E-MED: Mondialisation du commerce des produits pharmaceutiques
Lettre ouverte � Stuart Nightingale, FDA Associate Commissioner,
de James Love, Consumer Project on Technology
Le 13 mai 1998,
Dr Stuart Nightingale
United Dtates Food and Drug Administration
Rockville, Maryland
via internet : SNIGHTIN@BANCTE.FDA.GOV
Dr Nightingale,
Je vous �cris, au titre que vous �tes un membre important de la d�l�gation
des Etats-Unis � l'Assembl�e Mondiale de la Sant�, pour discuter deux
points.
Premier point, j'ai compris que la d�l�gation des Etats-Unis a propos� une
modification substantielle de la r�solution propos�e � l'Assembl�e Mondiale
sur la strat�gie pharmaceutique r�vis�e. Les Etats-Unis cherchent �
�liminer
une disposition qui dit que "les int�r�ts de sant� publique plut�t que les
int�r�ts commerciaux ont la 'primaut�' dans les politiques pharmaceutiques
et de sant�." De plus, les Etats-Unis veulent changer la disposition
selon
laquelle les pays membres "examinent les alternatives possibles pour
l'application de l'Accord sur les aspects de la propri�t� intellectuelle
li�s au commerce (ADPIC) afin de sauvegarder l'acc�s aux m�dicaments
essentiels", pour une disposition tr�s diff�rente qui dit que les pays
devraient chercher � donner acc�s aux m�dicaments essentiels seulement 20
ans apr�s l'existence des brevets.
Avec ces changements, ainsi que d'autres que les Etats-Unis cherchent �
faire passer dans la r�solution, la strat�gie r�vis�e pour les m�dicaments
irait sur la t�te. Vous demandez que l'Assembl�e ent�rine la notion selon
laquelle les int�r�ts commerciaux sont a parit� avec les int�r�ts pour la
sant� publique. En plus, en demandant que les pays �vitent des politiques
qui prot�gent la sant� publique jusqu'� 20 ans apr�s le d�p�t des brevets,
vous voulez que l'Assembl�e ent�rine des positions encore plus favorables
aux int�r�ts commerciaux de l'industrie pharmaceutique que ceux ent�rin�s
par les n�gociateurs du GATT.
Comme citoyen am�rican, je suis effar� que l'administration Clinton cherche
� �tablir que dans des mati�res concernant le commerce et la sant�, les
consid�rations de sant� publique ne sont pas le souci premier. Je joins une
copie d'une lettre qui a �t� envoy�e le 12 mai 1998 � James McGlinchey du
Bureau de la Propri�t� Intellectuelle et de la Concurrence du D�partement
d'Etat, concernant cette r�solution. Comme la lettre l'indique, il y a de
nombreux points en d�bats concernant la sant� auxquels l'Organisation
Mondiale du Commerce (OMC) et autres orgabnisations du commerce seront
confront�s, avec des questions qui soul�vent des questions qui peuvent
�tre
consid�r�es autant comme des mati�res de commerce que de sant� publique. Il
est essentiel que les repr�sentants officiels de la sant� �tablissent et
disent que la sant� publique est num�ro un, a la priorit�, avant les
int�r�ts commerciaux, et que les droits de propri�t� intellectuelle doivent
�tre vus comme des moyens pour atteindre des fins de sant� publique, plut�t
que des fins en soi.
Personne ne propose que l'Assembl�e Mondiale de la Sant� ne souscrive �
l'�limination des droits de propri�t� intellectuelle, mais plut�t que les
pays mettent en oeuvre les accords ADPIC, et autres accords de commerce,
d'une fa�on qui favorise l'acc�s aux m�dicaments essentiels. Par exemple,
selon ADPIC, les pays peuvent utiliser les licences obligatoires de
technologies m�dicales essentielles pour �largir l'acc�s aux m�dicaments.
M�me la F�d�ration Internationale de l'Industrie Pharmaceutique (FIIM) peut
admettre que ADPIC fournit d�j� de nombreuses clauses de sauvegarde pour
les
int�r�ts commerciaux qui doivent �tre suivies dans l'�tablissement de
licences obligatoires. Vous proposez que les pays n'examinent m�me pas le
recours � des licences obligatoires pendant la dur�e de 20 ans des brevets.
L'utilisation de licences obligatoires serait particuli�rement importante
dans les domaines des biotechnologies, quand les entreprises revendiquent
des brevets tr�s larges. Je vous joins une copie d'un article du 7 mai 1998
du Gardian qui d�crit une demande de brevet faite par Human Genome Science
(HMS) sur "toute la s�quence g�n�tique" de la bact�rie qui cause la
m�ningite. Apparemment ces brevets (et d'autres semblables) sont si larges
qu'ils vont prendre le pas sur les inventions faites par d'autres
chercheurs
dans le traitement de la m�nigite (et d'autres maladies). Le Welcome Trust
trouve que la perspective de HGS ayant " le pouvoir d'emp�cher les gens de
d�velopper des vaccins et d'autres m�dicaments pr�ventifs pour des maladies
qui tuent" serait "un r�sultat �pouvantable". Un officiel de The Meningitis
Research Foundation dit que ce brevet donnerait � HGS le droit d'exiger des
redevances pour un vaccin que la Fondation d�veloppe, et demande "Est-ce
que ces entreprises prennent la responsabilit� que des gens meurent parce
que nous ne pouvons pas payer pour les vacciner ?"
