale de leurs médicaments.
David Parirenyatwa, ministre de la Santé et du Bien-être de lenfant sest
réjoui de cette décision ; « une fois agréés, les laboratoires Varichem
pourront recevoir des commandes payables en devises, augmenter leur
production, et produire ainsi assez de médicaments pour subvenir aux besoins
de nos populations et en exporter vers dautres pays », a-t-il déclaré.
Pourtant, les militants de la lutte contre le sida restent sceptiques. Le
révérend Maxwell Kapachawo dirige le Réseau zimbabwéen des dignitaires
religieux vivant avec le VIH/SIDA ou personnellement touchés par la maladie
(ZINERELA+), une association qui défend les droits de ces personnes ; selon
lui, les laboratoires Varichem ne pourront pas forcément faire baisser le
prix des ARV, pour les rendre plus abordables.
« En tant que société privée, leur objectif pourrait être dempocher des
bénéfices ; alors, je pense que les organismes publics pourraient intervenir
et jouer un rôle pour assurer que ces traitements, susceptibles de prolonger
la vie des patients, soient bel et bien accessibles aux citoyens moyens ».
Kudzi Matombo (un nom demprunt), toujours sur la liste dattente du
gouvernement pour lobtention dARV gratuits, a révélé à IRIN/PlusNews
quelle avait été contrainte de puiser dans son épargne personnelle pour se
procurer ces médicaments coûteux.
« Aujourdhui, je dépends des membres de ma famille et de mes amis qui
travaillent à létranger ; ils menvoient de largent pour que je puisse me
procurer des ARV car mon salaire de responsable débutante dun fast-food ne
suffit même pas à subvenir à mes besoins les plus élémentaires (nourriture,
logement, vêtements) ».
Quant à Joseph Moyo, déclaré séropositif il y a deux ans, il se réjouit de
cette initiative en faveur de la fabrication locale des ARV. « Je pars du
principe que si les médicaments sont fabriqués au Zimbabwe, on peut espérer
quils soient vendus à un prix abordable », a-t-il déclaré.
Daprès les statistiques officielles, seules 90 000 personnes suivent une
thérapie ARV, tandis que près de 400 000 autres attendent encore de recevoir
des ARV, dont ils ont un besoin urgent.
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