[e-med] Pour que le droit � la sant� devienne r�el

E-MED: Pour que le droit � la sant� devienne r�el
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[Mod�rateur: remerciements � la liste de diffusion "infoaction" destin�e aux
associations de prise en charge des malades du sida en Afrique.CB]

Discours de Zackie Achmat (Pr�sident de la TAC - Afrique du Sud) � la
Commission des droits de l'homme aux Nations Unies (traduction Alisabeth
Chamorand)

Pour que le droit � la sant� devienne r�el : l'acc�s au traitement du
VIH/SIDA; le r�le de la soci�t� civile en Afrique du Sud 58e session de
la commission des droits humains de l'ONU

1. Madame la Pr�sidente, Haut Commissaire Robins, Messieurs et Mesdames
les distingu�s membres de la Commission, invit�s et amis, Madame Miriam
Maluwa, je veux vous remercier au nom de "The Treatment Action
Campaign"(TAC) d'avoir la possibilit� de m'adresser � vous. TAC est une
campagne men�e par des personnes infect�es par le VIH/SIDA, nos amis,
nos familles, et la communaut� de fa�on plus large. En plus des
organisations de femmes, d'enfants et de professionnels de la sant�, TAC
re�oit le soutien du Congr�s des Syndicats sud-africains(COSATU), du
Conseil National des Syndicats, du Conseil des Eglises sud-africaines,
du Congr�s des Ev�ques catholiques sud-africains et de beaucoup d'autres
organisations communautaires. Le "AIDS Law Project" est une des
organisations importantes associ�es � TAC. Nous luttons pour l'acc�s au
traitement du VIH, pour l'�limination de nouvelles infections caus�es
par le VIH et pour un syst�me de soins de qualit� pour tous, dans notre
pays et au-del�.

2. Pour les enfants, les femmes et les hommes infect�s par le VIH/SIDA,
le droit � la dignit�, le droit � la vie, le droit � l'�galit�,
�troitement li�s au droit aux soins m�dicaux et en particulier � l'acc�s
aux m�dicaments comprenant les antir�troviraux, sont notre rempart
contre la mort. C'est particuli�rement vrai dans les pays pauvres et les
communaut�s pauvres des pays riches. Ces droits-dignit�, vie, �galit�-
sont des outils essentiels de notre combat contre les obstacles au
traitement du VIH et aux soins pour tous. Quels sont ces obstacles?

3. Le manque de connaissances scientifiques et m�dicales est un obstacle
majeur dans notre lutte pour l'acc�s au traitement. Les gouvernements,
les professionnels de la sant� et les personnes infect�es par le
VIH/SIDA ne sont pas souvent au courant des traitements existants pour
les infections opportunistes et de la fa�on dont agissent les
antir�troviraux. Nos professionnels dans bien des secteurs ne
comprennent pas comment fonctionnent les essais cliniques, ne poss�dent
pas les rudiments de pharmacologie etc. Cependant, cet obstacle n'est
pas insurmontable. Quand nous avons commenc� notre campagne pour l'acc�s
� l'AZT pour les femmes enceintes, les gens, y compris des m�decins et
des infirmi�res, nous ont demand� ce qu'�tait l'AZT. Aujourd'hui des
millions de gens en Afrique du Sud ont entendu parler de l'AZT, de la
nevirapine et d'autres antir�troviraux, ainsi que du fluconazole, de
l'acyclovir et du cotrimoxazole. TAC a beaucoup appris des ONG du Nord,
en particulier de GMHC, TAG et Project Inform. Mais nous appliquons ces
le�ons � notre propre contexte culturel. Aujourd'hui, des gens pas
instruits parlent de connaissances th�rapeutiques et bien que nous ayons
encore beaucoup de travail � faire, notre exp�rience nous a montr� que
cet obstacle peut �tre surmont� par la soci�t� civile en association, l�
o� c'est possible, avec le gouvernement et le secteur priv�.

4. Les brevets et les prix : dans notre pays, l'herpes n'est pas trait�
depuis de nombreuses ann�es � cause du prix �lev� d� aux brevets sur
l'acyclovir. Le brevet a expir�, mais les indications pour le traitement
syndromique des maladies sexuellement transmissibles n'incluent pas
encore l'acyclovir. Notre gouvernement
s'est engag� � changer cette situation. Le fluconazole pour le
traitement du muguet syst�mique et de la m�ningite cryptococcale n'�tait
pas � la port�e de la vaste majorit� des malades du VIH/SIDA � cause du
prix et du brevet. C'est aussi vrai des antir�troviraux pour le
traitement du VIH.

