[e-med] (5)Campagne DCI de l'Association Mieux Prescrire et de larevue Prescrire

Voici ci-dessous ce que je peux répondre à ces trois confrères.
Amicalement,
Jacques Juillard

QUESTION de Jean-Loup REY :
bravo pour l'initiative mais....
il faudrait aussi faire une campagne (auprès de qui?) pour simplifier les
DCI
les laboratoires travaillent plusieurs semaines pour choisir le nom de leur
produit
comment voulez vous retenir les DCI actuels?:
-dextropropoxyphène chaque fois que je dois l'écrire je suis obligé de
regarder mon guide et j'arrive à peine à le prononcer c'est tout bénéfice
pour le paracétamol qui est un nom facile
- et je ne parle pas des antibiotiques dont les DCI sont de plus en plus
compliqués
- le mieux est quand même l'amoxicilline acide clavulanique rien que pour
l'écrire il va falloir une augmentation des tarifs
- heureusement qu'il est permis de dire cotrimoxazole au lieu de
sulfaméthoxazole triméthoprime

MA REPONSE :
C'est la Commission ad'hoc de l'OMS qui établit les DCI. Avec des règles et
des principes établis, mais généralement sur une première proposition des
firmes.
Intervenir pour que l'OMS garde toute son indépendance vis-à-vis des firmes
pour établir les DCI (et les maintenir) est un des axes de la Campagne DCI.

La complexité des DCI par rapport aux noms commerciaux : oui parfois, mais
il ne faut pas l'exagérer, et il faut savoir la mettre en balance avec les
avantages à utiliser la DCI :
- le paracétamol n'est pas une exception, les autres DCI simples sont
nombreuses.
- 1700 DCI contre 8000 noms commerciaux (pour la France), mais surtout pour
chaque soignant seulement quelques dizaines de DCI pour soigner 90 % des
patients : voilà des simplifications.
- les règles de composition des DCI (segments clés communs à des familles
thérapeutiques) apportent des repères importants, non seulement pour
mémoriser les DCI, mais pour repérer les effets attendus, les interactions,
les prescriptions redondantes, etc.
- exemple : amfébutamone (DCI initiale) était peut-être un peu plus
difficile à mémoriser que bupropion (DCI actuelle, acceptée par l'OMS sous
la pression de la firme) ; mais au moins il était plus facile de repérer que
ce médicament est apparenté aux amphétaminiques.
- pour plaisanter tout en restant sérieux : le retrait d'un médicament est
souvent l'occasion, tant pour les professionnels de santé que pour les
médias ou le public, de mémoriser le nom commercial et la DCI d'un
médicament qui leur paraissait auparavant compliqué(exemple : Vioxx° =
rofécoxib). Ce sera probablement le cas pour le dextropropoxyphène (déjà
retiré du marché au Royaume-Uni, en Suisse et en Suède), un antalgique qui
n'offre pas le meilleur rapport bénéfice-risque dans son "niveau
antalgique".

QUESTION de Nanhoua YEO :
je vous remercie pour l'initiative.
  Mais j'ai des questions en suspens que je voudrais partager avec vous.
  Pour des produits ayant plus d'un seul principe actif. Par exemple le
DUPLAMOX 250mg: association Amoxicilline+Bromhexidine, le prescripteur
doit-il écrire le nom des deux principes actifs avec le risque que le
pharmacien délivre deux medicaments ayant chacun un principe actif. Dans ce
cas le patient n'aurai pas gagné car il aura à payer doublement.
   Si il existe plus de deux principe actifs alors la situation devient
encore plus pénible pour le prescripteur.
   Une autre question est de savoir si le medecin pourra facilement retenir
les PA quand on sait que les DCI sont plus difficiles que les noms
commerciaux plus simples.

MA REPONSE :
Si un médicament comportant plusieurs substances est prescrit en DCI, la
rédaction de l'ordonnance peut faire comprendre clairement qu'il s'agit
d'une association de substances et non de substances séparées.
De plus il n'est pas interdit d'indiquer côte à côte le nom du médicament en
DCI et entre parenthèses le nom commercial d'une spécialité particulière (ou
la mention "Princeps° ou autre", si l'on veut laisser le choix de la
dispensation). Ce peut même être utile à plusieurs titres :
- faciliter la compréhension du pharmacien (mais aussi et surtout du
patient)
- bénéficier des avantages de l'utilisation de la DCI (pour le raisonnement
des soignants et l'information du patient) tout en indiquant le choix d'une
spécialité particulière (cf la remarque de Cylos Nkomba)
Attention aux associations ! Certaines associations de substances à dosages
fixes peuvent avoir un avantage sur les mêmes médicaments pris séparément
(moins chers souvent, mais pas toujours ; plus facile à prendre, etc.). Mais
pour la revue Prescrire, de nombreuses associations ont plus d'inconvénients
que d'avantages, le gain théorique en observance n'est pas réel, et
certaines sont de véritables "soupes" dont on ne sait plus ce qu'elles
contiennent.
Dans de telles cas, voir énumérés les DCI des différents composants est
utile pour bien connaître le contenu du médicament, et utile pour la
sécurité des patients.

REMARQUE de Cylos Nkomba :
l'initiative est bonne mais .....
  Quand un prescripteur utilise une spécialité c'est aussi suite aux bons
résultats que cette spécialité a déjà donné.
  Il y a des firmes qui ne respectent pas les bonnes pratiques de
fabrication, leurs produits sont soit sous dosés soit ont une mauvaise
biodisponibilité.
  Surtout dans les pays en voie de développement ou les contrôle de qualité
est difficile, utiliser seulement la DCI dans ces pays ouvre la porte aux
produits de mauvaise qualité quand nous achetons une spécialité nous
achetons également la marque (résultats sûrs) à prendre en compte

MA REPONSE :
La remarque de Cylos Nkomba est bien réelle.
La substitution d'une spécialité par une copie (= par un générique) ne pose
pas de problème dans les pays qui peuvent contrôler et donc garantir la
qualité de tous les médicaments commercialisés, qu'ils soient fabriqués sur
place ou importés.
Ce n'est pas encore le cas pour de nombreux pays, notamment en voie de
développement.
Dans ce cas, il est tout de même possible d'utiliser à la fois la DCI, pour
les avantages qu'elle offre (voir ci-dessus ma réponse à Nanhoua Yeo), ET le
nom commercial de la spécialité qu'on souhaite voir dispenser.

Merci à tous pour les encouragements
Jacques Juillard
Association Mieux Prescrire et la revue Prescrire
jjuillardlrp@wanadoo.fr