[e-med] (13)L'appel de Cotonou - 12 octobre 2009

Bonjour,

Je suis d’avis avec Vincent Hamel. Depuis hier, je fouille le site de la
fondation Chirac pour comprendre ce qui se prépare à Cotonou. J’ai même jeté
un coup d’œil sur les partenaires de l’évènement de Cotonou.

Je me suis posé la question de savoir ce que recouvre la notion de faux
médicament. Il semble que dans le dossier de presse réalisé par la Fondation
Chirac, “un faux médicament est un produit qui a été délibérément ou
frauduleusement mal étiqueté. Cela peut s’appliquer aussi bien aux produits
de marque qu’aux produits génériques. Les faux médicaments incluent ceux ne
contenant pas de principe actif, des principes actifs corrects mais avec un
mauvais dosage et ceux ayant un faux conditionnement. Les produits médicaux
falsifiés concernent les faux médicaments, les faux vaccins (contenant
uniquement de l’eau) et les faux dispositifs médicaux”.

Curieusement, cela ressemble à un plagiat de la contrefaçon de médicament
telle que définie par l’OMS en 1992 «un médicament qui est délibérément et
frauduleusement muni d´une étiquette n´indiquant pas son identité et/ou sa
source véritable», et précisant que : «Il peut s’agir d’une spécialité ou
d’un produit générique, et parmi les produits contrefaits, il en est qui
contiennent les bons ingrédients, de mauvais ingrédients, ou bien encore pas
de principe actif et il en est d’autres où le principe actif est en quantité
insuffisante ou dont le conditionnement a été falsifié ».

Il y a une grosse confusion parfois entretenue à bon escient entre
médicaments contrefaits et médicaments présentant des défauts de qualité
(malfaçons). Elle est entretenue aussi avec les copies légales de
médicaments (dont les génériques), et les médicaments issus d’importations
parallèles. Ainsi en décembre 2008, le groupe spécial international
anti-contrefaçon de produits médicaux mis en place par l’OMS a adopté une
nouvelle version de la définition des contrefaçons qui renforce et clarifie
la précédente, en précisant notamment : « Il ne faut pas assimiler les
violations de brevets ou les litiges concernant des brevets à la contrefaçon
de produits pharmaceutiques. Les produits médicaux (génériques ou
spécialités) dont la commercialisation n’est pas autorisée dans un pays
donné mais l’est ailleurs ne sont pas considérés comme produits contrefaits.
Il ne faut pas assimiler les lots ne répondant pas aux normes, les défauts
de qualité ou le non-respect des bonnes pratiques de fabrication ou de
distribution des produits médicaux à des cas de contrefaçons ». Cette
nouvelle définition exclut ainsi clairement de la définition de la
contrefaçon : les copies de médicaments qui ne sont plus protégés par un
brevet (génériques) ; les copies de médicaments encore sous brevet,
produites dans les pays qui ne reconnaissaient pas les brevets au moment de
leur dépôt, ou qui utilisent les flexibilités des accords sur les brevets
(“licences obligatoires”) ; les médicaments obtenus via les importations
parallèles ; et les médicaments qui présentent des défauts de qualité
pharmaceutique qui ne sont pas intentionnels, bien souvent par non-respect
des bonnes pratiques de fabrication (malfaçons).

La contrefaçon des médicaments a certes des conséquences sanitaires graves,
surtout lorsque les médicaments contrefaits sont des anti-infectieux. Elle a
aussi pour conséquence principale, un manque à gagner pour les firmes
pharmaceutiques dont les produits sont contrefaits. Des chiffres circulent,
mais on manque suffisamment de données fiables sur l’ampleur de la
contrefaçon. On constate surtout une médiatisation croissante et alarmiste
de la question des contrefaçons de médicaments. L’Appel de Cotonou sonne
comme un levier à une rigidification du protectionnisme industriel des
firmes pharmaceutiques occidentales, surtout qu’il est dit que “cet acte
fondateur de la mobilisation est la première étape du processus de demande
d’un vote d’une Convention d’interdiction de la production et du commerce de
faux médicaments devant les Nations Unies”, c'est-à-dire qu’il s’agit à
terme d’élaborer un instrument répressif afin de réglementer la distribution
de médicaments.

En Afrique, nous souffrons de médicaments de mauvaise qualité qui ne sont
pas pour autant des médicaments contrefaits. Nous souffrons aussi de
médicaments qui ne suivent pas le circuit officiel de distribution (souvent
ceux qui se retrouvent dans la rue. Ce ne sont pas forcément des médicaments
contrefaits, ni des malfaçons de médicaments), mais la bataille de firmes en
vu de protéger leurs produits ne doit pas être dissimulée et présentée aux
africains comme la solution à l’accès aux médicaments de qualité. Cela
intéresse plutôt les puissantes firmes occidentales.

Pour améliorer l’accès aux médicaments de qualité en Afrique, il faut
trouver les moyens de baisser les prix des médicaments : les princeps des
firmes occidentales coûtent encore trop cher. Il faut aussi aider les
africains à assainir les circuits officiels de distribution. Cela passe par
des décisions politiques courageuses. Bien d’autres mesures sont utiles.