5. Le gouvernement du Pr�sident Nelson Mandela et la tr�s comp�tente
ministre de la sant�, Dr. Nkosazana Dlamini-Zuma, ont �labor� un
programme pour une r�forme du syst�me de sant�. Il comprenait la
l�gislation sur les m�dicaments "the Medicines and Related Substances
Control Amendment Act" de 1997. Comme vous le savez, les plus grandes
firmes pharmaceutiques ont intent� un proc�s � notre gouvernement �
propos de cette loi. En particulier, elles se sont oppos�es � des
mesures comme le remplacement par des g�n�riques de m�dicaments qui
n'�taient plus couverts par des brevets( ce qui est commun�ment pratiqu�
aux E.U. en Europe et ailleurs),� une commission charg�e de fixer les
prix, et aux importatioons parall�les. Gr�ce au soutien d'ACT-UP New
York et Philadelphie, de la coalition HealthGap, d'IGLHRC, de MSF et de
Consumer Project on Technology qui mobilis�rent l'opinion publique en
Europe et en Am�rique du Nord, TAC mobilisa la soci�t� civile en Afrique
du Sud pour soutenir la l�gislation et le gouvernement. Nous re�umes le
soutien d'OXFAM, d'ACTSA et d'innombrables autres ONG, et de Windhoek �
Manille, de Londres � Delhi, de Paris � Rio de Janeiro, la soci�t�
civile r�pondit � notre appel pour une journ�e mondiale d'action et une
pression continue sur les compagnies pharmaceutiques. Il y a presque
exactement un an, les compagnies pharmaceutiques capitul�rent. Quels ont
�t� les r�sultats imm�diats de cette campagne?

6. Depuis la campagne contre le lait en poudre il n'y avait eu une
pareille mobilisation g�n�rale de la soci�t� civile internationale sur
une question de sant�. Pour la premi�re fois, un des plus puissants
groupes de pression devait r�pondre de sa course au profit aux d�pens de
la sant� et de vies humaines, devant la soci�t� civile, le gouvernement
et ses actionnaires.

7. Le prix des m�dicaments a chut� en Afrique du Sud et dans le monde.
La majorit� des Sud-Africains qui ont un emploi(30% sont au ch�mage)
gagnent moins de 2000 R par mois. En 1998, lorsque TAC commen�a sa
campagne, le co�t d'antir�troviraux pour un mois de traitement s'�levait
de 4500 R � 25OO R. Maintenant ils co�tent entre 1800 et 700 R par mois.
Les ARV g�n�riques utilis�s par MSF dans son �tude pilote � Khayelitsha
au Cap co�tent 450 R. Des assurances priv�es donnent acc�s � une
th�rapie d'ARV dans notre pays-les membres du Parlement et leurs
familles y ont acc�s. Depuis le d�but de la campagne de TAC et depuis la
fin du proc�s en avril dernier, le nombre des Sud-Africains sous ARV a
augment� de 5000 � 20 000. Cependant, les outils de diagnostic et de
monitorage demeurent le plus gros probl�me. Nous pensons que gr�ce �
des initiatives comme celle du GPO thailandais et du gouvernement
br�silien, le co�t des ARV peut �tre r�duit � 250 R par mois. Le soutien
international aux efforts des gouvernements de Thailand, du Br�sil, du
Nig�ria et d'autres qui utilisent des ARV g�n�riques a �t� renforc� � la
suite de la mobilisation de la soci�t� civile contre le proc�s en
Afrique du Sud. MAIS?

8. La volont� politique en Afrique du Sud reste le plus grand obstacle �
l'acc�s aux antir�troviraux et au traitement appropri� des infections
opportunistes. Ce manque de volont� politique est un obstacle pour
affronter les compagnies pharmaceutiques-le gouvernement n'a pas utilis�
la l�gislation acquise au prix de tant de luttes. Il poss�de le pouvoir
l�gal gr�ce � la loi sur les brevets(Patents Act), la loi sur les
m�dicaments(Medicines Act), et la loi sur la concurrence(Competition
Act). Il a aussi le soutien de l'Accord de Doha pour utiliser les
licences obligatoires pour la production de g�n�riques, mais il ne les a
pas utilis�s.