Supposons, par exemple, qu'une entreprise obtienne des brevets qui
contr�leraient l'acc�s � des vaccins contre le SIDA, ou pour traiter le
paludisme, maladie qui tue 5 enfants africains sur cent. Supposons, en
outre
que cette entreprise soit guid�e par les m�mes consid�rations �thiques
qu'une entreprise comme Genzyme Inc. qui a �tabli le prix de Ceredase, une
invention financ�e par l'Etat, � plus de 500 000 US $ pour une ann�e de
traitement, ou comme Bristol-Myers-Squibb, qui �tablit le prix du Taxol,
m�dicament contre le cancer, autre invention financ�e par le NIH, � 20 fois
le co�t de production.
Est-ce vraiment la position de l'Administration Clinton que le monde entier
doive attendre 20 ans avant de commencer � s'assurer que les entreprises
n'abusent pas du droit des brevets et ne cr�ent pas de barri�res inutiles �
l'acc�s � des m�dicaments essentiels ? Cette position est extr�me, et elle
n'est pas de celles qui doivent �tre adopt�es par l'Assembl�e Mondiale de
la
Sant�.
De plus, on voit de plus en plus des strat�gies selon lesquelles les
entreprises utilisent les 20 ans de la p�riode initiale des brevets pour
construire des portefeuilles de brevets qui bloquent l'entr�e des
concurrents sur le march�, pendant longtemps apr�s l'expiration du brevet
intial. Avec les m�dicaments traditionnels, les firmes brevettent d'abords
des compos�s, ensuite les indications pour un usage et des m�thodes de
fabrication, et ensuite les doses et les r�gimes th�rapeutiques. Dans les
biotechnologies, il y a de nouveaux domaines pour �tablir des brevets
larges, comme ceux des s�quences de g�nes, qui peuvent permettre aux
firmes
de contr�ler des zones enti�res de la recherche m�dicale.
Second point : j'aimerais commenter l'information selon laquelle vous vous
�tes personnellement oppos� � la publication et � la distribution du
rapport
de l'OMS de novembre 1997 "Mondialisation et acc�s aux m�dicaments,
implications des accords OMC/ADPIC". La seule erreur de fait que je
reconnais dans ce rapport est regrettable, mais relativement sans
importance, c'est la d�finition d'un m�dicament contrefait. Je suis s�r que
vous �tes d'accord sur le fait que la controverse sur cette publication
concerne les recommandations et non les questions factuelles.
Les 7 et 8 mai, � Washington DC, au cours d'un Atelier sur la Propri�t�
Intellectuelle, la Sant� et les Accords Internationaux sur le Commerce,
auquel vous n'avez pas assist� [M. Nightingale �tait invit�. JD], il �tait
tout � fait clair que les officiels des pays en d�veloppement sont
d�sorient�s par les nombreux changements sur la r�glementation des brevets
et de la pharmacie qui doivent �tre promulgu�s pour respecter l'accord
ADPIC. La quantit� de d�sinformations qu'ils ont re�ues de la part de
juristes d'entreprises pharmaceutiques et de lobbyists, et d'officiels des
ambassades des Etats-Unis, est effrayante, et, comme on pouvait s'y
attendre, �tait biais�e en faveur des int�r�ts commerciaux des entreprises
pharmaceutiques. Par exemple il a �t� dit � l'Afrique du Sud que les
importations parall�les de m�dicaments violeraient les accords ADPIC et les
lois internationales, on a donn� � Chypre une copie de la loi Hatch-Haxman
o� il manquait la mesure "Bolar" portant sur les exceptions pour la
recherche m�dicale, on a dit au Guatemala que ce serait une violation des
mesures de l'accord ADPIC sur les marques si le pays adoptait les l�gles de
l'OMS sur la commercialisation de sustitut au lait maternel, et il y a eu
beaucoup d'informations fausses donn�es � de nombreux pays concernant
l'ADPIC et les politiques de promotion des m�dicaments g�n�riques.
La plupart des responsables de sant� publique ne sont pas des experts en
droit de la propri�t� intellectuelle. Ils ne devraient pas se reposer sur
les informations int�ress�es des entreprises pharmaceutiques. La
publication
de l'OMS sur ADPIC et le secteur le la sant� permet de r��quilibrer un peu
le d�bat dans les pays qui changent leurs lois sur les brevets, en r�ponse
aux pressions commerciales des Etat-Unis et de l'Union Europ�enne. C'est
une
simple question d'honnetet� que ces pays, la plupart tr�s pauvres, puissent
avoir acc�s aux informations de base sur les accords concernant le
commerce.
Les Etats-Unis ont de nombreux arguments irr�futables pour que l'on
consid�re les avantages de la protection intellectuelle dans le domaine de
la recherche pour la sant�. Nous ne devons pas utiliser l'ignorance et
l'intimidation pour atteindre des objectifs de politique �trang�re.
Finalement, vous devez consid�rer que votre isolement personnel vis � vis
des groupes de d�fense des consommateurs et de sant� publique, et vos
relations de travail �troites avec la FIIM et ses membres, a probablement
fauss� votre compr�hension de ces questions. Je vous encourage � rencontrer
les groupes de d�fense des consommateurs et de sant� publique pour �largir
le dialogue sur ces questions, et de mettre en place des contr�les internes
pour garantir que les responsables politiques am�ricains recoivent des
informations �quilibr�es en la mati�re.
Sinc�rement,
James Packard Love
Consumer Project onTechnology
PO Box 19387, Washington DC 20036
http://www.cptech.org
love@cptech.org
Traduction :
Jerome Dumoulin
Institut de Recherche Economique sur la Production et le Developpement
Universite Pierre Mendes France
BP 47
F-38040 GRENOBLE Cedex 09
tel 33 4 76 82 54 50
fax 33 4 76 82 59 89
http://www.upmf-grenoble.fr/irepd
(CB.)
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