[e-med] interview de Peter Piot (ONUSIDA) sur RFI : Fonds Mondial Sida

E-MED: interview de Peter Piot (ONUSIDA) sur RFI : Fonds Mondial Sida
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interview de Peter Piot (ONUSIDA) sur RFI : Fonds Mondial Sida

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http://www.radiofranceinternationale.fr/special.asp?m1=1&m2=1&SurTitre='Sida
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Sida
�On n'a jamais donn� autant d'argent�
Alors que le Fonds global d'action contre le sida, la tuberculose et le
paludisme se r�unit pour la premi�re fois � Gen�ve, Peter Piot, directeur
ex�cutif d'Onusida, Programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA, fait
le point sur l��pid�mie qui ravage l�Afrique. Acc�s aux traitements,
engagement des autorit�s politiques et religieuses, financements de
programmes sont autant de questions sur lesquelles des progr�s ont �t�
r�alis�s. M�me si sur le terrain, le fl�au progresse toujours et tue de plus
en plus.
RFI : Quelle somme a �t� r�colt�e par le Fonds mondial contre le sida ?
Qu'allez-vous faire de l'argent ?

PP : Les 700 millions de dollars dont le Fonds dispose pour cette ann�e sont
tr�s loin des besoins des pays pauvres. Mais il faut quand m�me dire que
jusqu�ici on n�a jamais donn� autant d�argent pour le sida ou pour un
probl�me de sant�. C�est notre responsabilit� de faire en sorte que ces
fonds arrivent l� o� ils feront la diff�rence. C�est �a le grand d�fi.
Au-del� du d�bat sur le pourcentage des ressources qui doit aller aux
traitements, il y en a un autre sur la r�partition des fonds entre le sida,
le paludisme, et la tuberculose. Nous ne sommes pas d�accord pour que chaque
maladie ait un tiers. Cela n�est pas justifi� par les besoins objectifs, ni
la capacit� d�absorption qui est �norme en ce qui concerne la lutte contre
le sida avec notamment les associations. Notre action se situe au niveau de
l��valuation technique des programmes. Mais aussi au niveau de la
planification strat�gique, de l'aide aux pays pour pr�parer les programmes
qu�ils vont soumettre au Fonds, les �valuer, faire en sorte qu�il y ait des
m�canismes pour transf�rer les fonds de la capitale � l�endroit o� ils sont
n�cessaires. C�est l� que le b�t blesse.

RFI : A-t-on fait des progr�s dans l�acc�s aux m�dicaments en Afrique ?

PP : Il y a eu beaucoup de progr�s sur le plan de la r�duction du prix des
m�dicaments, de l�acceptation du traitement comme partie int�grante de la
lutte contre le sida. On a, par contre, fait des progr�s tr�s limit�s sur le
terrain. Dans les capitales, il y a dans chaque pays un centre o� l�on peut
aller, si on a l�argent, pour se faire traiter. De plus en plus
d�entreprises de pays d�Afrique australe (Afrique du Sud, Zimbabwe, Namibie,
Bostwana) paient le traitement de leurs salari�s. Il y a des progr�s mais
qui ne concernent que quelques milliers de personnes. Il y a donc maintenant
une double question � r�soudre. D�un c�t�, assurer le financement, qui doit
venir de l�ext�rieur pour les pays les plus pauvres d'Afrique. De l�autre,
investir dans les services de sant� en dehors des capitales.
Il y a aussi un pays o� nous sommes en train de mettre sur pied le
traitement par antir�troviraux � l��chelle nationale, c�est le Bostwana.
C�est un petit pays d�un million et demi d�habitants mais o� le taux de
contamination de la population est de 30 %. C�est un test important. Si �a
ne marche pas, ce sera une catastrophe pour les autres pays africains.

RFI: Vous insistez sur l'importance du leadership dans la lutte contre le
sida, quelle influence pouvez-vous avoir sur les chefs d'Etat africains pour
les inciter � agir ?