9. Ce qui est le plus significatif, alors que nous parlons, la Cour
constitutionnelle de notre pays examine un pourvoi urgent de notre
gouvernement contre un ordre provisoire lui demandant de donner la
nevirapine aux femmes enceintes infect�es par le VIH lorsque les
professionnels de la sant� sont en mesure de tester et de conseiller ces
femmes, en attendant un pourvoi. PLus de 70 000 enfants en Afrique du
Sud sont infect�s par le virus du VIH avant leur naissance ou pendant
l'allaitement. Moins de 10% de toutes les femmes enceintes ont acc�s �
des services qui leur prodiguent des conseils, leur font passer des
tests et les informent sur le danger de l'allaitement et du VIH. A
regret, TAC a intent� un proc�s � notre gouvernement pour que la
nevirapine ou tout autre AVR appropri� soit fourni aux femmes enceintes
pour aider � r�duire la transmission du VIH de la m�re � l'enfant, et
pour qu'il �labore un plan sur deux ans afin de donner des conseils, des
tests et des renseignements sur l'alimentation des nouveaux-n�s et sur
les solutions de remplacement de l'allaitement. Nous avons pris cette
d�cision avec peine et regret apr�s cinq ann�es de n�gociations. TAC et
tous ses partenaires ont aid� le gouvernement sud-africain � �difier un
des meilleurs syst�mes juridiques de d�fense des droits humains.
Personne ne peut perdre son emploi parce qu'il est infect� par le VIH,
personne ne peut �tre exclu d'une assurance m�dicale, d'une �cole, d'un
logement et de quelque service social. C'est le r�sultat de
partenariats. Mais depuis 1998 et plus pr�cis�ment depuis octobre 1999,
lorsque notre Pr�sident, M.Thabo Mbeki a mis en doute le lien entre le
VIH et le SIDA, le syst�me de sant� est paralys�. La volont� politique
manque pour surmonter un autre obstacle important au traitement des
malades du SIDA : l'infrastructure de soins m�dicaux. Les moyens
financiers, l'acc�s aux m�dicaments et le d�veloppement des ressources
humaines peuvent �tre obtenus si le secteur priv�, les assurances
priv�es et la soci�t� civile en partagent le co�t.

10. Nous savons que la couverture universelle n'est pas possible dans
l'imm�diat. Un engagement � instaurer une couverture universelle, un
projet th�rapeutique et un engagement politique sauveront des millions
de Sud-Africains de la mort. Nous faisons appel � tous pour nous aider �
changer les conditions difficiles auxquelles nous sommes confront�s en
Afrique du Sud o� la position des n�gateurs du SIDA est devenue une
orthodoxie.

11. Cependant il existe un d�fi plus important que le d�ni du
gouvernement sud-africain. Lorsque nous parlons des droits humains et de
l'acc�s aux m�dicaments antisida et du traitement de la malaria, de la
TB, de la leishmanioses et autres maladies n�glig�es, nous devons aussi
parler de la responsabilit� internationale. Le plus grand d�fi auquel
doivent faire face des pays comme les E.U., la Grande Bretagne, l'Union
europ�enne, le Japon, la Suisse et d'autres, c'est de fournir les moyens
financiers au Fonds mondial, comme l'a demand� le Secr�taire de l'ONU,
M. Kofi Annan. Le Fonds a besoin de 10 � 12 milliards de dollars chaque
ann�e. C'est une honte qu'il n'en ait re�u que moins d'un quart de cette
somme.

12. En conclusion, le pouvoir des firmes pharmaceutiques de dicter leurs
conditions a �t� temporairement limit�. La communaut� internationale a
besoin d'�tre galvanis�e pour consacrer les sommes n�cessaires � la
lutte contre le VIH/SIDA. Une aide importante au d�veloppement
comprenant l'annulation de la dette du tiers monde est essentielle. Cela
peut �tre r�alis� gr�ce � l'organisation de la soci�t� civile en
Afrique, en Asie et en Am�rique latine ainsi qu'en Am�rique du Nord et
en Europe, pour aider nos gouvernements en partenariat, et l� o� c'est
n�cessaire, pour les convaincre par des actions.
Merci

Zackie Achmat, pr�sident de TAC
Zackie@pixie.co.za
3 avril 2002

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