[e-med] (3) La circoncision, instrument contre la transmission du VIH ????

Cher Monsieur,
Je suis 100% d'accord avec vos remarques.
Effectivement, bien qu'il y ait eu des niveaux de preuves par des études en Afriques australes, quelles seraient les objectifs d'une telle propagante dans ces pays où, je confirme, preque 100 % de garçons sont circonscis avant l'adolescence?
Nous devrions peut-être trouver une autre action de prévention...Pour l'instant j'ai pas d'idées...
Cordialement,

Léopold.
tegnal@yahoo.fr

A propos de la circoncision

   De quelle circoncision parle-t-on ?

   De l'aseptique pratiquée dans de bonne conditions, de celles plus
   traditionnelles qui peuvent intégrer des "pactes de sang ?"

   J'ai travaillé en 2005 en Angola, dans la région des hauts plateaux du
   centre, sur un programme de prévention des IST dont l'infection à VIH.

   Dans certaines communautés, il est pratiqué une circoncision de
   groupe, par classe d'age. Elle est pratiquée sur des garçons du même
   age, ayant entre 11 à 13 ans.

   Dans le village, c'est le tradipraticien encore appelé "Pailhaçao" qui
   la pratique au cours d'une cérémonie.

   Les garçons d'une même classe d'age sont réunis, et circoncis à l'aide
   d'une lame unique, afin de réaliser un pacte de sang, en "transmettant
   du sang d'un garçon à l'autre". Cette transmission sanguine symbolise
   dans la communauté les frères de sang ; elle est un lien social
   important de cohésion et de fraternité, dans cette zone qui a tant
   souffert et qui souffre encore tant des séquelles laissées par le
   conflit armé, les mines, les déplacements de population et la
   pauvreté. Dans ce cas précis, on ne peut pas vraiment dire que la
   circoncision soit un instrument contre la transmission du VIH !!!

   Ma problématique a été de comment pouvoir réfléchir de cette
   situation. La femme européenne que je suis, qui est professionnel de
   santé, mais ni anthropologue, ni ethnologue, n'a pas la capacité
   d'intervenir seule de manière sensée. Je ne peux pas accepter de faire
   de la violation ou de la contre culture.

   Le "Pailhaçao" est un homme de la communauté qui agit toujours en
   tenue traditionnelle. Son visage recouvert par un masque et son
   identité ne sont pas connues. Seule des rumeurs courent, sur des noms.

   Il ne doit traditionnellement pas se dévoiler, il ne m'était donc pas
   possible de le rencontrer.

   J'ai proposé par collègues angolais interposés de lui parler à visage
   masqué, ou derrière une paroie, ou par des écrits transmis et lus par
   des partenaires locaux. J'ai bien insisté sur le fait que mon désir de
   communication ne portait pas sur la circoncision elle même, mais sur
   les conditions de sa réalisation. La symbolique de la classe d'age et
   du pacte de sang m'a été expliquée par les membres de la communauté et
   le personnel de santé local. J'ai émis la possibilité de transmission
   de maladies infectieuses par la lame commune, et ai demandé au
   "Pailhaçao" de réfléchir sur la possibilité d'inventer une symbolique
   de la transmission du sang entre garçon qui conserverait le pacte de
   sang et la création frères de sang, en utilisant du matériel tranchant
   unique, et jetable ou désinfectable.

   Quand nous sommes revenus dans ce village situé à des heures de route
   en voiture, le "Pailhaçao" m'a fait prévenir qu'il acceptait de me
   rencontrer, ce qui est un grand signe de confiance et de respect.

   Ma mission s'est achevée avant que je n'ai pu y retourner, mais mes
   collègues et amis angolais largement au point sur le terrain médical
   on continué ce travail de terrain plus anthropologique que médical
   dans le fond. Le "Pailhaçao" a accepté l'éventualité d'utiliser des
   lames uniques par garçons et de réfléchir sur la symbolique.

