E-MED: A Ouagadougou, des racines contre la mis�re
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Bonjour,
Voici un article dans la presse fran�aise sur un sujet bien connu des
e-mediens... j'en profite pour vous indiquer que le Pr JL Pousset, membre de
ReMeD, sera interwiew� sur RFI le 12 ao�t 2004 � 9h10 dans l'�mission de
Claire H�don "Priorit� sant�" � l'occasion de la sortie de son dernier
ouvrage "Les plantes m�dicinales, les reconna�tre et les utiliser".
Bonne journ�e � tous
Carinne Bruneton
ReMeD
Comme ailleurs en Afrique noire, le gouvernement burkinab� implique
d�sormais les gu�risseurs dans ses politiques de sant� publique
A Ouagadougou, des racines contre la mis�re
http://www.lefigaro.fr/sciences/20040803.FIG0277.html
Ouagadougou : de notre envoy� sp�cial Cyrille Louis
[03 ao�t 2004]
Aux premi�res fi�vres, Idrissa est all� consulter le gu�risseur de son
village. Sans succ�s : avec le temps, les crises se sont faites plus
fr�quentes, pour bient�t se doubler de violents maux de ventre et, parfois,
d'interminables diarrh�es. Alors, le jeune homme a pris la route et s'est
rendu au plus proche dispensaire, � une journ�e de voyage de chez lui. Mais
l� encore, les m�decins ont �chou� � le soulager. Si bien que le 23 novembre
2001, il s'est r�solu � laisser derri�re lui sa famille et ses champs pour
traverser les quelque 200 kilom�tres de brousse qui s�parent sa province
peule, situ�e au nord du Burkina Faso, de la capitale.
Depuis ce jour, Idrissa vit dans la banlieue de Ouagadougou � l'abri d'une
courette ombrag�e au sol de terre battue, coinc�e entre la maison du
�tradith�rapeute� Moussa Konf� et la case qui lui sert de cabinet m�dical.
�Je suis venu voir M. Konf� parce qu'on sait, jusque dans ma province, qu'il
est capable de soigner les maladies les plus r�sistantes, raconte en langue
mor� ce grand jeune homme qui, malgr� son visage �maci�, affiche aujourd'hui
un regard serein et repos�. Gr�ce � lui, ma sant� s'am�liore r�guli�rement
et je sens que je pourrai bient�t rentrer chez moi.� Comme Idrissa, trois
autres patients au long cours ont �tabli leurs quartiers chez le gu�risseur
pour b�n�ficier de ses soins � en plus de la quinzaine de malades qu'il
d�clare recevoir quotidiennement.
�Je soigne de tr�s nombreuses maladies comme le paludisme, la fi�vre jaune,
la st�rilit�, la fatigue, les maux de coeur ou encore certaines affections
opportunistes dont souffrent les personnes s�ropositives�, assure Moussa
Konf�, sourire tranquille, tunique et toque blanches. Aux murs de sa �case �
consultation�, deux �tag�res supportent une dizaine de bouteilles remplies
de rem�des pr�par�s, dans de grandes cuves entrepos�es � l'ext�rieur, �
partir d'un cocktail de feuilles et de racines dont le gu�risseur se refuse
� livrer la composition. Au reste, ceux-ci ne seraient efficaces contre �le
mal� qu'absorb�s au terme d'un rituel sp�cifique � chaque pathologie.
Aliment� en patients par le bouche � oreille, le �tradith�rapeute� d�clare
facturer la consultation 1 000 francs CFA (1,50 euro) aux malades fortun�s
tandis qu'il laisse � l'appr�ciation des plus d�munis le juste honoraire.
