[e-med] Proc�s en Afrique du Sud : le brevet qui cache la for�t

E-MED: Proc�s en Afrique du Sud : le brevet qui cache la for�t
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Proc�s en Afrique du Sud : le brevet qui cache la foret

Alors que le gouvernement d�Afrique du Sud passe une commande d�armes
pour un montant de 5,5 milliards(1) de dollars, illustrant ainsi les
r�elles priorit�s du pouvoir, le pays et l�opinion publique
internationale retiennent leur souffle autour du proc�s intent� par l�
industrie pharmaceutique au gouvernement sud-africain pour avoir propos�
une loi(2) autorisant l�octroi de licences obligatoires et l�importation
de copies d�anti-r�troviraux pour lutter contre l��pid�mie de sida qui
touche plus de 4 millions de personnes dans ce pays.

Si � premi�re vue les positions des uns et des autres semblent claires,
on perd rapidement cette impression de nettet� lorsqu�on se penche sur
les enjeux du proc�s.

Sur fonds de trag�die humaine sans pr�c�dant, c�est tout le syst�me des
brevets qui est remis en cause. En effet, dans les pays en d�veloppement
comme l�Afrique du Sud qui offrent une protection des brevets, l�
industrie pharmaceutique, soucieuse d�optimaliser ses profits et de
r�cup�rer ses investissements, continue de fixer � peu pr�s librement le
prix de ses m�dicaments. Elle r�pond ainsi aux besoins d�un march�
restreint constitu� de quelques privil�gi�s qui peuvent se payer la
sant�, au prix fort. Cette politique n�a fait qu�encourager les
critiques les plus virulentes � l��gard de l'industrie et du monopole
des brevets sur les m�dicaments.

Depuis quelques mois, affol�e par la r�action de l�opinion publique
internationale mais n�anmoins soucieuse de conserver un �business model�
inadapt� � la situation de l��pid�mie de sida en Afrique, l�industrie du
m�dicament a tent� en vain de r�agir et s�est embourb�e dans un cercle
vicieux; chacune des ses concessions est d�sormais per�ue, parfois �
juste titre, comme une man�uvre de diversion plut�t qu�un pas en avant
vers des solutions pratiques et �quitables pour un meilleur acc�s aux
m�dicaments. Les millions de dollars d�pens�s en consultants et
conseillers en tout genre n�y ont rien chang� et la spirale de
vilification des brevets et de l�industrie a atteint un sommet dans le
proc�s intent� au gouvernement sud-africain.

Pour aggraver les choses, plut�t que de se retirer du proc�s ou encore d
�identifier clairement les dispositions sp�cifiques de la loi
sud-africaine qui posent probl�me, l�industrie poursuit une strat�gie de
communication inadapt�e. Demain, les magistrats sud-africains pourraient
bien lui infliger une cuisante d�faite et cr�er un pr�c�dant qui
viderait de sa substance la protection conf�r�e par les brevets.

A ce stade, on peut se demander si la loi sud-africaine constitue
vraiment une menace pour l�industrie ; si elle offre une solution au
probl�me du prix des m�dicaments et apporte des �l�ments nouveaux � la
l�gislation en vigueur en Afrique du Sud ?

Sur la question des licences obligatoires, la loi propos�e par le
Minist�re de la Sant� sud-africain qui pr�voit la possibilit� d��mettre
des telles licences n�apporte rien de nouveau. En effet, la loi
sud-africaine sur les brevets (3), adopt�e en 1978 � l�initiative du
Minist�re de l�Industrie et de la Propri�t� Intellectuelle, autorise
d�j� le recours � ce m�canisme d�exception reconnu dans les accords
internationaux de l�OMC (Article 31 de l�accord ADPIC). Elle offre m�me
un cadre qui va au-del� des questions de sant� publique. Par cons�quent,
si � l�issue du proc�s cette disposition de la loi du Minist�re de la
sant� �tait rendue caduque, le gouvernement Sud-Africain, qui n�a jamais
exprim� son intention d�utiliser ce m�canisme, conservera la possibilit�
d��mettre des licences obligatoires sur les m�dicaments anti-sida gr�ce
� sa loi sur les brevets.

Sur la question des importations de copies de m�dicaments brevet�s, l�
industrie risque gros et s�inqui�te � juste titre. En effet, si les
juges Sud-Africains, sous la pression de l�opinion publique, en viennent
� autoriser ce genre d�importations, ils cr�ent un pr�c�dent qui vide de
sa substance l�un des droits fondamentaux conf�r�s aux titulaires de
brevets : le droit de s�opposer � la mise en circulation de copies de
ses produits. Dans cette �ventualit�, c�est l�ensemble du syst�me des
brevets qui est remis en cause. Toutefois, on comprend mal cet
acharnement sur la question des importations puisqu�en d�finitive, l�
octroi de licences obligatoires tel qu�il est d�j� autoris� par la loi
sur les brevets sud-africaine, suffirait pour permettre l�importation de
copies de m�dicaments brevet�s et remplirait la m�me fonction que celle
propos�e dans la loi du Minist�re de la Sant�.

En r�alit�, derri�re l�affrontement avec l�industrie du m�dicament sur
la question des brevets, le proc�s sud-africain souligne le manque de
volont� politique et la lutte d�influence au sein du gouvernement. Or,
tous s�accordent en priv� sur un point : �tant donn� la gravit� de l�
�pid�mie de sida en Afrique du Sud, m�me � une fraction du prix actuel
des m�dicaments antir�troviraux, le gouvernement ne pourra pas payer le
co�t d�achat et de distribution des m�dicaments pour soigner ces 4
millions de citoyens atteints par le virus. Etant donn� la situation
juridique en mati�re de brevets en Afrique du Sud, on peut se demander s
�il n�y a pas l� une volont� de temporiser et de focaliser l�attention
de l�opinion publique sur le proc�s avec l�industrie, plut�t que d�
ouvrir un r�el d�bat sur la question de la responsabilit� et des
priorit�s de l�Etat sud-africain. Ce virus qui touche un sud-africain
sur quatre n�est-il pas une menace bien plus r�elle que les �ventuelles
vell�it�s belliqueuses des Etats voisins ? Une partie des fonds destin�s
� l�achat d�armes ne pourrait-elle pas se transformer en m�dicaments et
en soins pour diminuer la souffrance et rendre leur dignit� aux malades
?

Ce dont on peu �tre sur, c�est qu�entre le moment ou la d�cision des
juges de Pretoria tombera, c�est � dire en d�cembre prochain, et la fin
des �ventuels recours de l�industrie pharmaceutique ou des organisations
de patients, deux ans peuvent s��couler. Pendant ces deux ans, si le
gouvernement n�agit pas, plus d�un million de citoyens sud-africains
auront �t� condamn�s � mort.

While money talk, people die silently.

Francisco Mingorance
paco@hivnet.ch

(1) 30,3 Milliards de Rands sud-africains � Source: Gouvernement d�
Afrique du Sud
http://www.gov.za/projects/procurement/pressbrief/summary.htm
(2) Medicines and Related Substances Control Amendment Act No. 90 of
1997 (voir Article 15c) - http://www.gov.za/acts/97index.html
(3) Patents Act No. 57 of 1978 (voir Article 56) -
http://www.cptech.org/ip/health/sa/patlaw.html<owner\-e\-med@usa\.healthnet
.org>

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