[e-med] Paludisme: donner systématiquement du fer aux jeunes enfants serait dangereux

Paludisme: donner systématiquement du fer aux jeunes enfants serait
dangereux
PARIS, 12 jan 2006 (AFP)

Donner à tous les jeunes enfants du fer et de la vitamine B9 (acide folique)
comme compléments alimentaires dans des régions à forte prévalence du
paludisme peut accroître le risque de maladies graves et de décès, selon une
étude à paraître dans la revue médicale britannique The Lancet.

Un tel accroissement du risque n'est pas relevé dans des régions du Népal où
le paludisme est rarissime, selon une autre étude paraissant également dans
The Lancet daté de samedi.

L'Organisation mondiale de la Santé et le Fonds des Nations unies pour
l'enfance (Unicef) recommandent que des compléments en fer et en vitamine B9
soient administrés aux enfants de moins de deux ans dans les régions où
l'anémie est fréquente.

Mais administrer ces compléments aux enfants qui ne souffrent pas d'un
déficit en fer "pourrait être nuisible" lorsque le paludisme est fréquent.
Il il faut donc réviser ces recommandations invitant à un apport
systématique pour tous les jeunes enfants en fer et en acide folique,
concluent Robert Black (Johns Hopkins University de Baltimore, Etats-Unis)
et ses collègues.

L'étude a porté sur plus de 24.000 enfants âgés de moins de trois ans (un à
35 mois) vivant à Pemba sur l'île de Zanzibar. Ils ont été répartis en trois
groupes : un tiers a reçu du fer (12,5 mg par jour au-delà de 11 mois,
moitié moins avant) et de la vitamine B9; un tiers du fer, de l'acide
folique et du zinc; et un tiers seulement un placebo.

L'essai a été arrêté prématurément en août 2003, lorsqu'un surcroît de décès
ou d'hospitalisations a été constaté dans les groupes recevant du fer et de
l'acide folique (avec ou sans zinc en plus). Dans ces deux groupes, le
risque d'hospitalisation pour maladie grave ou de décès s'avérait 12% plus
élevé que dans le groupe placebo.

Les effets du fer sur le système immunitaire, ou de possibles interactions
entre acide folique et traitements anti-paludéens à base d'antifolate (ce
qui retarderait les effets des médicaments), sont évoqués dans un
commentaire par des spécialistes du Kenya pour tenter d'expliquer ces
résultats.

Seuls les enfants ayant réellement un déficit en fer bénéficiaient des
compléments administrés, souligne Robert Black, qui relève qu'environ les
trois quarts des enfants de moins de cinq ans vivant en Afrique de l'Est
souffrent d'anémie, c'est-à-dire d'un manque de globules rouges dû notamment
à une carence en fer et en vitamine B9.

Une carence en acide folique provoque un ralentissement de la multiplication
des cellules, notamment de celles ayant un fort taux de renouvellement comme
les cellules sanguines (globules rouges et blancs). Indispensable, l'acide
folique est également impliqué dans la synthèse de neuromédiateurs qui
jouent un rôle fondamental dans le métabolisme du cerveau et des nerfs.

Dans la seconde étude réalisée auprès de 25.000 enfants népalais âgés de un
mois à trois ans, dans une région où le paludisme est rare, il n'y a pas eu
de hausse particulière des décès parmi les enfants recevant du fer et de la
vitamine B9.