[e-med] Déclaration de Berlin sur la pharmacovigilance

à la Une de la Revue Prescrire du mois d'Avril 2005

Effets indésirables des médicaments :
Déclaration de Berlin sur la pharmacovigilance
http://www.prescrire.org/aLaUne/dossierVigilanceBerlin.php

La pharmacovigilance, processus d'évaluation et d'amélioration de la
sécurité des médicaments, doit être renforcée.

Les effets indésirables des médicaments réduisent sensiblement la qualité de
vie des patients, multiplient les hospitalisations, prolongent les séjours à
l'hôpital et augmentent la mortalité. Ils représentent en outre une charge
financière énorme pour les systèmes de santé. Or plusieurs éléments nouveaux
sont intervenus récemment dans le domaine de l'enregistrement des
médicaments, qui risquent d'exposer davantage de personnes aux effets
indésirables. Ainsi, par exemple, les autorisations de mise sur le marché
des nouveaux médicaments sont octroyées plus rapidement, sans évaluation
spécifique de leurs effets indésirables à long terme ; beaucoup plus de
patients peuvent disposer de médicaments très tôt du fait des mises sur le
marché au niveau supranational ; et enfin avec la levée de restrictions à
l'accès, certains médicaments sont plus largement utilisés en
automédication.

Problèmes actuels
Les systèmes de pharmacovigilance ne sont pas organisés ni financés pour
répondre de façon optimale aux besoins des patients et du public. C'est
ainsi par exemple que l'Agence européenne du médicament (EMEA) dépend de la
Direction générale (DG) Entreprises, et non pas de la Direction générale
Santé et protection des consommateurs, ce qui constitue manifestement un
conflit d'intérêts. En outre, les agences du médicament partagent peu les
informations sur les effets indésirables avec les professionnels de santé.
L'EMEA et les agences nationales sont, dans une large mesure, financées par
l'industrie, et jusqu'à présent, aucune loi n'imposait que la
pharmacovigilance soit financée par la partie du budget des agences qui
provient de fonds publics.
Souvent, les informations sur les effets indésirables des médicaments sont
peu satisfaisantes et restent secrètes. Les recherches sur les effets
indésirables des médicaments sont insuffisantes, de sorte qu'on ignore
l'incidence exacte de certains effets indésirables (rapportée à la
population ou au nombre de prescriptions). Les données sur les effets
indésirables dont disposent l'industrie pharmaceutique et les agences du
médicament ne sont généralement pas accessibles au public.
Les professionnels de santé sont peu intéressés par la pharmacovigilance,
ils sont rarement encouragés à participer au dispositif mis en place et
généralement, les effets indésirables sont sous-notifiés.
Les informations que reçoivent les patients sur les effets indésirables sont
insuffisantes et peu compréhensibles. Dans bien des cas, les centres de
pharmacovigilance officiels et les agences du médicament n'acceptent pas les
déclarations provenant directement des patients, qui sont pourtant les seuls
à véritablement subir les effets indésirables.

Des membres européens de l'ISDB ont organisé un groupe de travail pour
débattre des moyens de rendre la pharmacovigilance plus efficace et diminuer
ainsi les effets indésirables des médicaments. Ce groupe s'est réuni à
Berlin les 31 octobre et 1er novembre 2003. Il a rédigé une déclaration qui
se conclut par plusieurs propositions à l'intention de tous les acteurs
concernés par la pharmacovigilance, et qui traitent des principaux thèmes
suivants.

Vers une plus grande transparence
La transparence, dans le cadre du Règlement européen 1049/2001 sur l'accès
aux documents publics, doit être de règle. Dès qu'un médicament est mis sur
le marché, les agences du médicament et l'industrie pharmaceutique doivent
tenir à la disposition du public tous les résultats pertinents des essais
cliniques et précliniques, y compris des études chez l'Animal. Ainsi, les
professionnels de santé et les bulletins thérapeutiques seront en mesure
d'évaluer le rapport bénéfices-risques des traitements plus rigoureusement
qu'à partir du résumé des caractéristiques du produit (RCP) et de la
documentation que l'industrie est disposée à communiquer. Les professionnels
de santé doivent être informés sans délai de toute donnée nouvelle sur les
effets indésirables. Enfin, il faut mettre en place une politique en matière
de déclaration des conflits d'intérêts partout où ils surviennent..

Échanger les données de pharmacovigilance
Les organismes nationaux et internationaux doivent davantage coopérer et
harmoniser leurs travaux en créant un réseau de pharmacovigilance. Il
convient de définir des méthodes d'enquête normalisées sur les effets
indésirables provoqués par les médicaments qui déboucheront sur des
stratégies de prévention.

Améliorer les mécanismes de notification et de collecte des données
Il faut encourager vivement la notification des effets indésirables des
médicaments après leur mise sur le marché en associant toutes les parties
prenantes (médecins, pharmaciens, infirmiers, sages-femmes, praticiens de
médecine traditionnelle et patients). À cet effet, l'enseignement de la
pharmacovigilance doit commencer tôt dans la formation professionnelle des
étudiants des professions de santé. Si un médicament pose un problème
particulier, il appartient aux institutions publiques ou privées (comme les
compagnies d'assurance) d'entreprendre les études qui s'imposent.

Mieux informer les patients et mieux les écouter
Avant de commencer un traitement, il faut donner aux patients des
informations complètes et impartiales sur les avantages potentiels et les
risques de ce traitement. Des informations indépendantes sur les médicaments
doivent être mises à la disposition des patients partout où ceux-ci sont
traités (y compris dans les hôpitaux). La formulation et la présentation de
ces informations doivent être testées pour leur clarté.

©International Society of Drug Bulletins
traduction en français par la revue Prescrire 1er avril 2005