Communiqué MSF
19.07.2011 09:50
VIH/Sida - L'accès à des ARV à prix modéré menacé
http://www.msf.lu/sur-le-terrain/newsdetail/artikel/1/vihsida-l.html
A l'occasion de la conférence sur le sida à Rome, Médecins Sans Frontières
publie un rapport "Untangling the Web" sur les prix des médicaments
antirétroviraux. Pour télécharger le rapport Untangling the Web et pour plus
d'informations sur la participation de MSF à la Conférence sur le sida à
Rome, rendez-vous sur aids2011.msf.org
Selon un rapport publié aujourd'hui par Médecins Sans Frontières (MSF) lors
de la Conférence de l'International AIDS Society à Rome, plusieurs
compagnies pharmaceutiques ont interrompu les programmes de réduction du
coût des médicaments antirétroviraux (ARV) dans les pays à revenu
intermédiaire.
Le rapport "Untangling the Web - Guide des prix des ARV" qui analyse les
prix de 23 ARV selon les informations fournies par 19 fabricants, confirme
également une tendance à la baisse du coût des médicaments lorsqu'ils ne
sont pas protégés par des brevets.
« Dans les pays les plus pauvres, les prix continuent de baisser, explique
Nathan Ford, directeur médical de la Campagne d'Accès aux Médicaments
Essentiels de MSF. Mais un nombre important de personnes vivant avec le
VIH/sida habitent dans des pays à revenus intermédiaires exclus par ces
réductions de prix. »
A titre d'exemple, Tibotec/Johnson & Johnson excluent tous les pays à revenu
intermédiaire de leurs programmes de réductions des coûts. Les réductions du
laboratoire Abbott ne s'appliquent pas aux pays à faible revenu et à revenu
intermédiaire. ViiV (Pfizer et GlaxoSmithKline) ne proposent plus de prix
réduits pour les pays à revenu intermédiaire, même lorsque les programmes de
traitement sont entièrement financés par le Fonds Mondial pour la lutte
contre le sida, la tuberculose et le paludisme ou le programme PEPFAR du
gouvernement américain.
Merck vient d'annoncer qu'elle n'appliquera plus de réductions du prix à son
nouveau médicament, le raltegravir, dans 49 pays à revenu intermédiaire. En
font partie plusieurs pays où se trouvent un grand nombre de personnes
vivant avec le VIH/sida, comme l'Inde, l'Indonésie, la Thaïlande, le
Vietnam, l'Ukraine, la Colombie et le Brésil.
Le coût du traitement, en ne considérant que ce médicament, est ainsi de
5.870 $ par patient et par an au Brésil, alors qu'il est de 675 $ dans les
pays à plus faible revenu. Pourtant, ce dernier montant est déjà quatre fois
supérieur au prix du traitement de première ligne recommandé (combinaison
TDF / 3TC / EFV).
Ces changements interviennent après que la semaine dernière, plusieurs pays
en voie de développement ont été exclus de l'accord entre le laboratoire
pharmaceutique Gilead et le Medicines Patent Pool. Ce mécanisme vise à
élargir l'accès aux ARV à faible prix, en donnant accès aux brevets aux
producteurs de médicaments génériques.
Il y a plus de dix ans, MSF a démarré des programmes de traitement du HIV en
Asie et en Amérique Latine. Depuis, l'organisation a transféré bon nombre de
ces programmes aux autorités locales, dans l'espoir que les programmes mis
en place par les gouvernements allaient pouvoir fournir aux malades les
médicaments dont ils avaient besoin. Dans ces pays, beaucoup d'entre eux
sont sous traitement depuis plusieurs années, et devraient aujourd'hui avoir
accès à de nouvelles lignes de traitement. Mais les brevets bloquent l'accès
aux médicaments génériques, moins chers.
« Les programmes de réduction du coût des ARV mis en place par les
compagnies pharmaceutiques ne sont pas une solution à long terme, explique
Janice Lee, pharmacienne spécialiste du VIH/sida à La Campagne d'accès aux
médicaments essentiels de MSF. Lorsque les brevets constituent un obstacle à
l'accès et que les producteurs refusent de diminuer les prix, les
gouvernements sont obligés de contourner les brevets afin de garder en vie
les personnes atteintes du VIH dans leurs pays ».
Les « licences obligatoires » pour les ARV octroyées par la Thaïlande et le
Brésil en 2006 et 2007 ont permis de réduire considérablement les prix dans
un contexte où les brevets constituaient un obstacle à l'accès de la part
des patients. Malgré le fait que ces mesures soient autorisées par la les
règles du commerce international, ces pays ont été par la suite ciblés par
des mesures de représailles de la part des compagnies pharmaceutiques ou
d'autres pays.
Mais le rapport de MSF sur les prix des ARV contient également de bonnes
nouvelles. Grâce à la concurrence entre producteurs de médicaments
génériques, le coût du tenofovir, médicament très efficace, est aujourd'hui
de 76$ par patient et par an, contre les 88$ par patient et par an de la
zidovudine (AZT). Ceci rend aujourd'hui plus simple pour les gouvernement
l'abandon des traitements à base de stavudine (d4T), qui a d'importants
effets secondaires sur le long terme, en faveur des combinaisons
thérapeutiques à base de tenofovir, plus efficaces et recommandées par
l'OMS.
Le prix de la combinaison à base de tenofovir, un comprimé à prendre une
fois par jour, a diminué de 70% par rapport à il y a cinq ans, quand l'OMS
en avait recommandé l'utilisation : de 613 $ à 165 $par patient et par an.
« Nous observons que lorsque les brevets n'entravent pas l'utilisation de
médicaments génériques, le coût des médicaments diminue, poursuit Janice
Lee. Or, ces baisses de prix laissent espérer d'atteindre le nouveau
objectif des Nations Unies : mettre 15 millions de personnes sous traitement
d'ici 2015 ».
Aujourd'hui, MSF fournit des traitements antirétroviraux à 170.000 personnes
dans 19 pays.