[e-med] Alerte à la contrefaçon des dispositifs médicaux

Une démarche de sensibilisation de l'Afssaps
http://www.quotipharm.com/journal/index.cfm?fuseaction=viewarticle&DArtIdx=383807

Alerte à la contrefaçon des dispositifs médicaux

A leur tour, les dispositifs médicaux sont l'objet de contrefaçons. Moins
répandu que pour les médicaments, ce type de fraude peut toutefois avoir
de graves conséquences sanitaires. Ayant pris la mesure du risque,
l'Afssaps entame une démarche de sensibilisation, notamment auprès des
pharmaciens. Les industriels sont, pour leur part, davantage préoccupés
par la multiplication de copies de moins bonne qualité que les dispositifs
médicaux de marque.

UN SEUL FAIT de contrefaçon de dispositif médical a été relevé à ce jour
en France. Il concernait, en février 2004, des lentilles de contact.
L'alerte fut donnée par les autorités, alors que les plaintes émanant de
porteurs de ces prothèses correctrices se multipliaient. Les lentilles
contrefaites ne leur permettaient pas de voir correctement. Elles ne
présentaient effectivement pas les caractéristiques optiques des lentilles
des marques concernées*, et il est apparu, en outre, qu'elles n'étaient
pas stériles.
Depuis, d'autres cas de contrefaçons de dispositifs médicaux ont été
signalés dans différents pays européens. Un stock de préservatifs
contrefaits, mais conformes, a été récemment découvert en Angleterre et en
Irlande. « Ces signaux d'alerte provenant notamment d'Europe nous
conduisent à rester vigilants et à amplifier la sensibilisation du public
et des professionnels concernés à la question de la contrefaçon », estime
Jean-Claude Ghislain, directeur de l'évaluation des dispositifs médicaux à
l'Afssaps**. Car, comme les médicaments, les dispositifs médicaux
contrefaits peuvent emprunter les voies de l'Internet, qui ne connaissent
pas de frontières. « La vente peut se faire directement du fabricant à
l'utilisateur, ou par l'intermédiaire d'un distributeur, ou alors passer
par un système d'import-export », précise Jean-Claude Ghislain. Mais, à la
différence des médicaments qui doivent obtenir une autorisation de mise
sur le marché, les dispositifs médicaux ne sont pas soumis à l'avis de
l'Afssaps pour être commercialisés.

Une concertation européenne.
L'agence peut seulement procéder à des vérifications ultérieures à
l'arrivée sur le marché, de façon impromptue ou à la suite d'une alerte.
Face à cette menace jugée grandissante, l'Afssaps a décidé de renforcer
son plan de lutte contre les contrefaçons de dispositifs médicaux. « Tant
au plan national qu'européen, nos laboratoires s'investissent dans la mise
en place d'outils permettant la détection rapide de contrefaçons, sur des
gammes ciblées pour leur potentialité à être contrefaites », confie
Jean-Claude Ghislain.

En ligne de mire, selon lui, les produits de « grande consommation pour
lesquels il existe de grandes différences de prix à travers le monde. » Un
service de l'agence est chargé d'entretenir des échanges avec les autres
administrations compétentes dans ce domaine (Dgccrf, Ddass, douanes,
etc.). L'Afssaps va aussi développer une démarche envers les fabricants et
les distributeurs de dispositifs médicaux. Des recommandations vont être
émises pour inciter ces derniers à la vigilance sur les produits qu'ils
commercialisent. De plus, une rubrique dédiée à la contrefaçon des
produits de santé va bientôt être mise en ligne sur le site de l'Afssaps.
Des éléments d'information régulièrement actualisés seront ainsi
accessibles aux industriels comme au grand public. Les patients pourront
également être alertés par les officinaux (qui seront eux-mêmes bientôt
sensibilisés à ces questions) des risques qu'ils encourent en utilisant
des dispositifs médicaux contrefaits. Mis au point par l'Afssaps et
l'Ordre des pharmaciens, un document consacré au sujet doit parvenir aux
officines dans les mois qui viennent. Le circuit pharmaceutique est
considéré comme sécurisé par l'Afssaps, qui pourrait aussi tenter de
réactiver le réflexe de matériovigilance des professionnels de santé.

Multiplication de copies.
Si les autorités prennent les devants, en raison des risques sanitaires
liés à l'emploi de produits contrefaits, les industriels ont pris la
mesure du problème, sans dramatiser. « Nous serions davantage touchés par
la commercialisation d'articles de mauvaise qualité, qui ne sont pas
forcément des contrefaçons », relève Philippe Rouard, délégué général de
l'Appamed, le syndicat de l'industrie des dispositifs de soins médicaux.
Il pointe en particulier les produits « copiés et rebaptisés » vendus sur
Internet ou intégrant des gammes d'orthopédie vendues par des chaînes de
grande distribution discount. Selon Philippe Rouard, le circuit officinal
pourrait être touché par ce phénomène, par le biais de pharmaciens tentés
de se procurer des produits de moindre qualité en vente directe ou sur les
plates-formes de certains groupements.
Ce sont donc plutôt les copies de dispositifs médicaux qui posent
problème. Le délégué général de l'Appamed réclame un « vrai contrôle du
marché », alors que la vente de ces produits par correspondance et sur
Internet devrait normalement être interdite, « mais ne l'est pas, les
textes n'étant toujours pas sortis », précise Philippe Rouard.

MATTHIEU VANDENDRIESSCHE

* Proclear de CooperVision et Surevue de Johnson & Johnson Vision Care.
** Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
Les failles du marquage CE

Depuis juin 1998, les dispositifs médicaux, qu'ils soient des implants,
des équipements ou des consommables, doivent être marqués CE avant d'être
mis sur le marché. Ce sigle assure le consommateur que le produit répond
aux exigences de santé et de sécurité telles qu'elles sont définies par la
réglementation européenne. Mais ce marquage peut lui-même avoir été
contrefait, permettant l'entrée dans l'Union européenne de dispositifs
médicaux non conformes, en provenance de pays extra-communautaires. De
plus, les dispositifs médicaux de classe I (non invasifs) peuvent avoir
été autocertifiés par le fabricant lui-même. Le marquage CE n'est donc pas
infaillible et il suppose une surveillance active du marché. En outre,
pour ce qui concerne leur prise en charge, les bas et les bandes de
contention doivent faire l'objet d'un certificat de déclaration à
l'Afssaps. Mais d'autres types d'orthèses déposées à l'agence bénéficent
seulement d'une présomption de conformité au cahier des charges.

Le Quotidien du Pharmacien du : 25/01/2007