Dr Clotaire NANGA
Pharmacien
CEDIM, Burkina Faso.

Bonjour
Félicitation vraiment à Dr Nanga pour cette analyse qui met à nu les risques
du fameux "appel de Cotonou". Il est vraiment curieux que ce soit au moment
de sa retraite, hanté par l'angoisse de l'ennui et de l'anonymat, que le
Président Chirac se rappelle de la nécessité pour les africains d'avoir des
médicaments de qualité. Et ce seul sursaut, financé par des firmes
occidentaux, a suffit à rassembler 6 Chefs d'Etat africains qui prennent
ainsi conscience que leurs protecteurs sont menacés par le fléau des
médicaments "contrefaits". Combien de ces Chefs d'Etat pourraient nous dire
ce que c'est qu'un "médicament contrefait"?
Ont-ils conscience que la propension de ce fléau est un indicateur de
l'échec de leurs politiques sanitaires en termes de sécurisation du circuit
d'approvisionnement, de baisse du coût des soins, de décentralisation
intégrale des services de santé, de l'utilisation rationnelle des
ressources, etc....?
Le théâtre qu'ils ont fait à Cotonou est pour les beaux yeux de Chirac et
des firmes financeurs. Maintenant qu'ils sont de retour dans nos pays, nous
(leurs populations) voulons savoir ce qu'ils feront sur les points faibles
de leurs systèmes de santé, notamment sur l'épineuse question du paiement
direct par les populations aux points de délivrance des soins pour accéder
aux services de santé.
Cordialement!

--
Simon KABORE
Coordonnateur du Réseau Accès aux Médicaments Essentiels (RAME)
04 BP: 8038 Ouagadougou 04 Burkina Faso
Tel: bur (226) 50 34 55 32
        Cel: (226) 70 24 44 55
E-mail alternatif: simonkabore@rame-bf.org

Lors des journées de ReMeD il est prévu un atelier le 10 au départ orienté
vers la question des programmes antipalu et de leurs conséquences
Je propose selon le projet qui suit de consacrer l'après midi aux
conséquences pour ReMeD de l'appel de Cotonou avec la ferme volonté de
prendre des décisions concrètes.

Bon courage à tous
Jean Loup Rey médecin de santé publique

Je pense que la question aujourd'hui et maintenant est de voir comment transformer "cette menace"(si les laboratoires intéressés sont derrière tout cela) en opportunité pour résoudre la question épineuse des contrefaçons qui circulent dans nos pays à travers des réseaux illicites et mettant en danger les populations. Pour cela il faut être stratégique, les laboratoires qui se sentent concernés profiteront toujours de toute occasion qui s'offrent à eux pour "tirer le drap de leur côté.
Je précise que chaque pays dans sa règlementation peut donner la meilleure définition de "contrefaçon".

Franck Biayi
Pharmacien
Kinshasa/RDC
Tél:00243818125838

Il y a malheureusement à craindre que Simon Kaboré ait raison.
Reste à savoir ce qu'on peut faire pour que l'intérêt des populations soit
réellement pris en compte.
On peut commencer par travailler chacun pour rassembler les informations et
mettre ensemble nos connaissances le 10 novembre pour proposer aux bailleurs
des actions concrètes.
Il serait bien que tous ceux qui peuvent venir et discuter de ces points ce
jour là se manifestent auprès de Carinne Bruneton ou Mathilde Chosseler à ReMeD, pour organiser au mieux l'atelier.

JL Rey médecin de santé publique

-----Message d'origine-----

Chers lecteurs
L'appel de Cotonou me semble etre ce que l'afrique a connu aux années 90
avec les conferences nationales après la chute de mur de berlin qui etait
un effet boomerang de la perestroika. Aprés, il y a le discours de la
Baule et ce que nous venons de connaitre maintenant avec les regimes
democratiques aux elections toujours truquées. L'appel de Cotonou sur les
medicaments de la contrefacon serait une question qui concernerait plus
les gouvernements respectifs de nos pays dont les dirigeants font de moins
en moins d'inatttention sur cette de santé publique. Esperons que le temps
est venu de prendre les choses au serieux et de considerer l'appel de
contenu comme un element de la bonne gouvernance qui doit etre exigé aux
gouvernants de nos pays, autrement ce serait peine perdue et les
discours des voeux pieux tout simplement.
C'est mon opinion

Alexis Likango*
Pharmacien
Bujumbura Burundi

Bonjour chers e mediens

Je pense que la définition des concepts ne fera d'avantage que nous distraire de notre but. Que le médicament soit de qualité douteuse, malfait, contrefait... le resultat est qu'il ne remplit pas les conditions pour lesquelles il circule. Je veux dire l'efficacité, l'inoccuité et la qualité. Les textes et réglementations sont là depuis l'indépendance, mais c'est aux pharmaciens de voir comment en faire une meilleure exploitation.

