[e-med] (3)L'action tardive contre le VIH/SIDA a aggravé la menace (RCA)

y'à qu'à mais faut qu'on...

Manifestement, la mission ne s'est pas bien passée, mais bien sûr, c'est
"leur" faute.

Ce qui me renvoie à l'opposition entre les coopérations techniques de long
terme, coopération française, GTZ et autres coopérations bilatérales qui
s'inscrivent dans la durée et le traitement de fond, et les "experts" court
ou moyen termes donneurs de leçons de l'UE, de la BM, de l'AFD etc., dont la
seule et unique préoccupation est de respecter les procédures
administratives et budgétaires de leur siège.
Le PNUD, s'il est bien souvent criticable, était là bien avant l'UE et il y
sera encore bien après.
En deux ans, fussent-ils renouvelés (mais étaient-ils renouvelables?), on ne
change pas la face du monde, ni même de la RCA. Il serait temps que les
banquiers et technocrates du développement s'en rendent compte et acceptent
de s'inscrire dans la durée et d'investir sur les hommes plutôt que sur les
procédures administratives.

Au Cameroun, quand Michèle Tardy est arrivée pour s'occuper des programmes
de lutte contre le VIH/SIDA, il n'y avait quasiment rien (rappelez-vous,
c'était en 1998, à l'époque où on courait après l'AZT et où J. Wolfenson se
demandait si les africains savaient lire l'heure...); six ans après (eh oui,
six ans...), beaucoup de travail a été fait, en équipe, en ressemblant
toutes les bonnes volontés, en tentant d'écarter les requins qui gravitent
inévitablement autours de l'argent du SIDA, dans un contexte pas toujours
évident, bien souvent savonné par les grands bailleurs eux-même (cf.
Wolfenson), mais en bénéficiant de la durée et du soutien de sa hiérarchie,
dont le pouvoir de décision est, à la coopération française, encore
décentralisé (mais pour combien de temps?).
Au cours de la même période, on a vu l'UE s'investir (1998) puis se
désengager (2004) des programmes santé...

Je n'ai rien, bien sûr, contre tel ou tel expert, bien obligé de se plier
aux diktats des technocrates qui l'emploie. Je me permets seulement
d'utiliser cet expemple pour illustrer les questions de fonds qui se posent
aux politiques d'appui au de développement, et tenter d'argumenter à nouveau
sur les bagarres (perdues) qui secouent la France à ce sujet. Les uns et les
autres se reconnaitront.

Bien amicalement à tous,
Christophe Commeyras
c.commeyras@wanadoo.fr

Christophe,

J'adhère en partie, seulement, à tes propos. Nous ne pouvons pas reprocher à l'UE d'être présente dans des pays et à des périodes où de nombreux partenaires se sont retirés (tel que ce fut le cas en RCA entre 2002 et 2005). Le projet auquel j'ai participé durant ses deux dernières années avait été initié en mars 2000 et s'était donc inscrit dans la durée. Il reprendra en juin 2006. Une pause de 6 mois nécessaire à une évaluation et à une redéfinition des objectifs.

Par contre, je reproche à la coopération française de trop s'inscrire encore dans un esprit de substitution.

Les partenaires, africains en général, sont ils pleinement associés à la gestion des projets de la coop ?

Je pense que l'approche développée par l'UE et celle qui semble se développer à l'AFD est meilleure et fait une place plus grande aux partenaires en les impliquant dans la gestion tant technique que comptable des projets.

Le transfert de compétences me semble plus efficient avec ces bailleurs. Mais il est vrai que les procédures restent lourdes et compliquent la mise en oeuvre des projets. Ce point de vue reste très personnel...

Pour revenir au fond de la discussion, la lutte contre le sida en RCA : je reconnais la bonne volonté et les compétences de certaines personnes à Bangui, je citerai Mr Wilibiro Sacko, coordonnateur du CNLS et son équipe, mais le contexte dans lequel ils travaillent ne leur permet pas de mettre en oeuvre les activités comme il le souhaiterait.

Une réflexion de fond doit être menée en conviant tous les partenaires au développement autour de la table. Une concertation permet bien souvent de rationnaliser les dépenses et d'améliorer l'efficience des projets.

Très confraternellement.

Christophe ROCHIGNEUX
christopherochigneux@yahoo.fr

Merci Christophe de me répondre plus calmement que je ne l'ai fait moi-même;

Il est sans doute exact que la Coop conserve encore quelques actions de
substitution, particulièrement dans les pays les plus "proches". Cette
situation a cependant beaucoup évolué en peu d'années.

Surtout, la gestion de l'aide par programmes permet de faire facilement
évoluer les projets qu'ils contiennent, voire de les remplacer, en fonction
de la situation et de son évolution. Cette souplesse est beaucoup favorisée
par une conception politique et stratégique de l'aide et peut-être plus
encore par la décentralisation du pouvoir de décision au niveau des
Ambassades - SCAC.

C'est, en regard, le plus gros reproche que je ferais aux organismes
bancaires ou supra étatiques, tels que l'UE, BM, AFD, etc.:

1- une centralisation de la décision au niveau des sièges qui n'ont la
plupart du temps qu'une vision théorique des politiques de développement et
aucune connaissance du milieu qui permettrait un minimum de pragmatisme et
d'adaptabilité. L'exemple de l'AFD est de ce point de vue parfaitement
caricatural;

2- en conséquence de ce qui précède, une vision technocratique des
politiques de développement, qui conduit à une gestion par projets
indépendants les uns des autres, uniquement évalués par une batterie
d'indicateurs de processus et de résultats.

3- en cascade de ce qui précède, un transfert de responsabilité sur des
bureaux d'études, qui ne seront payés que sur la base de ces indicateurs et
qui serviront de fusibles le cas échéant.

En résumé, un partenaire éloigné, doté d'une vision assez théorique de la
situation, qui n'assume aucune responsabilité politique, préférant la
déléguer à des opérateurs privés qui doivent assumer tous les risques,
politiques, techniques et financiers, sans bénéficier du poids politique que
leur confèrerait l'appartenance à un Etat ou un groupe d'Etats.

On ne peut pas reprocher à ces bureaux d'études, dans ces conditions, de
chercher avant tout à être payés et donc de remplir coûte que coûte les
sacro-saints tdr. On ajoutera que ceci doit être fait au moindre coût, pour
dégager la meilleure marge possible afin de financer les frais de siège et
éventuellement les actionnaires; on s'amusera de ce point de vue à comparer
le prix unitaire facturé pour un expert à la rémunération qu lui est
effectivement versée...

On obtient finalement des programmes morcelés, sans vision à long terme ni
engagement sur le fond, qui commencent et qui s'arrêtent sans raison
apparente, appuyés sur des opérateurs interchangeables poursuivant des
objectifs privés et à très courts termes.

Bien amicalement à toi,
Christophe
c.commeyras@wanadoo.fr