�Ma famille paie pour mon traitement en apportant des sacs de c�r�ales
lorsqu'elle vient me rendre visite�, confie par exemple Amidou, un autre
patient qui a pris ses quartiers chez Moussa Konf�. �En tout cas, insiste le
gu�risseur, j'essaie de ne pas abuser de la fragilit� de mes patients qui,
pour certains, viennent me voir parce qu'ils n'ont pas les moyens de payer
le m�decin et les m�dicaments modernes.�
Lorsqu'en revanche il d�couvre une pathologie contre laquelle il pense ne
rien pouvoir � cancer, sida et diverses autres maladies infectieuses comme
le chol�ra ou la m�ningite �, Konf� n'h�site pas � envoyer le malade �
l'h�pital. C'est du moins ce qu'il s'est engag� � faire en acceptant de
collaborer � la nouvelle politique de sant� publique �labor�e, ces derni�res
ann�es, par le gouvernement burkinab�.
Un annuaire des gu�risseurs
Mal a�r� par un ventilateur souffreteux, le bureau d'�loi Som� �touffe sous
la paperasse accumul�e depuis la cr�ation, en octobre 2002, d'une direction
de la promotion de la m�decine et de la pharmacop�e traditionnelle au sein
du minist�re de la Sant�. Sa mission : favoriser l'int�gration des
�tradith�rapeutes� au sein d'un syst�me sanitaire qui s'affaisse sous le
poids de la mis�re. Au Burkina Faso, o� les d�penses annuelles de sant� par
habitant repr�sentent � peine l'�quivalent de 27 dollars, on recense en
effet moins de quatre m�decins pour 100 000 habitants � tandis que
l'esp�rance de vie ne d�passe pas 41 ans.
�Dans ce contexte tr�s difficile, nous avons compris ces derni�res ann�es
qu'il est impossible d'affronter les grands d�fis de sant� publique sans
nous appuyer sur toutes les forces disponibles�, explique �loi Som�. Or les
�tradipraticiens�, jadis contraints de pratiquer dans la clandestinit� par
les colonisateurs fran�ais, sont aujourd'hui omnipr�sents : le gouvernement
en recense 40 000 et le commerce des plantes m�dicinales au Burkina
repr�senterait chaque ann�e, selon une r�cente �tude men�e par la Banque
mondiale, un chiffre d'affaires de plus de 10 milliards de francs CFA
(environ 15 millions euros).
�Le probl�me, c'est qu'il nous faut surmonter la m�fiance de ces gu�risseurs
pour les convaincre, par exemple, de ne pas utiliser certaines plantes
toxiques et de respecter des normes d'hygi�ne�, pr�cise Th�ophile Kamanga
Ouedraogo. Pr�sident de l'antenne burkinab�e de l'association panafricaine
Prometra, ce jeune homme joue en quelque sorte le r�le d'interm�diaire entre
les fonctionnaires du minist�re et les gu�risseurs. Gr�ce, notamment, � sa
m�diation, �loi Som� et ses collaborateurs ont d�j� proc�d� au recensement
de quelque 800 �tradith�rapeutes� qui ont accept� de compl�ter puis de
renvoyer des fiches de renseignement sur leurs activit�s.
A terme, le Burkina devrait accoucher d'un syst�me d'agr�ment visant �
exclure les �charlatans�. A commencer par ceux dont les services sont vant�s
sur les ondes radiophoniques, que le minist�re tient tout sp�cialement dans
sa ligne de mire. �On ne peut plus laisser ces personnes sans scrupule
abuser de la na�vet� des malades�, s'indigne ainsi �loi Som�. D'apr�s les
donn�es fournies par le recensement, les plus exigeants r�clameraient
jusqu'� 15 000 francs CFA par consultation (environ 23 �) � certains �tant
pr�sent�s comme des fonctionnaires � la retraite ou des commer�ants en
faillite qui invoquent un �don de Dieu� pour app�ter le client.
�chou� en bordure d'une piste � la sortie de Ouagadougou, le dispensaire
Sainte-Camille h�berge un programme pilote de recherche auquel participent
pour l'heure 200 Burkinab�s s�ropositifs. Objectif : tester l'efficacit� de
m�dicaments � base de plantes visant � am�liorer l'�tat g�n�ral de patients
qui n'ont pas encore d�velopp� une phase aigu� de la maladie.
