[e-med] VIH/SIDA, L'enfant, un autre témoin silencieux (le Matin Maroc)

VIH/SIDA
L'enfant, un autre témoin silencieux

116 cas diagnostiqués au Maroc depuis 1986… Et ce n'est que la partie
émergente de l'iceberg !

  Publié le : 26.03.2008 | 12h57
     
En 2007, 420.000 nouveaux cas d'infection infantile au VIH ont été
déclarés et 330.000 enfants sont morts.

Au Maroc, 116 cas ont été diagnostiqués et déclarés depuis 1986 dont
96 enfants sont sous trithérapie au niveau de Rabat-Casablanca.
Les chiffres font froid au dos surtout que l'on sait que 1.800
enfants naissent contaminés chaque jour. «90% de ces enfants sont
infectés par voie verticale, plus de 40% des femmes atteintes
transmettent le virus à leurs nouveau-nés via la grossesse,
l'accouchement ou l'allaitement», explique Soumia Benchekroun,
professeur en pédiatrie à la faculté de médecine de Rabat et
présidente de l'association soleil pour les enfants atteints du Sida.

Pourtant, il existe des mesures de prévention de la transmission mère
enfant (PTME) efficaces, basées sur des prophylaxies anti-
rétrovirales simples à administrer, mais son taux de couverture est
faible. Selon un rapport de l'OMS, moins de 10% des femmes enceintes
séropositives y ont accès en Afrique subsaharienne.
Aujourd'hui, plusieurs obstacles subsistent à l'accès aux soins des
enfants.
Il s'agit de la place de l'enfant dans la famille et la société, le
manque de formation «pédiatrique» des soignants et le manque d'adaptation des Antirétroviraux (ARV). En effet, la séropositivité de l'enfant est
encore vécue comme menant à une mort certaine dans les pays à
ressources limitées. Les enfants et leurs parents sont insuffisamment
informés sur la prise en charge du VIH pédiatrique et peu soutenus
sur le plan psychologique.

«Mis à part la surveillance en matière de prise du traitement, les
parents doivent accompagner leurs enfants atteintes du Sida, dans son
développement tant au niveau psychologique qu'éducatif. D'ailleurs,
ce sont les principales recommandations de l'ONUSIDA», insiste le
professeur Benchekroun.
Elle poursuit : «En fait, l'adolescent malade souffre de plusieurs
difficultés, notamment en matière de suivi médicamenteux et de
sexualité où le préservatif et la contraception sont vécus comme
révélateurs de la séropositivité».

L'importance du diagnostic
Aussi, établir un diagnostic précoce est plus que nécessaire, car ce dernier est la clé de voûte de la réussite d'une prise en charge pédiatrique.

«Au Maroc, le diagnostic d'infection à VIH est souvent établi trop
tardivement, et une fois que la personne est séropositive, on se rend
compte que le suivi est peu maîtrisé par le personnel de santé»,
affirme S. Benchekroun.
En fait, les tests virologiques de détection du VIH pédiatrique sont
rarement disponibles dans les pays en développement. Selon l'ONUSIDA,
les programmes «PTME+» qui assurent un meilleur suivi post natal des
enfants exposés au VIH sont encore des exceptions et les bébés nés de
mères séropositives sont souvent perdus de vue après la naissance.

Quant aux traitements antiretroviraux (ARV), ils sont disponibles
mais leurs formulations sont rarement adaptées aux petits. Leur
administration par les parents est complexe car les doses doivent
être ajustées régulièrement.
De ce fait, l'OMS vient de proposer une standardisation du traitement
aux «ARV» chez l'enfant, mais beaucoup reste à faire pour la
simplifier. «Les ARV pédiatriques sont disponibles, mais ils sont six
fois plus coûteux que les formulations adultes, leurs combinaisons à
doses fixes sont réduites et encore mal adaptées.
Quant au goût amer du médicament, on pense qu'il peut contrer
l'adhérence», précise S. Benchekroun.

Par ailleurs, la prise en charge du VIH pédiatrique, qui est
insuffisamment intégrée aux différents échelons des systèmes de
santé, forme un autre problème.
En effet, les agents de santé des unités non spécialisées sont
insuffisamment formées et n'osent pas s'engager dans la prise en
charge du VIH pédiatrique. Ils connaissent mal les mesures qui
permettent l'amélioration de la qualité de vie de l'enfant infecté
par le VIH (suivi vitamine A, CMX, soutien nutritionnel etc.)
«Certains pédiatres trouvent des difficultés à prescrire les ARV et
manquent d'expérience pour identifier la maladie et assurer son
suivi», déclare notre spécialiste.

Cependant, même si plusieurs perspectives sont encourageantes dans
notre pays, notamment les décisions politiques en matière de gratuité
des soins, la mobilisation des partenaires internationaux, etc., il
est primordial de prendre en considération les autres modes de
transmission du VIH Sida à l'enfant (violences sexuelles, rapports
non protégés chez les jeunes adolescents…).
Car on a beau vouloir ne pas y penser, la réalité reste accablante :
nos enfants sont aussi sujets au Sida !
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Une mobilisation internationale
Une véritable prise de conscience du retard pris dans le traitement
du VIH pédiatrique a eu lieu en 2005-2006. Les organisations
multilatérales ont réagi, en particulier l'UNICEF, qui a lancé sa
campagne «Unissons-nous pour les enfants, contre le sida» avec des
objectifs ambitieux à l'échéance 2010.

En effet plusieurs stratégies sont possibles pour améliorer
quantitativement et qualitativement l'offre de soins en direction des
enfants infectés par le VIH ou exposés au VIH. Une approche est
développée actuellement par certaines ONG américaines. Cette
stratégie plus intégrée aux systèmes de santé consiste, d'une part, à
créer des centres de traitements pédiatriques spécifiques de
l'infection à VIH dûment équipés et dotés d'un personnel spécialiste
placé le cas échéant sous la responsabilité de professionnels de
santé expatriés.

D'autre part, elle a pour objectif de renforcer les structures de
soins pédiatriques nationales existantes afin de consolider leurs
compétences en matière de prise en charge de l'infection à VIH. Et
enfin, une alternative consiste à mettre en place et à renforcer la
prise en charge pédiatrique au sein d'unités «généralistes» de prise
en charge de l'infection à VIH. Ces centres de traitements déjà
existants sont le plus souvent gérés par des associations locales à
base communautaire. Il s'agit donc de réunifier la prise en charge de
l'ensemble de la famille, les parents et leurs enfants étant suivis
au sein du même centre de soins, et d'améliorer leurs connaissances
sur le VIH pédiatrique. Autant en prendre modèle!
     
  Repères
Recommandations
  
Pour la formation des soignants, accorder le même temps à l'enfant qu'à l'adulte
  
Mettre en place simultanément l'accès au traitement pour l'adulte et l'enfant
  
Assurer la gratuité de la prise en charge pédiatrique
  
Collaborer avec les autres programmes de prise en charge pour
améliorer le suivi des enfants
  
Trouver des personnes ressources pour encadrer la prise en
charge des enfants au niveau de la famille
  
Faire en sorte que les protocoles de PTME ne se terminent pas à
l'accouchement
  
Mettre en place le plateau technique nécessaire pour assurer le
diagnostic néonatal
  
Source Par Rajaa Kantaoui | LE MATIN
http://www.lematin.ma/Actualite/Journal/Article.asp?idr=116&id=88040
  
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