Déclaration de Yolse sur le Covid-19.
Carouge, le 25 mars 2020.
Nous sommes très préoccupés par la capacité des systèmes de santé des pays africains à prendre en charge les cas de coronavirus. La plupart des pays ont des structures sanitaires vétustes, les hôpitaux manquent de ventilateurs, de lits en réanimation et de matériel de protection pour le personnel médical.
On ne peut pas lutter sans armes ni munitions.
Aujourd’hui, très peu de pays africains sont en mesure de produire le matériel de protection de base ou même fabriquer les génériques des outils de diagnostic, les futurs traitements et vaccins. Cette pandémie inattendue nous atteint dans notre humanité, provoque une crise sanitaire et une crise économique sans précédent. Toutefois, elle doit servir de piqûre de rappel aux autorités africaines de ne pas compter sur les autres pour répondre aux besoins essentiels de santé de leur population. Avec la crise sanitaire du coronavirus, les pays qui fournissaient à l’Afrique en produits médicaux mettent désormais la priorité sur les besoins de leur population avant de les exporter. Cependant, nous appelons à une solidarité internationale coordonnée pour venir en aide aux pays les plus vulnérables. Toutefois l’aide doit s’opérer en concertation avec les ministères de la santé et les comités nationaux de gestion du coronavirus.
Nous appelons les organisations d’aide au développement, les organisations des Nations Unies et les ONG à se coordonner dans la réponse au coronavirus. Le désastre sanitaire causé par la maladie ne doit pas empêcher des interventions de qualité, efficaces avec un impact certain et mesurable.
L’aide aux pays vulnérables ne doit pas se limiter uniquement aux traitements, vaccins et outils de diagnostic. En plus de répondre immédiatement à l’urgence sanitaire, il faut également soutenir la création d’infrastructures de santé durables et promouvoir la production locale des produits médicaux essentiels en Afrique sub-saharienne.
Nous appelons les pays africains à prendre leur responsabilité dans le cadre de la mise en œuvre des flexibilités de l’Accord ADPIC. Malgré la réaffirmation de la Déclaration de Doha sur l’Accord ADPIC et la Santé Publique, des droits des Etats membres de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à utiliser pleinement les flexibilités de l’Accord ADPIC pour permettre l’accès à des produits de santé abordables. La majorité des Etats africains membres de l’OMC n’ont pas encore pris des mesures nationales. En déficit de capacité de production locale, les pays africains feront non seulement face aux prix élevés mais également à une pénurie des nouveaux traitements et vaccins du Covid-19 puisque les pays producteurs sont également confrontés à la pandémie et privilégient exclusivement la réponse aux besoins de leur population.
Dans ce contexte de pandémie dévastatrice, nous sommes consternés de constater que l’un des traitements (Remdesivir[1]) potentiel qui sera validé à travers les tests cliniques dans les prochains jours pour traiter le coronavirus est déjà breveté par l’Organisation Africaine de la Propriété intellectuelle (OAPI) alors que treize (13) de ses Etats membres sont des pays les moins avancés et de ce fait, exemptés de la protection des brevets sur les produits pharmaceutiques.
Ainsi, nous demandons aux Etats membres de l’OAPI de prendre immédiatement des mesures nationales non seulement pour mettre en œuvre la période transitoire sur les produits pharmaceutiques en faveur des PMA mais également les autres flexibilités de l’Accord ADPIC pour les non PMA comme la licence obligatoire ou la licence publique non commerciale afin d’éviter que les brevets pharmaceutiques soient un obstacle à l’accès aux futurs traitements et vaccins du Covid-19.
Par ailleurs, nous appelons les entreprises pharmaceutiques à faire preuve d’humanité et rendre accessible tous les nouveaux traitements et vaccins à toutes les populations quel que soit leur pouvoir d’achats pour sauver des vies car comme le disait Louis Pasteur, la science n’a pas de patrie, parce que le savoir est le patrimoine de l’humanité, le flambeau qui éclaire le monde[2].
Yolse, Santé Publique & Innovation
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