[Un article publié dans le journal Libération, Paris, le 17 septembre. http://www.liberation.fr/page.php?Article=324364 ]
Des spécialistes des maladies tropicales réunis à Marseille défendent des alternatives aux comprimés.
L'infusion de plantes, arme contre le paludisme
Par Denis DELBECQ
samedi 17 septembre 2005
Pendant qu'à New York, au sommet de l'ONU, les discussions piétinent sur les objectifs du millénaire (visant à éradiquer la pauvreté dans le monde), plus de mille spécialistes des maladies tropicales se sont réunis cette semaine à Marseille, pour leur congrès mondial. Parmi eux, Ben Gilbert, un chimiste britannique de la fondation Oswaldo Cruz, a rappelé combien l'étude des plantes médicinales en laboratoire peut jouer un rôle contre de nombreuses maladies, notamment le paludisme. Connue en Chine depuis des millénaires, l'Artemisia annua est un antipaludéen très efficace, commercialisé depuis quelques années par les firmes pharmaceutiques sous forme de comprimés (Libération du 9 septembre). Selon Ben Gilbert, l'utilisation directe de la plante, sous forme d'infusion, permet d'obtenir les mêmes effets thérapeutiques que les comprimés, mais avec une teneur en artémisinine soixante fois plus faible. Sans doute parce que d'autres molécules présentes dans la plante, des flavonoïdes et des polyacétylènes, décuplent son action.
D'autres plantes seraient efficaces contre le palu. Ainsi, l'Ampelozizyphus. «Une première série de tests en labo n'avait rien donné, car on avait cherché à prouver une action contre la maladie elle-même. Mais l'armée brésilienne, qui utilise quotidiennement l'extrait des racines de cette plante pour protéger ses soldats en expédition dans la jungle, a insisté. Et on s'est rendu compte que cette "bière indienne" combat uniquement le parasite responsable de la maladie ! Il suffit d'en boire une fois tous les trois jours pour être à l'abri», rapporte Ben Gilbert. Une autre, l'Argemone mexicana, qui pousse comme une mauvaise herbe en Afrique et en Inde, constituerait aussi un remède bon marché contre le palu, selon le Britannique Merlin Willcox, qui a étudié son utilisation sous forme de décoction par un guérisseur traditionnel dans un village du Mali, avec des résultats très satisfaisants.
(avec AFP)