[e-med] Accès aux médicaments : création d’un groupe de tr avail chargé de contrôler les accords de libre échange con clus par l’Union européenne

2 February 2010
Accès aux médicaments : création d’un groupe de travail chargé de
contrôler les accords de libre échange conclus par l’Union européenne
By David Cronin for Intellectual Property Watch @ 12:00 pm
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BRUXELLES – Les accords de commerce ne doivent pas contenir de clauses
relatives aux droits de propriété intellectuelle susceptibles de remettre
en cause l’accès des pays pauvres aux médicaments à des prix abordables, a
déclaré un député chevronné du Parlement européen.

David Martin, membre du parti travailliste écossais et député du Parlement
européen depuis 1984, a exprimé son inquiétude vis-à-vis de l’accord de
libre échange que l’Union européenne négocie actuellement avec l’Inde. Des
projets de l’accord rendus publics par la Commission européenne, l’organe
exécutif de l’Union européenne, montrent que celui-ci contient des
dispositions concernant la propriété intellectuelle d’une portée
considérable. Y figure notamment une clause d’exclusivité des données qui
permettra aux principales entreprises pharmaceutiques d’empêcher pendant
plusieurs années les industries indiennes de médicaments génériques
d’utiliser les formules à partir desquelles les nouveaux médicaments sont
fabriqués.

L’Inde étant l’un des principaux exportateurs de médicaments génériques à
faible coût vers les pays en développement, ces clauses pourraient avoir
des répercussions dans d’autres pays, selon David Martin. « Ce n’est pas
seulement une mauvaise nouvelle pour l’Inde », a-t-il indiqué. «C’est une
mauvaise nouvelle pour tous les pays que l’Inde fournit en médicaments
génériques.»

David Martin est le président du groupe de travail du Parlement sur
l’innovation, l’accès aux médicaments et les maladies liées à la pauvreté
qui a été créé le 27 janvier à Bruxelles. Ce groupe de travail
multipartite a pour mission de contrôler l’étendue des financements
accordés par l’Union européenne pour les traitements des maladies qui
touchent principalement les pays pauvres et d’examiner les questions liées
aux brevets de médicaments.

L’une des priorités du groupe concerne les problèmes de saisies par les
autorités douanières de médicaments génériques. Au cours de l’année 2008
et en 2009, plusieurs incidents ont eu lieu aux Pays-Bas où les services
des douanes ont bloqué des médicaments génériques en transit, à la demande
d’entreprises pharmaceutiques selon certaines sources, au motif que
ceux-ci avaient été fabriqués en violation des droits de propriété
intellectuelle. «L’objectif était visiblement de porter un coup au
commerce des médicaments génériques », a précisé David Martin, qui a
insisté sur le fait que les saisies portaient sur des médicaments
parfaitement légaux.

L’organisation humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF) sera chargée
d’organiser les nouvelles activités du groupe de travail.

Tido von Schoen-Angerer, directeur de la campagne de Médecins sans
frontières sur l’accès aux médicaments, a indiqué que le groupe de travail
essaierait de faire contrepoids afin de limiter l’influence de l’industrie
pharmaceutique sur les institutions européennes. Cette influence se fait
particulièrement sentir dans le cadre des négociations de l’accord de
commerce avec l’Inde, a-t-il ajouté, relayant la crainte que
l’introduction en Inde de règles strictes en matière de brevets ne
contribue à renchérir le prix des médicaments génériques utilisés par MSF
dans ses programmes d’aide d’urgence.

« L’Inde est la pharmacie des pays en développement », a-t-il rappelé.
«C’est l’un des marchés émergents dont l’industrie pharmaceutique aimerait
s’emparer. On imagine sans peine l’impact que les mesures touchant les
exportateurs indiens de médicaments pourrait avoir sur l’ensemble des pays
en développement. »

Lancées en 2007, les discussions entre l’Union européenne et l’Inde n’ont
pas débouché sur des résultats concrets jusqu’à présent. À l’occasion de
la rencontre entre le Premier ministre indien Manmohan Singh et les
représentants de l’Union européenne, en novembre de l’année dernière, les
deux parties n’en n’ont pas moins exprimé le souhait de poursuivre les
discussions. Un accord pourrait intervenir dans le courant de l’année
2010, selon Manmohan Singh.

Interrogée sur les critiques exprimées à l’égard de la politique
commerciale de la Commission européenne, sa porte-parole n’a pas souhaité
faire de commentaires.

D’après Jon Pender, directeur des affaires économiques et gouvernementales
de l’entreprise pharmaceutique GlaxoSmithKline, «un équilibre doit être
trouvé» entre la protection des droits intellectuels et la possibilité
pour les pays en développement de pouvoir accéder à des médicaments
abordables. Tout en soutenant que les brevets «jouent un rôle important»
en matière d’innovation et favorisent le développement de nouveaux
traitements, il a indiqué que son entreprise était « tout à fait prête » à
explorer de nouvelles approches en matière de réglementation des
innovations médicales.

Il a également estimé que les saisies de médicaments génériques qui
avaient été opérées étaient « très regrettables » et nié le fait que
l’industrie pharmaceutique ait tenté de persuader les autorités douanières
de considérer les médicaments génériques au même titre que des médicaments
contrefaits. «Nous sommes très clairs sur le fait que nous voulons éviter
la confusion entre médicaments génériques et médicaments contrefaits »,
a-t-il assuré. «Nous ne voulons pas que les gens aient l’impression que
l’industrie pharmaceutique tente de brouiller les cartes. »

Paul Thorn, un militant des droits des patients, séropositif depuis plus
de 20 ans, considère que l’influence que les lobbyistes de l’industrie
pharmaceutique exercent sur les institutions européennes est « un peu
perverse ». Si l’opinion publique fait suffisamment pression, elle pourra
convaincre les dirigeants politiques de se soucier davantage de ce qui est
bon pour la population en matière de santé que des profits des entreprises
pharmaceutiques. « À ce moment-là, peut-être que les choses changeront »,
a-t-il lancé. « Nous devons simplement faire en sorte de ne pas relâcher
la pression. »

Avec le soutien de l'Organisation internationale de la Francophonie.