La Chine étaie ses accusations de corruption contre GlaxoSmithKline
LE MONDE | 12.07.2013 à 11h39 Mis à jour le 12.07.2013 à 16h04
Par Harold Thibault <http://www.lemonde.fr/journaliste/harold-thibault/>
http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/07/12/pekin-etaie-ses-accusatio
ns-de-corruption-contre-glaxosmithkline_3446808_3234.html
Shanghaï, correspondance. GlaxoSmithKline (GSK) vit des jours difficiles
enChine <http://www.lemonde.fr/chine/>\. Le ministère de la sécurité
publique a détaillé, jeudi 11 juillet, les accusations de corruption qui
pèsent contre le groupe pharmaceutique britannique.
Dans un communiqué publié sur son site Internet, cet équivalent d'un
ministère de l'intérieur dit suspecter certains des cadres de GSK d'avoir
employé pots-de-vin, voyages tous frais payés et "autres formes de
sponsorship" pour corrompre du gouvernement, associations industrielles,
hôpitaux et docteurs. Il accuse également l'entreprise d'avoir eu recours
à de fausses factures pour couvrir ces pratiques illégales. La police
chinoise confirme enquêter à Shanghaï, Changsha (Hunan) ou encore
Zhengzhou (Henan) et précise que les activités incriminées ont eu cours
"sur une durée prolongée" et que les "preuves existantes sont amples". Et,
si l'enquête se poursuit toujours, précise la sécurité publique, "des
suspects ont confessé leurs crimes".
EXIGENCES D'ÉTHIQUE
Des accusations que conteste GSK. Dans un communiqué, publié jeudi 11
juillet au soir, le troisième groupe pharmaceutique mondial de par son
chiffre d'affaires (32,51 milliards d'euros en 2012) dit surveiller ses
opérations pour s'assurer qu'elles répondent à ses strictes exigences
d'éthique, "ce qu' fait en Chine, sans trouver de preuve de prévarication
ou de corruption de docteurs ou d'officiels gouvernementaux", écrit un
porte-parole. "Toutefois, si les preuves de telles activités sont
fournies, nous agirons bien évidemment au plus vite", ajoute-t-il.
L'entreprise refuse de détailler le nombre de ses cadres placés en
détention ou de donner leurs noms et nationalités et précise n'avoir pas
beaucoup plus d'informations sur l'affaire que le grand public. "C'est la
première communication officielle qui a été publiée par le bureau de la
sécurité publique en relation avec la nature précise de son enquête", dit
le groupe.
A Londres, le Foreign Office dit exercer son assistance consulaire auprès
d'un ressortissant britannique en Chine. Le Monde a pu confirmer que GSK
a choisi le cabinet d'avocats chinois Junhe pour se défendre, mais ses
associés se refusent pour l'heure à tout commentaire. Selon le Daily
Telegraph de Londres, au moins 30 employés, dont cinq ou six hauts
responsables, sont assignés à résidence et sous surveillance permanente.
Parmi eux se trouverait le responsable juridique du groupe en Chine.
AUTRE ENQUÊTE INTERNE
Le Wall Street Journal révélait en juin qu'un donneur d'alerte avait porté
à la connaissance de la direction de GSK des faits présumés de corruption
s'étalant de 2004 à 2010. Selon cette source anonyme, les commerciaux de
l'entreprise en Chine auraient payé nombre de médecins pour qu'ils
prescrivent des produits de la marque, en faisant passer ces dépenses pour
des participations aux frais afférents à des conférences et en employant
de fausses factures pour la comptabilité.
Une note distribuée au sein de l'entreprise au mois de novembre 2010
interdisait à l'avenir aux commerciaux de couvrir les "frais" des docteurs
directement en liquide. L'entreprise a confirmé l'existence de cette note
ainsi que le licenciement d'une vingtaine de commerciaux en Chine à cette
même période, mais précisé que ces dépenses ne visaient nullement à
inciter le personnel médical à prescrire ses produits.
Lundi 8, GSK confirmait par ailleurs une autre enquête interne, sur les
accusations du même donneur d'alerte, selon lequel les commerciaux de
l'entreprise auraient plus récemment versé de l'argent liquide à des
médecins afin qu'ils promeuvent son Botox.
LA CORRUPTION, CHOSE COURANTE
La Chine ne représente que 3 % du chiffre d'affaires de GSK, mais ce
marché pharmaceutique se développe rapidement et promet de prendre au
cours des prochaines années le deuxième rang mondial, aujourd'hui occupé
par le Japon.
La corruption est chose courante dans le secteur de la santé en Chine. Les
docteurs sont mal payés par rapport à leur niveau d'études et à la hausse
du coût de la vie, tandis que les hôpitaux, faute de financements publics
adéquats, trouvent une source de revenus grâce aux marges réalisées sur la
vente de médicaments.
Le terme "hongbao", littéralement "enveloppes rouges", celles qui incluent
généralement les donations au sein de la famille lors du nouvel an
lunaire, est fréquemment employé pour décrire un système de corruption
omniprésent dans la distribution, et notamment dans celle des produits de
santé.