(Il sera question lors de cette importante réunion de la couverture santé pour tous.CB)
Les nouveaux objectifs mondiaux pour le développement
27/08/2013 | Jeffrey D. Sachs
<http://lecercle.lesechos.fr/221130489/jeffrey_d._sachs>
http://lecercle.lesechos.fr/economistes-project-syndicate/jeffrey-sachs/221
178720/nouveaux-objectifs-mondiaux-developpement
Les différents gouvernements de la planète se réuniront le 25 septembre
lors d¹une session spéciale de l¹Assemblée générale des Nations Unies,
afin de discuter de la manière d¹accélérer le processus visant à atteindre
les Objectifs du millénaire pour le développement, ainsi que de s¹entendre
sur le calendrier d¹un nouvel ensemble d¹Objectifs pour le développement
durable.ÉCRIT PAR
Adoptés en 2000, les Objectifs du millénaire pour le développement
<http://www.un.org/millenniumgoals/>arriveront à échéance en 2015, et
devraient laisser place aux Objectifs pour le développement durable (ODD).
Leur objectif est de mettre un terme à la pauvreté extrême, aux famines et
aux maladies évitables. Il s'avère qu'ils constituent les objectifs de
développement mondial les plus importants dans toute l¹histoire de l¹ONU.
Les ODD ont pour vocation de poursuivre ce combat en s¹attachant toutefois
à promouvoir désormais une croissance économique plus équitable ainsi
qu¹un développement durable efficace.
Le fait d¹avoir fixé des objectifs internationaux pour le développement a
permis d¹améliorer considérablement la vie des individus, et notamment
dans les régions les plus pauvres du globe. L¹Afrique sub-saharienne a
immensément bénéficié des OMD. C¹est là une réussite dont il s¹agit de
s¹inspirer dans l¹élaboration des ODD. Pour illustrer l¹importance des OMD
en Afrique, il suffit de comparer la situation une décennie avant leur
adoption à celle que l¹on observe une décennie après. Auparavant, la
croissance économique de la région était au plus bas, le taux de pauvreté
élevé (et croissant) et le poids des maladies (VIH/SIDA et paludisme) de
plus en plus écrasant.
L¹adoption des OMD a permis de concentrer l¹attention des gouvernements
africains, des organisations non gouvernementales, agences de l¹ONU,
donateurs internationaux, fondations et autres militants sur l¹urgence du
combat contre la pauvreté, les famines et la maladie. Les OMD ont
également permis d¹aboutir à un processus d¹annulation de la dette,
conduit par le FMI et la Banque mondiale.
Entre 2000 et 2010, le taux de pauvreté en Afrique sub-saharienne
<http://povertydata.worldbank.org/poverty/region/SSA> (mesuré selon la
proportion d¹individus vivant avec moins d¹1,25 $ par jour) est tombé à
48,5%, après avoir augmenté de 56,5% à 58% sur la période 1990-1999,
tandis que la croissance économique annuelle a plus que doublé, atteignant
5,7% pour 2000-2010.
Des progrès considérables ont également été accomplis dans le contrôle des
maladies. Entre 1990 et 2004, le nombre annuel de décès liés au paludisme
a augmenté d¹environ 800 000 à 1,6 million. Par la suite, grâce à la
distribution massive de moustiquaires anti-paludisme, le nombre de décès
liés à cette maladie a commencé à décliner, pour redescendre à environ 1,1
million de décès annuels en 2010.
De même, en l¹an 2000, il n¹existait encore aucun programme donateur
officiel permettant aux Africains les plus pauvres de bénéficier de
traitements antirétroviraux contre le SIDA. En grande partie grâce à la
capacité de fixation de calendriers des OMD, des programmes de donation
pour la lutte contre le SIDA ont été mis en ¦uvre, plus de 6 millions
d¹Africains bénéficiant désormais de traitements antirétroviraux soutenus
par ces programmes officiels.
En tant que conseiller spécial auprès du Secrétaire général des Nations
Unies depuis 2001 sur la question des OMD, j¹ai pu constater le sérieux
avec lequel de nombreux gouvernements africains considéraient ces
objectifs, et y recouraient afin de fixer les priorités, de catalyser
l¹action des parties prenantes, et de responsabiliser leurs ministères. Au
fil du temps, les Nations Unies, ainsi que les organismes de donation des
États à haut revenu, ont de plus en plus tiré parti des OMD pour organiser
leurs propres initiatives en Afrique. Bien que les OMD n¹expliquent pas à
eux seuls les avancées constatées depuis 2000, ils y ont contribué de
façon considérable.
Certes, il reste encore beaucoup à accomplir. Aspect particulièrement
important, des progrès supplémentaires significatifs pourraient être
atteints en matière de santé au moyen de ressources financières adéquates.
Il est nécessaire que les pays donateurs renouvellent généreusement les
fonds qu¹ils attribueront cette année auFonds mondial de lutte contre le
SIDA, la tuberculose et le paludisme <http://www.theglobalfund.org/en/>\.
Dans l¹élaboration des prochains objectifs mondiaux pour le développement,
il est important que les États membres de l¹ONU tirent tous les
enseignements des OMD. Tout d¹abord, le fait de formuler une liste d¹ODD
relativement courte dix tout au plus contribuerait à marquer plus
efficacement les mentalités, un aspect essentiel à la mobilisation du
public.
Deuxièmement, il est nécessaire que l¹ensemble des gouvernements soient
tenus responsables du respect des ODD en tant qu¹exécutants. Il serait
judicieux que les ODD s¹appliquent à tous les États en tant qu¹exécutants,
les pays riches demeurant donateurs. En effet, s¹agissant de
problématiques telles que le changement climatique, les pays riches ont
bien davantage de travail à accomplir que les États les plus pauvres.
Troisièmement, il est important que les ODD soient bâtis sur la base des
OMD. Ces OMD ont contribué à réduire de plus de moitié la misère dans le
monde. Il s¹agirait pour les ODD de mettre un terme à la pauvreté extrême
pour de bon. La Banque mondiale s¹est d¹ores et déjà engagée en faveur
d¹une disparition de la pauvreté extrême d¹ici 2030. Il serait bon que les
États membres de l¹ONU en fassent de même.
Enfin, il est nécessaire que les ODD mobilisent les groupes d¹experts
autour des problématiques clés du développement durable. Le Projet de
l¹ONU pour le Millénaire <http://www.unmillenniumproject.org/> a
synthétisé les avis de quelque 250 experts mondiaux sur des questions clés
de développement. Un processus similaire doit être engagé sur des
problématiques telles que les énergies à faible empreinte carbone,
l¹agriculture durable, la résilience des villes, ou la couverture santé
pour tous, qui figureront probablement toutes sur la liste des ODD.
Pour reprendre le discours formulé il y a un demi-siècle par le président
John F. Kennedy, « En définissant notre objectif plus précisément, en le
rendant plus raisonnable et plus accessible, nous pouvons permettre à tous
les peuples de le percevoir, d¹en tirer une source d¹espoir, et de se
diriger irrésistiblement vers lui. » Les OMD ont contribué à jouer ce rôle
dans la lutte contre la pauvreté. Il appartient désormais aux ODD d¹en
faire de même face au défi complexe du développement durable.
Traduit de l¹anglais par Martin Morel