[e-med] (7)Campagne/programme d'information sur les dangers du marché illicite des médicaments

Chers amis,

Je suis satisfait que l'on revienne à des réflexions plus globales sur les
programmes visant d'abord à endiguer puis à éradiquer à terme le marché
illicite des médicaments.

Comme l'a si bien synthétisé notre ami Dah El Hadj Sidi, et comme le
souhaite vivement M. Simon Kaboré, il ne s'agit pas de se limiter aux
campagnes d'affichage et d'en oublier les autres composantes plues ardues à
mettre en place.

Concernant le cadre institutionnel dans lequel doit s'inscrire ce programme,
il semble important de soutenir une harmonisation des actions au niveau des
organisations économiques et monétaires régionales (UEMOA et CEMAC).

Deuxièmement, à l'échelon national, à l'instar de l'organisation de la lutte
contre le VIH Sida , il serait utile de favoriser dans chaque pays la
création d'un comité interministériel dédié à la lutte contre le marché
illicite et prenant des engagements politiques fermes. Celui-ci pourrait
regrouper le Ministère de la Santé, fédérant avec lui les divers acteurs
concernés (dont la DPM, l'Inspection Pharmaceutique, les Ordres, syndicats,
associations) et aussi le ministère du Commerce, de la Police, de la
Justice, des Douanes.

Au niveau du programme lui-même, on peut dire que schématiquement, trois
groupes d'actions sont à mener : celles qui visent à améliorer les
performances du circuit officiel, celles qui visent à sensibiliser, et
celles qui visent à réprimer énergiquement.

J'aimerais maintenant avoir votre opinion quelques pistes, qui restent
encore à creuser, pour améliorer l'accessibilité au médicament essentiel de
qualité, à un prix abordable aux populations démunies, dans un contexte
concurrentiel lié à la propagation du marché illicite :

1) Qualité et prix au niveau des Centrales d'Achats :
La qualité a certes un coût, mais celui-ci est de nos jours maîtrisé par les
Centrales d'Achats, qui adoptent de plus en plus un système de présélection
rigoureux (certes toujours perfectible) leur permettant de sélectionner des
couples fabricant/produits garantissant l'efficacité, la qualité et la
sécurité. Les Centrales optent ensuite pour une mise en concurrence des
fournisseurs dont les couples ont été validés, ce qui permet l'obtention de
prix abordables. Le prix de départ et la qualité ne sont donc surtout pas à
remettre en cause.

2) Tarification : par contre, certains avancent souvent qu'en Afrique le
système de tarification du recouvrement des coûts sur les médicaments est
quelque peu exagéré, et qu'en pratique les prix réels de vente au malade
dépassent assez largement les tarifs officiels (la plupart du temps inconnus
de la population et non affichés).
Le médicament aurait parfois tendance à être considéré comme une vache à
lait, dont la vente permet de couvrir une partie des dépenses de
fonctionnement, ainsi que diverses primes pour le personnel soignant dans un
contexte de pauvreté et d'isolement (primes d'éloignement, de technicité, de
transport). Le financement d'une partie des frais de fonctionnement et les
compléments de salaires semblent injustement supportés par le malade et
devraient pour certains observateurs être financés par un autre mécanisme
(surtout dans ce contexte concurrentiel avec le marché illicite, dont les
produits de moindre qualité sont moins chers à la base). Qu'en pensez-vous ?

3) Ne pensez-vous pas, puisque c'est clairement écrit dans les politiques
pharmaceutiques nationales, qu'il serait temps de « favoriser » la
prescription du médicament générique de qualité dans les hôpitaux, et d'offrir
aux malades en consultation externe ou aux malades chroniques la possibilité
concrète d'acheter leur traitement dans les pharmacies de cession des
hôpitaux ou des centres de santé.

4) Faudrait-il envisager la possibilité pour les Centrales d'Achats de
fournir le secteur privé en médicaments de qualité, et s'il le faut
réfléchir à des mécanismes incitatifs comme la révision des taux de marges
brutes à chaque maillon de la chaîne de distribution sur ces médicaments
génériques ?

5) Enfin, n'oublions pas que le marché illicite est un marché de proximité
organisé pour pénétrer l'environnement proche des plus vulnérables.

Merci de vos réflexions, et à bientôt,

Gérard MILLOT
Pharmacien Coopération Française
CT du SP de l'ACAME
Ougadougou Burkina Faso
gerard.millot@laposte.net