Bonjour à tous,
Les 22 délégations réunies lors de l’Assemblée générale de la Conférence Internationale des Ordres de Pharmaciens Francophones (CIOPF) ont adopté, le 17 novembre 2015, une déclaration forte sur les ruptures d’approvisionnement. Les ordres appellent les autorités à agir contre ce problème mondial et à adopter des mesures visant à anticiper et gérer au mieux les pénuries. Des préconisations très concrètes et adaptées à la situation particulière des pays francophones notamment du Sud sont formulées.
Ci-dessous le texte de la déclaration
Bien à vous
Olivier ANDRIOLLO
Secrétaire
Conférence Internationale des Ordres de Pharmaciens francophones
Conférence Internationale des Ordres de Pharmaciens francophones
RUPTURES d’APPROVISIONNEMENT de produits de santé
DECLARATION DES ORDRES DES PHARMACIENS
DES PAYS FRANCOPHONES
Considérant que les ruptures d’approvisionnement de produits de santé constituent un problème mondial en croissance ;
Considérant que les ruptures d’approvisionnement ont des conséquences lourdes pour les patients en termes d’accès au médicament et de continuité des traitements engagés, une rupture pouvant également entraîner le report d’une intervention chirurgicale, faire apparaître des complications liées à la thérapie alternative ou contraindre les professionnels de santé à « prioriser » les patients, posant ainsi à la fois des problèmes cliniques, éthiques et économiques ;
Considérant que les ruptures d’approvisionnement peuvent mettre en péril les objectifs internationaux de santé publique et contribuer, par la mauvaise observance, à accroitre la résistance aux antimicrobiens ;
Considérant que les ruptures d’approvisionnement se présentent différemment dans les diverses régions du monde, avec une acuité particulière dans certains pays ;
Considérant que les actions bénéfiques menées par les pays du Nord pour lutter contre les ruptures d’approvisionnement peuvent parfois aggraver la situation dans les pays du Sud en limitant par exemple les exportations de produits de santé ;
Considérant que les ruptures d’approvisionnement peuvent nourrir le fléau des médicaments falsifiés par l’introduction de médicaments falsifiés en remplacement des médicaments manquants et par la tentation de patients de s’approvisionner sur le marché illicite ;
Considérant que les ruptures d’approvisionnement de médicaments entrant dans les programmes de santé publique financés par des organismes donnateurs ont des conséquences importantes, les alternatives thérapeutiques étant limitées ;
Les membres de la CIOPF, réunis en Assemblée générale le 17 novembre 2015 à Paris, dénonçant les risques pour les patients des ruptures d’approvisionnement de produits de santé, appellent les autorités à adopter un(des) plan(s) d’action nationa(ux) et préconisent les pistes d’action suivantes :
anticiper au mieux les ruptures dapprovisionnement:
- Etablir des plans de gestion des pénuries pour des produits considérés à risque, dont la liste, régulièrement mise à jour, serait fondée sur des critères tels que la vulnérabilité des approvisionnements, la complexité de la production et le nombre de sites de production des matières premières et produits finis, l’intérêt thérapeutique et la disponibilité de traitements de substitution
- Favoriser les procédures de reconnaissance mutuelle régionales et/ou sous-régionales des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments
- Imposer aux établissements pharmaceutiques en charge de l’exploitation des AMM d’informer les autorités de façon anticipée d’une rupture potentielle d’approvisionnement en précisant les délais de survenue, les stocks disponibles, les modalités de disponibilité et les délais prévisionnels de remise à disposition ainsi que, le cas échéant, l’identification de la spécialité pharmaceutique pouvant se substituer à la spécialité en défaut
- Imposer aux établissements pharmaceutiques en charge de l’exploitation des AMM un préavis d’un an lorsque ceux-ci veulent mettre fin volontairement à la commercialisation d’un médicament
- Travailler à la mise en place de stocks de sécurité pour les produits reconnus comme « à risque » (cf. liste évoquée au premier point), en liaison avec les établissements pharmaceutiques en charge de l’exploitation des AMM
- Renforcer le système d’assurance qualité des centrales d’achat de produits de santé conformément au référentiel MQAS (système modèle d’assurance de la qualité pour les agences d’approvisionnement) de l’OMS
Gérer au mieux les situations de pénurie et en minimiser l’impact :
- Imposer aux distributeurs en gros d’informer les exploitants de toute rupture d’approvisionnement sur un médicament dont ils assurent l’achat et le stockage
- Mettre en place une cellule d’alerte entre les différents partenaires (les autorités compétentes de l’Etat, les pharmaciens de l’ensemble des métiers) afin :
o de créer des systèmes de remontée d’informations permettant de savoir précisément quels sont les médicaments concernés, les niveaux de stock disponibles et le délai dans lequel les médicaments seront mis à disposition,
o de coordonner la gestion des ruptures d’approvisionnement et de transmettre aux acteurs concernés les informations utiles et les instructions à suivre lors de pénuries ;
o de mettre en œuvre au besoin les contingentements nécessaires au vu de la pénurie ;
- Autoriser la substitution par les pharmaciens dispensateurs de façon à leur permettre les alternatives thérapeutiques en cas de ruptures de stocks, comme prévu par les politiques pharmaceutiques nationales
- Mettre en place un processus décisionnel rapide afin de faciliter la mise à disposition exceptionnelle et urgente sur le territoire national de produits identiques susceptibles de remplacer les produits en rupture à partir d’autres pays du continent/de la région en coopération avec les établissements pharmaceutiques en charge de l’exploitation des AMM concernés
- Promouvoir la coopération public / privé
- Adapter les modalités d’obtention des visas de certains médicaments spécifiques pour rendre le marché plus attractif aux industriels tout en garantissant un même niveau de qualité et de sécurité
- Rendre les médicaments de programmes de santé publique distribués gratuitement également disponibles dans le secteur privé dans des conditions particulières
- Favoriser/permettre le fractionnement des attributions de marchés pour certains médicaments relevant de priorité de santé publique ou difficiles à acheter par manque de fabricants (et les procédures de gré à gré pour les médicaments essentiels de faible consommation)