O.K pour une meilleur transparence dans les décisions d'AMM, de
remboursements des médicaments, de reévaluation des médicaments qui ont reçu
une AMM, mais à quand une transparence sur les dépenses des directions de
marketing des industries pharmaceutiques pour promouvoir leurs médicaments ?
C'est là le vrai sujet de la discorde.
Bonne journée
Abdelkader Helali <pharmacomateriovigilancedz@hotmail.com>
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PHARMACOVIGILANCE
Le dispositif français de surveillance des molécules après leur mise sur le
marché présente des faiblesses
Médicaments : les lacunes de l'évaluation
Les médicaments sont-ils mal évalués ? Un nombre croissant de molécules se
sont avérées entraîner en réalité plus de complications que de bénéfices.
L'anti-inflammatoire Vioxx a été retiré du marché en octobre 2004, après la
découverte d'un excès de risque cardiaque. Les antidépresseurs - évoqués
dimanche par le ministre de la Santé - augmenteraient le risque de suicide
chez l'enfant et l'adolescent. Le traitement hormonal de la ménopause aurait
à long terme plus d'effets délétères que favorables. La grande majorité des
alertes sur les médicaments vient des États-Unis. L'agence américaine, la
FDA (Food and Drug Administration), chargée de leur surveillance est
pourtant accusée de laxisme par le Congrès américain. En réalité, les
autorités sanitaires françaises et européennes se caractérisent par une plus
grande faiblesse en matière de transparence et d'évaluation des médicaments.
Le nouveau directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé, Jean Marimbert, semble déterminé à rendre le système plus
performant.
http://www.lefigaro.fr/sciences/20041214.FIG0101.html
Martine Perez
[14 décembre 2004]
Tout le monde ou presque désormais prend des médicaments de la naissance
jusqu'à la mort : fluor en bas âge, contraception, antibiotiques,
antihypertenseurs, anticholestérol, tranquillisants, somnifères, médicaments
anti-inflammatoires, antidouleurs, antiobésité, anti-impuissance,
antiostéoporose, anti-Alzheimer... L'industrie pharmaceutique a contribué à
l'amélioration de l'espérance et de la qualité de la vie. Mais, étant
soumise aux mêmes lois du marché que toute entreprise, elle est obligée de
promouvoir ses médicaments, y compris vers des populations qui n'en ont pas
franchement besoin et même quand ils n'ont pas une efficacité nette. Quand
des millions de personnes prennent le même médicament, un effet secondaire
rare, mais grave, aura des conséquences démultipliées. Cette nouvelle donne
impose une évaluation des médicaments bien plus rigoureuse, avec une
implication majeure des autorités sanitaires.
Aujourd'hui, l'évaluation d'un médicament avant sa mise sur le marché est
basée sur un dossier comprenant des essais cliniques effectués par des
médecins et financés par l'industrie pharmaceutique. Ce dossier est examiné
par les autorités sanitaires, désormais par l'Agence européenne du
médicament en Europe qui délègue cette analyse à un des pays membres, et aux
États-Unis par la FDA. «Mais la démarche de fond n'est pas la même de part
et d'autre de l'Atlantique, explique le professeur Lucien Abenhaim, un des
meilleurs experts européens en pharmaco-épidémiologie, ex-directeur général
de la santé. La FDA a une énorme capacité d'évaluation et d'expertise. Pour
tout essai thérapeutique, elle peut aller jusqu'à réanalyser le dossier de
chaque patient qui y est inclu. L'Agence européenne examine essentiellement
les documents délivrés par les industriels. Par ailleurs, la FDA a mis en
place une commission chargée du risk management. Celle-ci définit avec les
firmes un plan d'évaluation du risque par des études après la mise sur le
marché et un plan de minimisation du risque qui vise à assurer que le
médicament sera prescrit au bon patient, par le biais de l'information aux
malades et aux médecins...»
Mais les grands points faibles de la France et de l'Europe, sont les études
sur les médicaments une fois en vente. Ces études sont indispensables, parce
que celles effectuées en amont ne portent au mieux que sur 2 000 ou 3 000
malades pour des produits pris ensuite par des millions de personnes ; et
parce que les patients dans ces essais, très sélectionnés, ne sont pas
représentatifs des futurs usagers. «Aux États-Unis, explique le professeur
Bernard Bégaud, président de l'université Bordeaux 2 et coordinateur du
premier réseau de pharmaco-épidémiologie inauguré par l'Inserm le mois
dernier, les assurances privées n'acceptent de rembourser les médicaments
qu'avec la certitude que sera étudié par les firmes le rapport entre le
risque, le coût et le bénéfice. Ces assurances mettent en place des
programmes analysant l'utilisation des médicaments, leur impact sur la
santé, le respect des indications, les effets secondaires. Les résultats de
ces études américaines représentent 70% des publications concernant le
médicament dans le monde. Ces assurances privées mènent des programmes très
poussés en collaboration avec de nombreuses universités.»
En France, nous nous reposons sur les données des Américains qui ne sont pas
toujours forcément transposables à l'Europe. En juillet 2003, Lucien
Abenhaim, à l'origine de la réévaluation du Vioxx et du Celebrex à l'Agence
européenne du médicament, avait réussi à imposer le principe de l'étude des
médicaments après leur autorisation. Mais en pratique, le dossier évolue
lentement depuis, du fait du manque d'équipes spécialisées et de certaines
réticences. «Notre étude sur l'évaluation des nouveaux anti- inflammatoires
s'est heurtée à de nombreuses difficultés avant d'être lancée, raconte le
professeur Bégaud. On nous dit souvent que ces enquêtes coûtent cher. Mais
la collectivité rembourse chaque année un milliard d'euros pour les
statines, ces médicaments contre le cholestérol. Combien de gens en prennent
? Qui sont-ils ? En ont-ils vraiment besoin ? Combien d'infarctus évités ?
Personne ne le sait. Ce n'est pas normal.» L'Agence européenne du médicament
n'a pas de position forte sur le sujet non plus.
Si les experts en pharmaco-épidémiologie en France se comptent sur les
doigts d'une main, il y a eu aussi longtemps des difficultés pour accéder
aux bases de données des médicaments. Certes, la Caisse nationale
d'assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) dispose de la base de
données la plus importante du monde en la matière. Mais les modalités
d'utilisation n'avaient pas été clairement définies. Depuis août 2004, un
groupement d'intérêt scientifique sur l'évaluation des produits de santé a
été créé avec la DGS, l'Inserm, la CNAMTS et la direction de la Sécurité
sociale. Avec des règles de confidentialité strictes, cette base pourrait
placer la France en tête de l'Europe pour ce qui est des essais
thérapeutiques.
Enfin, la presse américaine a beaucoup brocardé l'indépendance de ses
propres experts. Mais le silence sur cette question, en France et en Europe
est encore plus inquiétant. Car aux États-Unis, des centaines d'experts à la
FDA sont uniquement salariés de l'Agence, tandis que la force de frappe des
Agences en Europe est bien moindre. «En France, il est difficile de trouver
des experts qui ne sont pas financés par les industriels, nous explique le
professeur Jean-Louis Montastruc (Toulouse). D'ailleurs, l'industrie
pharmaceutique n'aime pas les experts indépendants...»