Tout est organisation de nos systémes pharmaceutiques nationaux.
Les organes d'approvisionnement doivent pouvoir assurer la traçabilité de tous les médicaments qu'ils importent. Dans chaque pays, il doit être mis en place un cadre de suivi et d'évaluation des structures d'approvisionnement, des sources, des fournisseurs, des circuits de distribution officiels....Les pharmaciens du secteur privé (grossistes répartiteurs) et ceux du public (pharmacies nationales d'appovisionnemet) doivent accepter de jouer le jeu. Il y a un manque extraordinaire de contrôle de ces structures. Ne serait ce qu'un bon systéme d'information du niveau central au dépôt le plus périphérique est fondamental pour assurer une traçabilité des médicaments. En tout cas au Senegal, on ne sent pas leur implication dans la gestion du systéme d'information pharmaceutique en périphérie (officines, dépôts de district, dépôt de poste de santé), trés peu dans la formation et la supervision de ces structures.

Ce premier niveau de contrôle pourait permettre de régler une bonne partie du probléme, car le mal est déjà interne. Tant que ces circuits que nous connaissons ne seront pas maîtrisés, le probléme restera entier.
Il est temps d'agir.

Dr Talla Diop
Programme National de Lutte contre la Tuberculose (PNT)
Tel 221 33 824 90 09
mobile: 77 655 76 60
BP 5899 Dakar-Fann
SENEGAL

A propos de la traçabilité, je reviens sur les normes qui régissent leurs
agréments. En dehors du problème du contrôle de l'application de ces normes, il me semble qu'il faut y ajouter la mise en place de la traçabilité. Peu de grossistes privés en sont capables. Dans beaucoup de pays il y a prolifération de grossistes privés qui n'ont rien de pharmaceutique. La Guinée dont je rentre en est un exemple. 30 grossistes. Le Burundi ou j'étais encore il y a 3 mois , 14 grossistes......
Serge Barbereau

Hello Confrere Likango,
Je suis tres content de ton intervention concernant les medicaments de contrefacon. Il s'agit d'un probleme purement politique et specialement le respect de la loi etablie. Tant que certains individus sont au-dessus de la loi et que regne l'impunite, il n'y aura pas de changement je vous le jure. Je vis aux USA et je vis ce phenomene de respect de la loi etablie et si ceci pouvait arriver en Afrique, ca serait vraiment le salut pour toutes nos populations.
Merci confrere et tu as mon email adresse. Que Dieu te benisse!

  Tshibamba C. Mbiye
   Pharmacien

Salut chers e-médiens
Après avoir lu toutes les différentes interventions, je me rends compte
qu'il y a un véritable problème d'hypocrisie collective malheureusement au
niveau international.
Comment peut-on se réjouir du fait que des dirigeants c'est-à-dire ceux qui
détiennent le pouvoir d'agir se mettent à dénoncer une situation aussi
dangereuse que celle des "faux médicaments".
Je pense qu'un *"chef ne dénonce pas".* Le secteur des médicaments est
réglementé. Il est donc inconcevable qu'on accepte que des individus violent
les lois sans être punis. Nous sommes donc en présence d'une déclaration
d'incapacité politique. C'est déplorable!
Cependant, cette une occasion offerte pour réfléchir sur la question de
l'accès des populations aux médicaments de qualité. En ce sens ma
contribution est la suivante:
1- La sensibilisation par la répression: il faut punir sévèrement les
auteurs, co-auteurs, complices et autorités défaillantes afin de décourager
ceux qui tenterons d'exercer cette profession. Par exemple à Cotonou, toutes
les autorités connaissent le marché des faux médicaments qui approvisionne
les cliniques privés, les cabinets de consultation, les agents de santé
indélicats, etc. et pourtant, rien n'est fait pour décourager ces vendeurs
de la mort.
2- l'amélioration du système de paiement des soins par la généralisation des
mutuelles de santé: le paiement des soins par les mutuelles de santé
pourraient réduire sensiblement la consommation de faux médicaments.
3- le contrôle de qualité périodique dans les officines.
Je crois que les ressources "gaspillées" pour organiser ces retrouvailles de
vieux amis pourraient permettre de commencer l'une des actions que je viens
de proposer en démarrant l'expérimentation dans l'un nos pays.
"Arrêtons de polémiquer, agissons maintenant.
Merci.
--
AGBOFOUN Théophile
Gestionnaire de Projets
Institut Régional de Santé Publique Dr Alfred C. Quenum
IRSP Ouidah, Bénin
BP 918 Cotonou, Bénin
Tel : +229 21 34 16 74/75 poste 316
Fax : +229 21 34 16 72
Cell : +229 90 95 13 03
e-mail : theopanic@gmail.com
unyk: 653 PIN
visit our web site http://www.irsp.bj.refer.org

Bonsoir,
Je suis à 100% d'accord avec Théophile AGBOFOUN mais voudrais ajouter 1 quatrième point.
En amont des pharmacies de ville c'est à dire au niveau des fabricants, exploitants et grossistes, il convient de s'assurer que ne sont commercialisés, que des médicaments dument autorisés. Cela passe surtout par une mutualisation des ressources des différents états afin de faire pression sur les fabricants de médicaments lors de la mise sur le marché de ceux ci.

Bien cordialement.

Vincent MEHINTO
Pharmacien inspecteur de santé publique