�Il s'agit d'explorer une piste qui nous permettra peut-�tre un jour de
contourner une partie des probl�mes pos�s par le prix des m�dicaments
antir�troviraux�, explique Joseph Dabogo Sia, m�decin d�p�ch� dans ce centre
m�dical de Ouagadougou pour superviser le programme. De fait, on estime que
seuls 675 malades � sur les 350 000 porteurs du VIH recens�s au Burkina par
l'organisme Onusida � b�n�ficient actuellement d'une trith�rapie. Une
situation qui, malgr� la r�cente signature d'un accord entre le minist�re
burkinab� de la Sant� et le fabricant indien de m�dicaments g�n�riques
Cipla, ne devrait s'am�liorer qu'en partie : � terme, le traitement
aujourd'hui commercialis� pour le prix de 40 000 francs CFA (61 �) ne
b�n�ficiera en effet qu'� 50 000 malades selon les projections officielles.
Financ� par l'Organisation mondiale de la sant� (OMS), le projet men� �
Sainte-Camille vise dans un premier temps � �valuer cinq cocktails de
plantes con�us, dans le plus grand secret, par plusieurs �tradipraticiens�
choisis en fonction de leur r�putation dans le pays. A chaque visite, les
patients subissent toute une batterie d'examens biologiques � notamment une
mesure de la charge virale et un comptage des lymphocytes CD4, qui
permettent de d�terminer le degr� d'avancement de la maladie. �Lorsque le
nombre de CD4 tombe en dessous de 200 par millilitre de sang, on essaie de
trouver une solution pour placer le patient sous trith�rapie, explique
Joseph Dabogo Sia. Au-dessus, on prescrit les produits traditionnels dont
certains ont, jusqu'� pr�sent, montr� une certaine efficacit� � combattre
les diarrh�es, les dermatoses, et m�me � faire remonter le taux de CD4.�
Faute de moyens pour �tudier ces produits selon les normes internationales,
les r�sultats actuels sont consid�r�s comme tr�s pr�liminaires, quoique
encourageants. En outre, le mode d'action de ces plantes m�dicinales demeure
inconnu, de m�me que les effets �ventuels d'une interraction avec des
m�dicaments antir�troviraux. �Mais il appara�t d�sormais clair que l'Afrique
peut tirer profit de sa pharmacop�e traditionnelle pour tenter de r�soudre �
sa mani�re une partie de ses probl�mes de sant� publique � sans attendre
d'avoir les moyens de s'offrir un jour le m�me syst�me de sant� que les pays
riches�, estime Th�ophile Kamanga Ouedraogo.
C'est � une trentaine de kilom�tres de Ouagadougou et de son vacarme que se
niche, au coeur d'un �crin invisible depuis la grande route, le jardin de la
coop�rative Phytosalus. L�, une quarantaine de salari�s travaillent toute
l'ann�e � la culture et � la r�colte de quelque 150 vari�t�s de plantes
m�dicinales, puis � leur transformation et � leur conditionnement.
P�le-m�le, le laboratoire produit des traitements � base de dalbergia
(contre le paludisme), de ricin (contre les dermatoses), de sanseviera
(antiseptique) ou d'alo� vera (contre le cancer). L'objectif �tant de
fournir aux habitants de la capitale des m�dicaments efficaces contre les
pathologies les plus fr�quentes � des tarifs abordables.
�Nous oeuvrons pour la sant� de la population et particuli�rement des plus
d�munis�, explique Thomas Campaor�, directeur adjoint du dispensaire
Phytosalus de Ouagadougou, o� sont commercialis�s ces produits naturels.
Assur�es par des radiesth�sistes, les consultations y sont gratuites mais
les m�dicaments factur�s entre 200 et 5 000 francs CFA (environ 30 centimes
� 8 �). L'objectif de la coop�rative �tant d'en assurer l'�valuation en
collaboration avec le minist�re de la Sant�, afin d'obtenir � terme des
autorisations de mises sur le march� en bonne et due forme � pour l'heure
facultatives.
Et une protection l�gale de leurs �recettes� contre l'�ventuel app�tit de
laboratoires concurrents.
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