Petite réflexion personnelle en réponse à la proposition de Christophe
Rochigneux
Les pharmacies franchisées semblent le meilleur compromis entre les
priorités de santé publique en terme d'approvisionnement en médicaments de
qualité pour le plus grand nombre et les préoccupations de qualité de la
dispensation du pharmacien.
Mais qui travaillerait dans ces pharmacies franchisées?
-Peut on profiter de la mise en place de telles structures pour
fournir un emploi stable et légal aux vendeurs de rue ou aux sans emplois
motivés (le tout venant motivé) ou au contraire doit on se réfugier derrière
la législation "élitiste et monopolistique " de la pharmacie et ne doter ces
locaux que de personnel pharmaceutique qualifié mais rare (pharmacien et
préparateurs)?
Comme j'ai pu l'observer à Douala dans les différents quartiers, les
vendeurs répondent à un besoin ; ils apportent un service de proximité (on
peut acheter ces médicaments dans une boutique en buvant une 33 à Déido), à
moindre coût. Malheureusement la qualité du service est plus qu'insuffisante
pour un pharmacien même très laxiste! que cela soit au point de vue
approvisionnement (centrale inconnue), stockage (au soleil), conseil de
dispensation (digne d'un garagiste ).
A Mayotte ou je travaille actuellement comme coordinateur des dispensaires,
le réseau de 19 dispensaires (les centres de consultations secondaires ont
tous fermés, trop désués) bientot renforcés par 3 sites intercommunaux
couvre les besoins d'une population pauvre d'origine comorienne et les
mahorais (qui on maintenant droit à la sécu, à l'ALD ...et qui recourent de
plus en plus aux 7 pharmacies privées).Ces 20 sites répartis sur 375km²
apportent un service de proximité , autrefois gratuit. (la mise en place du
reouvrement des couts par participation communautaire mis en place en avril
est censé recouvrir les couts de l'hopital qui gère ces centres).
Jusqu'à maintenant, le personnel de ces centres de santé, affecté à la
dispensation des médicaments n'est composé en grande partie que d'ASH et
quand ils sont absents c'est la femme de ménage ou le chauffeur qui s'y
colle. Rarement un Aide soignant.
A l'aide d'une équipe de 5 préparateurs (qui va passer à 13), nous tentons
de sélectionner le personnel motivéà cette tache, les former ou plutot, pour
le moment, les sensibiliser aux risques et responsabilités de l'acte de
dispensation . Nous limitons aussi les réferences disponibles à la
délivrance dans les centres primaires (pour les centraliser danns les sites
intercommunaux dotés de préparateurs). Enfin nous apportons un encadrement
renforcé avec des procédures et le passage des préparateurs.
A coté de cà il existe aussi des bangas pharmacies en brousse, ou les
médicaments volés dans les dispensaires sont revendus au prix fort aux
clandestins.
Pour en revenir à la question, pourquoi pas des pharmacies franchisées?
Il me semble qu'elles apporteraient un service indéniable à la population de
qualité supérieure à l'existant (médicaments de rue) tout en restant
encadrées par une structure telle que la pharmacie centrale du pays ou de
la région. Eviter à tout pris l'aspect commercial pour ne pas s'éloigner des
priorités de santé publique.
Mais comment ne pas tirer le système pharmaceutique vers le bas?
Pour respecter les soucis et priorités du pharmacien (qualité du médicament,
de son stockage , dispensation sécurisée par du personnel qualifié) il faut
pouvoir se munir de personnel motivé avant tout par le travail à effectuer
et prêt à s'investir dans une peite structure ou commerce de proximité. Je
crois que les pays d'afrique sont riches en hommes et femmes désireuses
d'apporter un service à la communauté. La mise en place d'un "certificat
d'aptitude" après une année d'étude en alternance serait le meilleur
compromis à mes yeux de pharmacien. J'ai pu , à Mayotte "former" (cessions
de 3 jours ) 40 aides de service hospitalier , et j'ai pu donner les cours
de pharmaco à 4 promotions d'étudiants infirmiers sur + de 100h. Je suis
convaincu qu'avec la motivation et le sens de l'intérêt publique une
personne encadrée par du personnel réellement qualifié peut apporter un
service de relative qualité.
L'approvisionnement serait géré par la pharmacie centraleet les franchises
n'ne seraient que des prolongements locaux.
Quid du financement de telles structures?
Je lis tous les jours dans ce forum les soucis financiers des différentes
structures dépendant de l'état ou reposant sur la participation
communautaire. L'aide extérieure est elle indispensable?? Je crois que oui.
J'ai trouvé sur le net (j'ai malheureusement oublié de noter l'adresse) la
newsletter d'un réseau de petites pharmacies franchisées, dans un pays
africain anglophone je crois me souvenir. L'approvisionnement était géré par
une centrale américaine me semble -t-il.
La mise à disposition de MEG de qualtité garantiepar une centrale d'achat
techniquement assistée ferait baisser les prix avec un réseau de proximité
vue la petite taille de chaque boutique franchisée
PROBLEME: Dans ce cas là, que vont devenir les officinaux dans les
alentours? Quelles seraient les conditions pour l'implentation d'une
f'ranchise, sans léser les intérets des pharmaciens diplomés installés?
A définir par le syndicat, la centrale et le conseil de l'ordre?
Serait il possible d'y rattacher les possibilités ouvertes par le concept
de recouvrement des couts par participation communautaire?
Comment rémunérer et interesser financièrement le franchisé pour qu'il reste
dans sa pharmacie boutique?
La franchise serait elle implantée là ou une officine n'est pas
commercialement viable?
Le personnel d'encadrement émanant éventuellement de la structure mère
(pharmacie centrale en l'occurence pour éviter que l'enseme ble ne connaisse
une dérive mercantile) pourrait se charger de la formation initiale et
continue.
Quid de la sécurisation de telles structures?
L'engagement communautaire et une logistique adaptée pour les flux d'argent
pourraient limiter les tentations de vol?
Enfin quelles taches seraient attribuées aux franchisés?
-délivrance des prescriptions des médecins ou infirmiers prescripteurs.
Leurs compétences pharmacologiques seraient elles suffisantes pour leur
permettre d'apporter une opinion pharmaceutique, et controler les
prescriptions abusives? Quel serait leur "pouvoir" d'opinion face à un
médecin ? Cela dépendra du sérieux de leur formation
-conseil, OTC, vente sans ordonnance: on glisse vers le mercantile?
-phytothérapie traditionnelle: voila une plus value et un service adapté aux
populations pauvres
-conseil , éducation à la santé: c'est toujours le bien venue!
En résumé , dans cette rapide réflexion, à travers mon début d'expérience de
la pharmacie en Afrique, je pense que le concept de pharmacie franchisée,
dans le cadre que j'ai esquissé, off're un potentiel de service adapté aux
populations (coût des MEG, proximité) tout en ne s'éloignant pas trop des
priorités et de la législation pharmaceutique (personnel qualifié et
sécurité de dispensation).
J'espère pouvoir apporter mon aide dans le débat et qui sait en faire un
mémoire pour mon Msc de santé publique que je m'apprète à débuter en
septembre!
Stephan Cluzel
pharmacien coordinateur
Centre hospitalier de Mayotte
timoun_king@yahoo.fr