[e-med] Sierra Leone: l'accèsaux soins des femmes enceintes compromis par la corruption

Sierra Leone : l’accès aux soins des femmes enceintes
  
Le mercredi 07 septembre 2011 16:03 , par Sylvie RANTRUA, dernière mise à jour 07 septembre 2011 17:00
http://www.mtm-news.com/article/3641/sierra-leone-l’acces-aux-soins-des-femmes-enceintes

Le programme gouvernemental de soins de santé gratuits pour les femmes enceintes et les enfants lancé en avril 2010 en Sierra Leone comporte des failles. Il souffre notamment de la corruption et d'un manque de suivi, estime Amnesty International dans un rapport publié le 6 septembre.
Plus d'un an après le lancement du Programme de gratuité des soins, les femmes et les jeunes filles enceintes en Sierra Leone continuent de faire face à de graves difficultés pour accéder aux soins et aux médicaments vitaux lors de la grossesse et de l'accouchement, note Amnesty International mardi 6 septembre dans son rapport « At a crossroads : Sierra Leone’s free health care policy ».

D'un coût de $ 90 millions (€ 64 millions), le programme de soins gratuits (Free Health Care Initiative, FHCI) concerne les femmes enceintes, les mères qui allaitent et les enfants de moins de cinq ans, soit 1,2 million de bénéficiaires, d'après des estimations officielles sierra-léonaises. « Selon les chiffres du gouvernement, depuis la mise en place de cette initiative, le nombre de femmes qui bénéficient de soins prénataux et qui accouchent dans des centres de soins a augmenté. Toutefois, de nombreuses femmes continuent de payer des médicaments de base, malgré la politique de gratuité des soins, et les femmes et les jeunes filles vivant dans la pauvreté n'ont qu'un accès restreint aux soins essentiels lors de leur grossesse et de leur accouchement », souligne Amnesty International.

Manque de suivi et de contrôle

L’ONG reconnaît que le gouvernement sierra-léonais a adopté un certain nombre de mesures pour favoriser l'accès des femmes aux services de santé. Malgré tout, il reste encore beaucoup à faire. « Le système de santé pèche notamment par l'absence de mécanismes efficaces de suivi et d'obligation de rendre des comptes, sans lesquels ces réformes ne sauraient porter leurs fruits », a expliqué Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique de l'ONG. Amnesty rapporte ainsi le cas d’une jeune femme de 23 ans qui venait d'accoucher : « Mon bébé pleurait beaucoup et avait de la fièvre. L'hôpital n'avait pas les médicaments nécessaires. Il fallait que je paye. Alors, ils m'ont chassée. Je ne sais pas comment porter plainte. »

« Le gouvernement a pris des mesures importantes en vue de remédier à ces problèmes. Cependant, les lacunes du système de surveillance et d'obligation de rendre des comptes permettent de passer sous silence des pratiques défaillantes et des mauvaises gestions, et permettent à certaines personnes d'exploiter les failles du système et de piller les médicaments de valeur », a déploré Erwin van der Borght. L’ONG demande donc au gouvernement de la Sierra Leone de renforcer et de mettre en place des systèmes de suivi et de contrôle pour garantir l’accès aux femmes et aux jeunes filles enceintes aux soins et à des recours effectifs en cas de violations de leurs droits fondamentaux.

Le port en cause

Clairement, Amnesty souligne les problèmes dans le système d'approvisionnement des médicaments, aggravés par la corruption, en particulier au Port de Freetown. « De nombreux professionnels de la santé et des acteurs de la société civile ont déclaré à Amnesty International que la corruption au niveau de l'administration portuaire a provoqué d'importants retards dans l’acheminement des médicaments », note le rapport. Le cas le plus flagrant est survenu en 2010 lorsque les autorités portuaires ont refusé de libérer un chargement de médicaments et consommables destinés au lancement de FHCI. Le président Ernest Koroma et le vice-président avaient alors dû intervenir personnellement pour demander aux autorités du port de libérer ce lot.

À l’occasion de la présentation de ce rapport à Freetown, rapporte l’AFP, un responsable du ministère de la Santé, Dr Kisito Daho, a déclaré qu'il ne s'agissait pas du tout d'un mauvais rapport, assez équilibré, et se penchant sur les questions qui les préoccupent.