[e-med] Aides appelle au boycott

Aides appelle au boycott
publié en ligne : 14 octobre 2007 dans Action 109
<http://www.actupparis.org/medias.php3?id_mot=2253&gt;

Lors de l’ouverture de la Conférence Aids Impact à Marseille
<http://www.actupparis.org/article3040.html&gt; , le 1er juillet dernier,
Vincent Pelletier, directeur de Aides <http://www.aides.org/&gt; , a tenu un
discours salué par l’ensemble de l’assistance. Extraits.

« (...) l’heure est grave. Un laboratoire pharmaceutique, a décidé de
déterrer la hache de guerre. La lutte contre le sida a beau avoir 25 ans, le
combat continue, peut-être plus aujourd’hui encore qu’hier. (...)

Après le procès des laboratoires pharmaceutiques en Afrique du Sud dont vous
vous rappelez sans doute, Abbott, parce qu’il s’agit d’eux, dans le même
esprit, a décidé de ne plus commercialiser ses nouveaux médicaments en
Thaïlande dont le Kaletra® <http://www.actupparis.org/mot692.html&gt; en
comprimé, appelé Aluvia® dans beaucoup de pays, médicament antirétroviral de
deuxième ligne.(...) La décision d’Abbott revient donc à priver, en toute
connaissance de cause, les malades thaïs d’un médicament indispensable car
trop cher. Au-delà de la Thaïlande, ce sont tous les pays en développement
qui se sentent menacés par cette odieuse mesure de rétorsion.

Partout dans le monde, on vante l’implication des personnes touchées dans la
définition des politiques de santé et dans la mise en place de ces
politiques. Mais quand il s’agit de nous assurer le droit à la vie avec des
médicaments de qualité et efficaces alors là nous redevenons des
marchandises. Rentables ou pas. Et là nous n’avons plus droit au chapitre.
(...)

Et Abbott vient d’attaquer en justice Act Up-Paris suite à l’action menée
contre lui le 26 avril 2007, menaçant ses dirigeants de prison et
l’association d’une amende dont elle ne se relèverait pas. (...)

En tant que malade du sida prenant du Kaletra® en comprimé, je ne peux
l’accepter. Je ne peux m’imaginer matin et soir prenant mes comprimés et
continuer à me regarder dans la glace. En les prenant, je resterais en vie,
mais j’accepterais aussi d’enrichir un labo qui décide froidement de priver
d’une chance de survie des milliers de malades dans le monde. Comment
pourrais-je continuer à vivre en sachant ça ?

Je ne jetterai pas mon Kaletra®, même si j’en ai très envie. Je sais la
chance que j’ai, moi, vivant dans un pays riche. Je sais que ce serait un
geste vain face aux centaines de milliers de séropositifs qui en ont besoin
et qui ne peuvent le prendre. Mais je ne peux me résoudre à accepter
l’inacceptable.

Alors puisque Abbott veut faire de notre santé un bien commercial, je
voudrais que nous utilisions des méthodes commerciales contre Abbott. Nous
sommes 40 millions de séropositifs dans le monde. Grâce à nos combats, plus
de 2 millions d’entre nous bénéficient d’un traitement. Et demain beaucoup
plus encore. Si pour Abbott, nous ne sommes que des consommateurs alors nous
allons avoir des comportements de consommateurs, mais au niveau mondial. Ne
dit-on pas que le client est roi ? La concurrence peut jouer, elle est une
arme efficace.

Je vais donc demander à mon médecin de changer de traitement. Il en existe
d’autres. Je vais faire jouer la concurrence.

Et j’appelle tous les séropositifs qui le peuvent, et après en avoir parlé à
leur médecin, à faire de même. A demander à leur médecin de leur prescrire
un autre produit qu’un de ceux de chez Abbott, si leur état de santé le leur
permet. J’appelle tous les médecins prescripteurs à choisir une autre
alternative médicamenteuse que les produits Abbott, toutes pathologies
confondues, pour leurs patients pour ne pas cautionner l’odieux chantage que
ce laboratoire fait aujourd’hui à la Thaïlande et demain au reste du monde
en développement. Je leur demande également de ne plus aller dans les
conférences organisées par Abbott, je leur demande de ne plus recevoir les
délégués médicaux de ce laboratoire. Ne devenons pas complice d’un monde où
les riches vivront sur la mort des plus pauvres. Et que cela serve d’exemple
pour les autres laboratoires.

Au-delà des malades et de leurs médecins, je demande aux autres acteurs de
la lutte contre le sida, à toutes les organisations, nationales ou
internationales, gouvernementales ou non gouvernementales, de déclarer
publiquement leur soutien aux malades thaïs et d’ailleurs qui ont besoin de
traitements de deuxième ligne, efficaces et accessibles. Je demande aux
orateurs qui vont se succéder à cette tribune pendant 4 jours, que ce soit
Monsieur l’ambassadeur français du sida, au directeur du fonds mondial et à
tous les autres de condamner les agissements inacceptables d’Abbott.

Je demande enfin à Abbott de mettre fin à ses poursuites contre Act Up, mais
ça ne suffira pas, ça ne suffira plus. Je demande à Abbott et aux autres
laboratoires de cesser les représailles envers les pays usant de la licence
obligatoire.

A partir d’aujourd’hui, les règles du jeu vont changer. Les profits des
laboratoires pharmaceutiques sont en jeu. Mais maintenant c’est nous, les
malades du monde entier qui jouons ! Jouons tous ensemble !

Je compte sur vous, les malades thaïs comptent sur nous tous. »