[e-med] Paludisme : Sanofi réalise la synthèse de l'artémisine

Paludisme : Sanofi réalise la synthèse de l'artémisine
Par Marc Mennessier - le 14/09/2012
Le laboratoire pharmaceutique a reçu cette semaine le prix Pierre Potier de
la chimie « verte » pour la fabrication industrielle de l'artémisine, le
plus efficace des traitements antipaludéens.

http://sante.lefigaro.fr/actualite/2012/09/14/19053-paludisme-sanofi-realise
-synthese-lartemisine

Le monde manque d'artémisinine. Or les dérivés de cette substance sécrétée
par l'armoise (Artemisia annua), une plante originaire de Chine, fournissent
l'essentiel des traitements utilisés contre l'épidémie de paludisme
responsable de près d'un million de morts par an, principalement en Afrique
et en Asie du sud-est.

Pour le moment, l'essentiel de la production mondiale d'artémisinine (de 30
à 40 tonnes par an) provient de l'agricul­ture. Mais les aléas, en
particulier climatiques, menacent la stabilité des approvisionnements et
renchérissent les prix (avec des écarts allant de 1 à 4 ces dernières
années), alors que, dans le même temps, les besoins en traitements
antipaludéens ne cessent de croître.
Éradiquer le paludisme

«Si demain on veut éradiquer le paludisme, il faudra produire au moins 80
tonnes d'artémisinine par an», souligne Francis Carré, vice-président du
département chimie et biotechnologies de Sanofi. Le tout à des prix stables
et accessibles, sachant que la maladie frappe surtout les pays les plus
démunis de la planète. On en est loin…

Pour y parvenir, Sanofi a mis au point, avec le soutien de la Fondation Bill
et Melinda Gates, un procédé industriel de fabrication de l'artémisinine qui
a reçu cette semaine l'un des trophées du prix Pierre Potier «pour
l'innovation en chimie en faveur du développement durable».
Vendue à prix coûtant

Après huit ans de recherches, menées principalement en France, la production
a démarré cet été dans l'usine italienne de Sanofi, à Garessio. «En année
pleine, nous serons en mesure de fournir, selon les besoins, c'est-à-dire en
complément de la production agricole, entre 50 et 80 tonnes d'artémisinine
vendue à prix coûtant», explique Francis Carré.

La synthèse s'effectue en deux phases. La première, mise au point à
l'université de Berkeley (Californie) par le Pr Jay Kiesling, consiste à
produire de l'acide artémisinique à partir de levures génétiquement
modifiées cultivées dans de grands fermenteurs. Puis, dans un second temps,
ce composé est transformé en artémisinine par catalyse et photo-oxygénation.
Là, les chercheurs et les techniciens de Sanofi sont partis de zéro. Bien
que les deux composés soient chimiquement très proches le passage de l'acide
artémisinique à l'artéminisine a été très compliqué à obtenir, le procédé
générant quantité d'impuretés et de composés instables, autrement dit
explosifs.

«En plus de la cause qu'il sert, ce projet nous a permis de développer un
concept mature de chimie verte, économe en énergie et en composés chimiques
intermédiaires», se réjouit Francis Carré. Une belle aventure qui n'est pas
sans rappeler celle du Taxol et du Taxotère, médicaments deux anticancéreux
mis au point dans les années 1980 par… Pierre Potier en personne.