Peter Piot : Objectivement, je crois que nous avons pu influencer l�agenda
des leaders politiques en Afrique et ailleurs. C��tait mon objectif majeur
lorsque l�on a commenc� avec Onusida, il y a six ans : mettre le sida au
centre des pr�occupations, pousser tous les acteurs � s�engager. Les budgets
nationaux en d�pendent, l�action internationale aussi. C�est d�autant plus
important dans des soci�t�s o� l�autorit� du chef joue un r�le, notamment
pour la lutte contre la stigmatisation. Nous avons repositionn� le sida
comme un probl�me qui va avoir un impact sur le d�veloppement social et
�conomique, c�est ce qui int�resse les politiciens. Et deuxi�mement, comme
un probl�me de s�curit�. Il y a deux ans, il y a eu le d�bat sur le sida au
conseil de s�curit� des Nations unies. Cela a eu un impact sur la prise de
conscience des chefs d�Etat et de gouvernement. Je l�ai constat� quand je
les ai rencontr�s ensuite. Nous avons essay� de documenter ce que le sida
repr�sente pour le d�veloppement, la d�mographie, de parler le langage des
gens auxquels nous nous adressions et d�utiliser des arguments auxquels ils
�taient sensibles. C�est l�un des grands succ�s d�Onusida. Mais nous
n��tions pas seuls, il y avait la soci�t� civile, Kofi Annan depuis un an et
demi, le pr�sident Clinton...

RFI : Avez-vous eu des r�sultats en Afrique, y a-t-il des bons et des
mauvais �l�ves sur le continent ?

PP : La r�sistance pour s�occuper du sida a compl�tement disparu au niveau
des chefs d'Etat. Il y a deux ans, je vous aurais r�pondu diff�remment.
Aujourd�hui, leurs discours sont clairs. D'ailleurs, � la session
extraordinaire de l�Assembl�e g�n�rale de l�ONU sur le sida, il y avait plus
d�une vingtaine de chefs d�Etat africains pr�sents. Il y a certainement
encore des probl�mes mais ils se situent maintenant au niveau de la mise en
�uvre, ce qui est bien s�r le plus important. Mais il faut d�abord que les
mots sortent. Des commissions nationales se mettent en place, souvent
dirig�es par le pr�sident lui-m�me ou le premier ministre. Des budgets sont
lib�r�s. Maintenant, on est donc dans la lenteur administrative et dans un
probl�me de capacit� humaine. Mais m�me en Afrique de l�Ouest, qui �tait un
peu en retard, cela se passe bien. La r�ticence n�est plus au niveau des
chefs d�Etat. C�est plut�t au niveau des cadres moyens qu'il y a un grand
travail � faire.

RFI : Que pensez-vous de la position du pr�sident sud-africain, Thabo Mbeki,
sur le sida ?

PP : Le pr�sident sud-africain exprime des opinions douteuses sur le
traitement du sida m�me si quant � l�importance de la maladie, il est tr�s
clair. Dans son allocution du nouvel an, il a affirm� que le sida faisait
partie, avec la violence et la pauvret�, des trois grands d�fis auxquels la
soci�t� sud-africaine devait faire face. Le probl�me est au niveau de
l�acc�s aux traitements et de la transmission m�re-enfant qui doivent faire
partie de n�importe quel programme de lutte contre le sida. Je suis
conscient qu�il est impossible pour le gouvernement sud-africain d�offrir un
traitement gratuit � tous les citoyens qui en ont besoin mais, au moins, que
l�on commence � faire des progr�s.
Mais d�un autre c�t�, l�Afrique du Sud va bient�t avoir des r�sultats dans
les programmes de pr�vention. Dans la tranche d��ge des moins de vingt ans,
on voit une stabilisation et une baisse des infections. La Love life
campaign, engag�e depuis deux ans, est un tr�s bon programme de pr�vention,
probablement l�un des meilleurs. Il est tr�s agressif, il utilise le
marketing. Ils ont un budget qui d�passe les 100 millions de dollars. Il y a
donc d�un c�t� ce que dit Thabo Mbeki, de l�autre ce qui se passe sur le
terrain.

RFI : Les leaders religieux ne sont-ils pas trop r�ticents � s�engager dans
la lutte contre le sida ?

PP : Il y a, en effet, des probl�mes. Au Kenya, par exemple, il y a une
coalition entre l�Eglise catholique et des groupes islamiques contre la
promotion du pr�servatif. Par contre, en Ouganda, le pr�sident de la
commission nationale contre le sida est un �v�que catholique. Sur le
terrain, on trouve autant si ce n�est plus de pr�servatifs dans les h�pitaux
catholiques que dans ceux de l�Etat. C�est lorsque l�on monte dans la
hi�rarchie que les probl�mes commencent. Il y a cinq ans, je voyais toutes
les religions comme un grand obstacle dans la lutte contre le sida.
Maintenant, j�ai renvers� ce raisonnement et je dis qu�elles doivent devenir
des alli�s puissants. Quand je vais dans un pays, rendre visite au leader
religieux local fait partie de mon programme standard. Ce n�est dans
l�int�r�t d�aucune religion que ses fid�les meurent du sida.

PROPOS RECUEILLIS PAR VAL�RIE GAS
28/01/2002

[Post� par JM Milleliri]

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