[e-med] Bayer en guerre contre les médicaments génériques (Act Up)

Bayer en guerre contre les médicaments génériques.
http://www.actupparis.org/spip.php?article4949
publié en ligne : 4 septembre 2012

Les auditions du recours formé par le laboratoire allemand Bayer contre la
licence obligatoire émise par l’Inde en mars dernier sur la molécule
anticancéreuse sorafenib tosylate se sont ouvertes hier devant la commission
d’appel de la propriété intellectuelle indienne.

Le recours aux licences obligatoires est une des flexibilités des accords
internationaux sur la protection des droits intellectuels (ADPIC) signés
dans le cadre de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), il permet à un
gouvernement de passer outre un brevet pharmaceutique en autorisant la
production ou l’importation de versions génériques du médicament pour des
raisons de santé publique. La licence émise par l’Inde a ainsi permis au
génériqueur Natco de produire du sorafenib tosylate 97% moins cher que la
version commercialisée par Bayer. Natco verse en outre 6% de royalties sur
les ventes au laboratoire allemand.

Par ce recours, Bayer s’en prend à l’une des sauvegardes essentielles de
l’accès à des médicaments génériques à bas prix. S’il obtenait gain de
cause, la capacité de l’Inde à émettre de futures licences obligatoires
serait compromise alors même que de nombreux espoirs portent sur le recours
aux licences obligatoires pour diminuer les prix des nouvelles molécules.

“Au sud, de plus en plus de malades développent des résistances aux
médicaments anti-VIH de première ligne et nécessitent des molécules de
deuxième et troisième ligne. Or ces molécules, moins concurrencées par les
génériques, coûtent beaucoup plus cher. Nous comptons sur les flexibilités
des accords ADPIC, et notamment sur les licences obligatoires, pour
permettre aux malades d’avoir accès aux traitements qui sauveront leurs
vies” déclare Céline Grillon, chargée du plaidoyer international à Act
Up-Paris.

Le recours aux licences obligatoires est en effet garanti par la déclaration
de Doha signée en novembre 2001 par l’ensemble des États de l’OMC.

Ce n’est pourtant pas la première fois qu’une industrie pharmaceutique s’en
prend à l’Inde dont la production de médicaments génériques alimente en
grande partie les pays du sud. Depuis 2006, Novartis poursuit le
gouvernement indien devant ses tribunaux pour tenter d’assouplir la loi
anti-evergreening [1] favorable aux génériques. Après avoir été débouté en
première instance et en appel, Novartis poursuit l’affaire devant la Cour
suprême indienne, les auditions finales doivent débuter le 11 septembre
prochain.

Act Up-Paris dénonce les politiques meurtrières de Novartis et de Bayer dont
le combat pour les profits met en péril la vie de centaines de milliers de
malades. Nous demandons à l’Inde de résister aux pressions de big pharma et
de continuer à recourir aux flexibilités des accords ADPIC pour permettre
l’accès à des médicaments génériques à bas prix.

Notes
[1] il s’agit d’une pratique courante de l’industrie pharmaceutique qui
consiste à prolonger la durée d’un monopole en déposant un nouveau brevet
sur une forme très légèrement différente d’une molécule dont le brevet est
arrivé à expiration.
L’Inde dispose d’une législation qui interdit cette pratique : l`article 3d
de sa loi sur les brevets exige une avancée thérapeutique significative pour
qu’un brevet soit déposé sur une molécule déjà existante.