Ce qu'il faut savoir sur le chikungunya
L'Express (Port Louis-Maurice)
4 Février 2006
Publié sur le web le 6 Février 2006
Raj JUGERNAUTH
Port Louis
http://fr.allafrica.com/stories/200602060428.html
Le moustique Aedes Albopictus n'est actif que durant le jour.
Les 15 cas de Chikungunya enregistrés à Maurice poussent aujourd'hui à la
prudence. éviter l'éclatement d'une épidémie consiste surtout et avant tout
à connaître le mode de propagation de la maladie et l'élimination de son
vecteur, le moustique Aedes Albopictus, et ses foyers.
Le moustique vecteur de la maladie Chikungunya a déjà contaminé 50 000
personnes à l'île de la Réunion. Une quinzaine de cas avérés a déjà été
répertoriée à Maurice, principalement auprès des Mauriciens qui ont visité
l'île soeur. Il n'existerait aucun remède ou vaccin contre cette maladie.
Du coup les Mauriciens s'interrogent sur cette maladie invalidante, ses
modes de transmission et la façon de se protéger principalement contre les
moustiques du genre Aedes (moustique diurne).
Les autorités sanitaires de Maurice sont sur le pied de guerre pour empêcher
que les cas isolés ne donnent lieu à des foyers de la maladie. La
pulvérisation de produits insecticides dans les localités où habitent ceux
qui ont été contaminés est systématique.
C'est en effet en éliminant le vecteur de la maladie, le moustique Aedes
Albopictus, qu'on arrive à prévenir la propagation du Chikungunya.
Dès la semaine dernière, la doctoresse Ameeta Pathack, responsable du
contrôle des maladies transmissibles, évoquait les principales
caractéristiques de ce moustique et prodiguait des conseils pour s'en
protéger.
Un rayon d'action d'environ 50 mètres
«C'est après avoir piqué une personne infectée qu'un moustique du type Aedes
Albopictus, moustique tacheté de blanc,devient porteur du virus du
Chikungunya. Il va transmettre ce virus à toutes les autres personnes qu'il
va ensuite piquer», explique Ameeta Pathack. Ainsi, pour éliminer la
maladie, il faut combattre la prolifération du moustique notamment à travers
la destruction de ses gîtes larvaires potentiels. On retrouve les larves de
l'Aedes Albopictus dans les eaux stagnantes, notamment dans celles
accumulées sur les toits des maisons après les pluies ou dans les flaques
d'eau accumulées dans les cours, dans les pneus, et même dans les soucoupes
de pots de fleurs, les vases ou les seaux. Ce moustique affectionne les
petites surfaces d'eau et on ne le retrouve rarement dans les grandes
piscines, les rivières ou les lacs. La période d'incubation des larves est
de quatre à sept jours.
Cependant, ce moustique n'a un rayon d'action que d'environ 50 mètres
seulement et bien nettoyer son environnement proche constitue déjà une bonne
protection.
Depuis l'éclatement de l'épidémie à la Réunion, on s'est rendu compte que
l'utilisation des insecticides ou répulsifs sur les vêtements ou la peau
s'avère être une protection efficace. Pour les nouveau-nés et nourrissons de
moins de trois mois, ces produits sont proscrits.
Les autorités réunionnaises, devant l'ampleur de l'épidémie, conseillent de
traiter à l'aide d'insecticides les rideaux de portes, voilages, fenêtres et
séparations intérieures, et d'utiliser des moustiquaires, en complément de
plaquettes ou tortillons fumigènes.
Branle-bas de combat
15 cas avérés à Maurice depuis janvier jusqu'à hier. 15 cas avérés de
Chikungunya ont été répertoriés par le ministère de la Santé. L'attachée de
presse de ce ministère précise que ce sont des cas isolés, éparpillés à
travers l'île et qu'il n'y a pas d'épidémie de la maladie dans l'île. La
plupart des personnes contaminées sont des Mauriciens qui ont effectué des
séjours à la Réunion et les localités où ils habitent ont été traitées. En
sus de l'épandage des produits insecticides, les équipes du ministère de la
Santé se sont attelées à la tâche d'éliminer toute flaque d'eau stagnante
dans ces endroits. Ces équipes ont été renforcées par une cinquantaine
d'hommes venant de divers ministères.
Par ailleurs, le ministère a loué des équipements supplémentaires d'épandage
d'une compagnie privée pour parer à toute éventualité en attendant l'arrivée
d'équipements commandés récemment. Un comité interministériel comprenant le
s ministres Rashid Beebeejaun, Anil Bachoo, Xavier Duval et Satish Faugoo a
par ailleurs pris la décision de modifier la législation sanitaire pour
rendre obligatoire aux médecins privés la notification au ministère de tout
cas suspect de Chikungunya. De fait, l'équipe d'épandage n'attend pas les
résultats des analyses et entre en action dès qu'un cas de Chikungunya est
suspecté.
Les symtômes de la maladie
Le Chikungunya se manifeste par une fièvre élevée, des douleurs articulaires
intenses touchant principalement les extrémités des membres (poignets,
chevilles, phalanges), oedèmes, maux de tête et éruptions cutanées
notamment.
Le Chikungunya peut évoluer rapidement dans les deux sens, vers le meilleur
ou le pire.
Certains malades ont une bonne réponse à la prise d'anti-inflammatoires non
stéroïdiens. Mais ils peuvent aussi évoluer vers une phase chronique marquée
par des douleurs articulaires persistantes et incapacitantes qui peuvent
durer jusqu'à un an.
Toutefois, aucun décès directement lié au virus n'a été signalé. Ceux qui en
sont morts, avaient d'autres pathologies qui se sont associées au
Chikungunya.
Le vaccin mystère
Pas de remède. Le Chikungunya est considéré comme une maladie des pays
pauvres. Ainsi, aucun laboratoire n'a été intéressé à investir dans la
recherche d'un remède ou vaccin contre cette maladie.
Cependant, une rumeur tenace court en ce moment à la Réunion où l'on estime
qu'un vaccin existe bel et bien contre le Chikungunya. Le président du
conseil régional, Paul Vergès, a écrit la semaine dernière au Premier
ministre français, Dominique de Villepin, pour signaler qu'il aurait appris
de sources scientifiques l'existence d'«un vaccin expérimenté par l'armée
américaine mais qui ne serait pas commercialisé». Dans une publication
signée par des chercheurs de la faculté de médecine de l'université du
Maryland (états-Unis) et publiée en 2000 dans l'«American Journal of
Tropical Medicine and Hygiene», est décrite une étude clinique portant sur
73 personnes non contaminées sur lesquelles a été testé un vaccin contre le
chikungunya.
Des résultats prometteurs auraient été obtenus : peu d'effets secondaires et
une réaction positive sur la quasi-totalité des patients. Derrière la rumeur
se trouve aussi une publication sur Internet des tests du vaccin. Robert
Edelman, professeur de médecine à l'université du Maryland et auteur de la
publication estime que c'est un bon vaccin mais qu'il faudrait encore des
études cliniques avec un nombre plus important de patients, avec des essais
en situation d'épidémie sur une longue période avant que le vaccin ne puisse
être mis sur le marché dans encore environ deux ans.