Médicaments de la rue : les réseaux de la résistance
Cameroon Tribune (Yaoundé)
2 Juin 2005
Publié sur le web le 2 Juin 2005
Alain Tchakounte
Les " pharmacies de la rue " continuent leur activité au vu et au su de
tous.
C'est dans des structures agréées, et grâce à un réseau organisé que nombre
de responsables des " pharmacies de la rue " s'approvisionnent. Ils
affirment que Pharmacam, Laborex, UC Pharm , ces structures bien implantées
sont leurs sources officielles de ravitaillement. Les vendeurs de
médicaments, sans être inquiétés outre mesure, ont des entrées dans ces
structures. " Les médicaments viennent de la Cename (Centrale nationale
d'approvisionnement en consommables et médicaments essentiels). Il nous
arrive aussi de solliciter les laboratoires indiens. Mais la plupart du
temps, ces médicaments sont d'origine européenne. " Ils sont vendus ici, et
même auprès des pharmacies classiques ", lance un vendeur rencontré au
marché central de Yaoundé. Derrière lui, son comptoir, fait de cartons et de
contreplaqué est rempli de médicaments et de molécules diverses. Ceux-ci,
exposés à l'air libre, sous un parasoleil sont tout simplement conservés
dans des sacs de plastique transparent. " On paie légalement dans ces
structures ", dit-il, alors qu'un attroupement a commencé à se former devant
lui. Les collègues de notre interlocuteur se fendent un moment en
récriminations avant de se raviser, et d'expliquer de vive voix : " On a
même surtout nos frères qui voyagent à l'étranger, c'est eux qui nous
facilitent la livraison de la majorité de nos médicaments. "
L'approvisionnement en médicaments chez les acteurs du secteur informel se
fait ainsi par diverses sources, sans aucun contrôle. Plusieurs d'entre eux
ont des facilités. Ce qui crée une concurrence rude avec les pharmacies
classiques. " Il y a parfois, des infirmières, et des responsables des
centres de santé qui viennent solliciter nos médicaments ", reconnaît
Mérimée Simo, alias " Docteur Z ". Pourtant, officiellement, le médicament
est dangereux pour la santé. Mais les vendeurs sont presque unanimes : "
Nous avons les mêmes médicaments que les pharmacies. Par exemple les
génériques, mais ce sont les conditions de conservation qui sont précaires,
et ça ne nous sert pas beaucoup. " Il ajoute : " Nous demandons au
gouvernement de construire des hangars où nous pourrons conserver nos
médicaments, car une bonne partie de la population désoeuvrée vient se
ravitailler ici ". Des mesures répressives sont promises par les autorités
du ministère de la Santé publique dans le cadre de la campagne de lutte
contre le médicament illicite. En attendant, les principaux acteurs, qui ont
les nerfs à vif, évoquent des motifs économiques et sociaux pour justifier
leur activité. Au prix de la santé ?