   Quand je suis arrivée dans cette zone de l'Angola, il était plutot
   question par les autorités locales d'interdire la circoncision, ce qui
   partait d'une base biologique sensée, mais sous les conseils venat du
   Nord.

   Que se serait-il passé si l'interdiction de la circoncision dans ces
   conditions avait été mise en place ? Probablement de la circoncision
   clandestine, dans des conditions encore plus risquées, comme cela se
   produit en général suite à une interdiction.

   Les populations n'ont ni les moyens physiques ni économiques pour se
   déplacer (routes minées, grandes distances)

   A force de donner des ordres qui sont inadaptés et n'ont pas de sens,
   les grandes institutions du Nord empirent parfois les situations déjà
   tant critiques dans des zone Sud.

   Les programmes des ONG ne sont pas accompagnés de professionnels des
   coutumes et cultures qui permettent d'agir dans le respect. Elles
   feraient bien de réfléchir sur l'inclusion des Sciences Humaines dans
   leurs programmes et verraient sans doute mieux ainsi leurs abbérations
   voire leurs échecs. Les personnes qui partent ne sont pas formées à
   l'adaptation aux cultures, je ne sais pas ce qu'en pense mes confrères
   des autres pays, mais en ce qui me concerne j'en suis désolée.

   Walele

   Dr Sylvie Chiron (pharmacien-France)

   [1]sylviechiron@hotmail.com

Vous partez du principe que presque 100% des garçons sont circoncis.
Dans ce cas effectivement il n'y a pas de raisons de promouvoir l'intervention, mais il y a de nombreux pays, dont la RSA, où la circoncision n'est pas la règle dans ce cas la proposition de circoncision est utile.

Jean loup REY

médecin de santé publique
Le Barry
04180 Villeneuve
06 16 53 83 30
jean-loup.rey@wanadoo.fr

La publication des résultats des essais de prévention de la transmission du
VIH par la circoncision en RSA font poser de multiples questions.

Il faut distinguer plusieurs niveaux.

Il est maintenant prouver que la circoncision diminue les taux de
transmission du VIH avec des limites non discutées en particulier plus cette
action est plus efficace pour l'homme que pour la femme.

Il est inutile de revenir sur ces faits.

La circoncision est plus ou moins fréquente selon les pays ou les régions.
Sa prévalence peut être proche de 100% comme dans les pays du Sahel et de
Maghreb. Il est possible que ces taux expliquent en partie la basse
prévalence sérologique observée pour le VIH dans ces régions.

En conséquence dans les pays où la prévalence de la circoncision est élevée
il sera inutile d'envisager la promotion de la circoncision comme moyen de
prévention du VIH.

Par contre dans les pays où la prévalence de la circoncision est basse ou
hétérogène, il serait irresponsable de ne pas envisager la promotion de la
circoncision pour lutter contre la diffusion du VIH.

Ces constats ne donnent pas de réponse, par contre, sur les modes de
promotion et de réalisation de la circoncision elle même. Il reste donc du
travail à faire pour étudier les meilleures méthodes pour réaliser l'intervention en elle même. Il sera utile de s'inspirer des pratiques utilisées lors des essais de RSA.

Quand des circoncisions de groupe sont traditionnellement pratiquées comme
en Angola et beaucoup d'autres pays un travail anthropo sociologique devra
bien sûr précéder toutes interventions.

Il est possible de faire en parallèle des actions pour améliorer la pratique
des circoncisions traditionnelles, il faut les faire, mais il ne faudrait
pas que cela arrête la promotion de la circoncision dans un but de limiter
la transmission du VIH. Les deux domaines sont différents même s'ils peuvent
et doivent être réfléchis et envisagés parallèlement. L'un de doit pas être
exclu au prétexte que l'autre est plus urgent ou important.

Il est possible d'ajouter qu'il n'a pas été rapporté dans la littérature des
conséquences dramatiques de ces pratiques collectives mais c'est une
recherche à poursuivre.

Jean loup REY
médecin de santé publique
Le Barry
04180 Villeneuve
06 16 53 83 30
jean-loup.rey@wanadoo.fr