[e-med] (2) La liste des médicaments sous surveillance renforcée (France)

[la liste es médicaments sous surveillance en France de l'AFSSAPS est
évolutive. Vous pouvez la consulter en ligne sur le site de l'AFSSAPS à
cette adresse
http://www.afssaps.fr/Activites/Surveillance-des-medicaments/Surveillance-des-medicaments/(offset)/0
ci-dessous l'analyse de la Revue Prescrire.
Bonne journée.CB]

Médicaments sous surveillance : l'analyse de Prescrire
http://www.prescrire.org/fr/3/31/46791/0/NewsDetails.aspx

L'analyse de Prescrire sur la liste de 77 médicaments sous surveillance
publiée par l'agence française du médicament (Afssaps), a été présentée par
Bruno Toussaint, Directeur de la Rédaction, lors d'une conférence de presse
qui s'est tenue le 1er février 2011.

L'ampleur du drame, du désastre du Mediator° (benfluorex) doit beaucoup à la
rétention d'information, au silence, à la non-communication, à la diffusion
d'informations erronées ; entraînant une perte de confiance massive et
parfois excessive.

En réaction, et en prévention d'autres désastres, il est très important que
désormais les médicaments, leurs qualités, leurs défauts, soient un sujet
de large débat permanent dans la société, car certains médicaments sont très
utiles à des soins de qualité, et la bonne conduite des soins nécessite une
confiance éclairée des patients. Pour des soins de qualité, les patients ont
besoin de soignants qui leur déconseillent Mediator° ; les soignants ont
besoin de patients qui ne leur réclament pas Mediator°.

La remise en cause soudaine de nombreux médicaments inquiète les patients,
bouscule et complique le travail des médecins, des pharmaciens, des
infirmiers etc. D'un autre côté, on a vu avec Mediator° que le silence et la
routine irréfléchie ont des conséquences qui se mesurent du côté des
patients en milliers de victimes, jusqu'à la mort. Il faut donc faire face à
cette remise en cause, même si cela demande des efforts.

La publication de la liste des 77 médicaments sous surveillance par l'Agence
française des produits de santé (Afssaps) le 31 janvier 2011 est un
balbutiement maladroit d'une agence habituée aux relations confidentielles
avec les firmes et non à la communication publique avec les patients, d'une
agence centrée sur la réglementation et non sur les soins.

Cette liste est confuse, et malgré le délai pris pour la publier, elle est
livrée sans réel mode d'emploi, sans piste d'action pour les patients et les
soignants, sans comporter pour chaque médicament ni analyse des
alternatives, ni prise en compte du progrès ou non-progrès apporté par ce
médicament, et par exemple sans même mentionner le ou les avis de la
Commission de la transparence correspondants.
Les effets indésirables d'un médicament sont pourtant toujours à évaluer en
regard de ses bénéfices, situation par situation, selon la gravité de la
maladie et l'existence d'alternatives thérapeutiques.

La liste de l'Afssaps est hétérogène. Elle comprend :

1. des médicaments qu'il est urgent de cesser d'utiliser car leur balance
bénéfices-risques est manifestement défavorable même s'ils sont encore munis
d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) en France ou en Europe :
quinine dans les crampes, risques mortels sans efficacité au-delà de l'effet
placebo ; retrait d'AMM en 1995 aux États-Unis d'Amérique !
pioglitazone qui expose au cancer de vessie sans avantage sur d'autres
médicaments du diabète ;
nimésulide qui expose à de graves atteintes du foie sans avantage sur
d'autres anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) mieux tolérés ;
bupropione, amphétaminique sans avantage sur la nicotine mais beaucoup plus
dangereuse ;
agomélatine sans efficacité antidépressive vraiment démontrée mais dont les
risques à long terme sont mal cernés ;
etc.
Il n'y a pas lieu de surveiller particulièrement ces médicaments, il y a
lieu de les retirer du marché.
C'est un gaspillage des ressources collectives de surveiller les médicaments
qui doivent de toute façon quitter le marché au plus tôt.

2. des médicaments intéressants dans certaines situations et pour certains
patients, et qu'il est utile de mieux connaitre :
imatinib ;
déférasirox ;
etc.
Il manque alors les explications et surtout les liens vers les outils de
notifications d'effet indésirables.

3. des médicaments de base dans certaines situations, dont l'intérêt est
absolument certain et dont la surveillance est liée à des risques réels mais
contrebalancés par un bénéfice réel, et sans meilleure alternative :
méthadone, buprénorphine, lévothyroxine.
Si l'Afssaps met vraiment en priorité son rôle de protection des patients,
elle doit désormais :
*mettre en garde, énergiquement et arguments à l'appui, les patients contre
les médicaments plus dangereux qu'utiles, sans attendre le terme des
procédures administratives ;
*faciliter très fortement la notification aux Centres régionaux de
pharmacovigilance des signalements de possibles effets indésirables des
médicaments qui méritent d'être mieux connus ; en veillant à ce que ces
Centres aient les moyens de traiter efficacement ces signalements ;
*progresser en communication claire et argumentée vers les patients et les
professionnels de santé, sans perdre de temps à chercher à protéger les
médicaments ni les firmes pharmaceutiques.
Quoi qu'il en soit, les patients concernés par un médicament de la liste ont
intérêt à discuter avec le médecin et le pharmacien de l'intérêt réel de ce
médicament dans leur cas personnel, et des alternatives à ce médicament.

Prescrire n'a pas publié de liste de médicaments à retirer du marché. Dans
notre numéro de janvier, nous avons publié un bilan de l'année 2010 en 34
pages, dans lequel nous récapitulons notamment les médicaments à retenir ou
non parmi ceux sur lesquels nous avons travaillé et publié en 2010. Un
journaliste de la presse grand public a calculé que, dans ces 34 pages,
Prescrire recommande aux abonnés soignants de ne pas utiliser 32 médicaments
(« médicaments à écarter de sa liste »). Il ne s'agit donc pas d'une liste
exhaustive de tels médicaments.

On nous demande parfois pourquoi nous ne tenons pas à jour la liste des
médicaments dont Prescrire déconseille l'emploi.
C'est que cette liste n'est pas opérationnelle sans l'argumentaire adapté à
chaque situation, pour que chaque professionnel et chaque patient en
discutent ensemble.
Nous considérons que notre priorité est d'apporter les éléments d'information
au fur et à mesure au professionnel, à charge ensuite pour lui d'aborder la
question au moment opportun avec le patient.
© Prescrire 1er février 2011