E-MED: conf�rence minist�rielle de l'OMC � Doha (2)
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L'OMC va-t-elle faire passer la sant� avant le profit ?
Par Al Ebokem Fomenky
Journaliste � la PANA
Dakar, S�n�gal (PANA) - Les d�l�gu�s qui d�barquent � Doha, au
Qatar, pour prendre part � la quatri�me r�union minist�rielle de
l'Organisation mondiale du Commerce, pr�vue du 9 au 13 novembre,
sont sceptiques sur la possibilit�, pour cette rencontre,
d'obtenir des r�sultats plus satisfaisants que ceux de la
derni�re session, qui avait eu pour cadre la ville de Seattle,
aux Etats-Unis.
A la veille de cette nouvelle s�rie de pourparlers et apr�s des
mois de n�gociations, ponctu�s de pressions et de chantages, les
positions des pays industrialis�s et celles de leurs partenaires
des pays en d�veloppement restent tr�s �loign�es.
Le principal point de divergence des deux groupes, men�s par les
Etats-Unis et la Suisse, d'une part, le Br�sil et l'Egypte,
d'autre part, demeure la question � forte charge �motive et ayant
d'importantes implications financi�res qui touche aux licences de
fabrication des m�dicaments anti-SIDA dans les pays en
d�veloppement.
Les positions des deux groupes sur la question sont apparemment
inconciliables.
Les uns proposent de prolonger jusqu'en 2016 le d�lai au terme
duquel les pays en d�veloppement devront se conformer aux termes
de l'accord sur les droits de propri�t� intellectuelle, tout en
promettant un moratoire de cinq ans sur les sanctions pr�vues par
l'OMC contre tout pays de l'Afrique subsaharienne qui
exploiterait ill�galement un brevet, pour lutter contre des
probl�mes sanitaires.
Les autres en appellent aux membres de l'OMC, en particulier aux
Etats-Unis et � la Suisse qui abritent la plupart des compagnies
pharmaceutiques, pour leur demander de "faire passer la sant�
avant le profit" en modifiant et en clarifiant les r�gles
r�gissant les brevets � l'occasion de la conf�rence de Doha.
Cette question est pollu�e par les int�r�ts divergents des
diverses parties.
Suite aux menaces prof�r�es par les Etats-Unis et le Canada qui
annoncent leur intention d'exploiter, sans licence, le Cipro de
Bayer pour traiter les cas d'anthrax et � l'initiative prise, par
la m�me compagnie Bayer, qui offre de fournir des m�dicaments �
des prix fortement r�duits, les exigences des pays africains ont
pris un peu plus de poids en pr�vision de la conf�rence de Doha.
Quoique, pour des raisons diplomatiques, personne n'ait
formellement qualifi� cette situation d'application d'une
politique de "deux poids deux mesures, la d�cision des Etats-Unis
et du Canada est fortement critiqu�e dans les coulisses.
Pour ces deux pays, la question a �t� prise en otage par l'Inde,
le Br�sil et l'Egypte, pour promouvoir leurs programmes
�conomiques, ces pays n'ayant pas n�cessairement pour v�ritable
objectif de "faire passer la sant� avant le profit" dans les pays
africains d�munis.
Les deux nations de l'Am�rique du nord estiment que les
dispositions de l'accord sur les Aspects de la Propri�t�
intellectuelle li�s au Commerce (ADPIC), ou TRIPS en anglais,
permettent une accessibilit� satisfaisante des m�dicaments en cas
de crise sanitaire.
Cependant, quelque 50 pays en d�veloppement, au nombre desquels
38 pays africains, affirment exactement le contraire.
Certains estiment que si la r�union de Doha ne s'arrange pas pour
que les r�gles qui prot�gent la propri�t� intellectuelle
n'interdisent pas aux pays pauvres de produire et d'importer des
m�dicaments � des prix raisonnables pour lutter contre le SIDA ou
d'autres pand�mies, les critiques risquent de d�g�n�rer pour
donner lieu � des manifestations de rue.
La question majeure est que le trait� adopt� par l'OMC, en 1995,
pour prot�ger les brevets, ne prend pas en charge de mani�re
satisfaisante les probl�mes de sant�, comme le SIDA, qui a
d�j� tu� plus de 13 millions de personnes rien que sur le
continent africain et qui tuerait 3.000 personnes par semaine au
Zimbabwe, selon certaines sources.
La conf�rence doit s'attaquer aux insuffisances en veillant
cependant � ce que l'on ait pas l'impression que les droits de
propri�t� sont conc�d�s sans la moindre contrepartie financi�re,
un tel sc�nario risquant de d�courager les investissements
consentis dans le domaine de la recherche.
Il s'agit l�, semble-t-il, d'un �quilibre que les prochaines
s�ries de n�gociations commerciales devront s'efforcer de
r�aliser, m�me si une telle entreprise s'av�re tr�s difficile,
afin de sauver la cr�dibilit� de l'OMC, qui a tendance �
s'�roder.
Cela explique pourquoi les d�bats publics qui ont lieu en
Occident ont �t� recentr�s depuis l'apparition de l'anthrax, pour
prendre en charge toutes ces sensibilit�s.
Par cons�quent, la r�union de Doha devra offrir aux pays
africains l'occasion de laisser exploser leur col�re, au regard
de la discrimination dont ils sont victimes, en donnant toute la
mesure des pr�occupations des populations devant les r�gles de
brevet de l'OMC qui font passer les int�r�ts des puissantes
compagnies pharmaceutiques avant les soucis de sant� publique des
pays pauvres.
N�anmoins, le souci de prot�ger leurs meilleurs int�r�ts
strat�giques et fondamentaux leur commande de se focaliser
exclusivement sur la recherche d'une position claire en ce qui
concerne les lois qui r�gissent la propri�t� intellectuelle
(TRIPS), qui sont les v�ritables obstacles qui emp�chent la
plupart des pays en d�veloppement de produire des m�dicaments
anti-SIDA.
Il serait opportun que, pour ce faire, ils cherchent � former une
solide alliance avec le Br�sil, qui s'est battu, avec une r�elle
r�ussite, pour avoir le droit de se procurer les m�dicaments
anti-SIDA � moindre co�t.
Le moment n'aurait pas pu �tre mieux choisi pour lancer ce genre
d'action concert�e, notamment � la suite du pr�c�dent que
constitue la position des Etats-Unis au sujet du Cipro.
Au pire, ils feraient mieux de lutter r�solument pour
l'application de prix diff�rents pour les pays pauvres et en vue
de la cr�ation d'un fonds permettant, dans les pays africains,
l'acquisition de m�dicaments contre le SIDA.
Compte tenu de l'exp�rience dont jouit d�j� le Br�sil en la
mati�re, l'Afrique ne peut que gagner en adoptant la m�me
d�marche que ce pays.
Il importe r�ellement peu que cette question controvers�e fasse
�chouer la nouvelle s�rie de discussions sur le commerce mondial,
comme le craignent de nombreux observateurs.
8/11/2001