[e-med] Il est vrai Artemisia

Il est vrai Artemisia

Millet P.
ChemBioPharm, Unités Inserm 1212 - CNRS 5320
Universite ì de Bordeaux, Laboratoire de parasitologie-mycologie, Pôle biologie, Hôpital Pellegrin, Bordeaux
Millet P. Il est vrai Artemisia. Med Sante Trop 2019 ; 29 : 7-8.

Résumé. Il existe actuellement une controverse dangereuse au sujet de l’utilisation de me ìdicaments antipaludiques a` base de de ìrive ìs d’arte ìmisinine, et de l’efficacité antipaludique de tisanes d’extraits de plantes d’Artemisia spp. Cet article rappelle quelques principes fondamentaux guidant les avancées dans le traitement du paludisme et l’utilisation de l’artémisinine, dans le but de fournir des éléments de discussion permettant de proposer une place adaptée aux situations sanitaires pour les médicaments et la phytothérapie.
Correspondance : Millet P <pascal.millet@u-bordeaux.fr>

I l existe actuellement une controverse susceptible de mettre les personnes en danger au sujet de l’utilisation de meédicaments antipaludiques produits par l’industrie pharmaceutique a` base de dérivés d’artémisinine, et de l’efficacité antipaludique de tisanes d’extraits de plantes d’Artemisia annua et d’Artemisia afra. Nous nous trouvons actuellement confrontés à la défense des priorités contradictoires des organismes publics et privés internationaux intervenant sur la santé, des lobbies pharmaceutiques et phytothérapeutiques.

Il m’a semblé important, dans un contexte ou la politique semble vouloir prendre le pas sur les sciences médicales et pharmaceutiques, de prendre du recul et de rappeler certains principes fondamentaux guidant les avancées dans le traitement du paludisme. Il m’est apparu également important de placer la réflexion dans des pays où la santé publique est largement déficiente. Cette liste d’observations scientifiques et déontologiques a pour but de fournir des éléments de discussion permettant de proposer une place adaptée aux situations sanitaires pour les médicaments et la phytothérapie :

– Il est vrai que les tisanes d’artémisinine sont efficaces pour réduire le nombre de parasites dans le sang et diminuer la fièvre résultant de l’infection palustre. A des doses suffisantes dont on ne connaît pas les limites, les parasites peuvent être éliminés de la circulation sanguine.

– Il est vrai que les tisanes d’artémisinine, combiné es à l’immunité antipalustre acquise par les populations vivant au contact de l’anophèle vecteur, peuvent aboutir à un contrôle de l’infection.

– Il est vrai qu’il est impossible de doser la quantité d’artémisinine et autres principes actifs biodisponibles dans une tisane de plante. Cette quantité est dépendante de nombreux facteurs tels que l’espèce et sous espèce de plante considérée, la nature du sol où elle pousse et le climat, le moment ou la plante est récoltée, les méthodes de séchage et de stockage, la température et le temps de l’infusion.

– Il est vrai que les combinaisons thérapeutiques à base de dérivés chimiques d’artémisinine (ACT), produites par les industries pharmaceutiques, ont démontré leur efficacité pour faire disparaître les parasites de la circulation sanguine suite à un traitement de 3 jours à des doses parfaitement identifiées et contrôlées.

– Il est vrai que les programmes d’accès aux médicaments antipaludiques n’atteignent pas les populations négligées vivant en zone rurale reculée, dans des pays où le gouvernement et les organismes internationaux sont incapables d’assurer des infrastructures de santé et de logistique pharmaceutique de base (soit pour cause de guerre ou d’absence de considération). Il serait non éthique d’interdire l’utilisation des tisanes d’artémisinine dans ces situations.

– Il est vrai qu’il n’est pas éthique de conseiller une prévention à base de tisanes d’artémisinine à un voyageur se rendant dans un pays à risque de paludisme. A son retour, l’émergence possible de rares parasites perdus dans 5 litres de sang (et donc indétectables par toutes les méthodes diagnostiques disponibles à ce jour), peut conduire à une crise de paludisme qui lui sera fatale si elle n’est pas détectée et soignée à temps.

– Il est vrai qu’il circule dans le monde, particulièrement dans les pays à ressources limitées, une grande quantité de faux médicaments antipaludiques contenant peu ou pas de principe actif. Les criminels du médicament doivent être éradiqués.

– Il est vrai qu’utiliser de l’artémisinine en plante ou en comprimé en monothérapie, sans l’adjonction d’un autre antipaludique, aura un effet temporaire bénéfique pour le patient, mais renforcera les résistances à l’artémisinine actuellement en émergence en Asie du Sud-Est et en Afrique.

– Il est vrai que des recherches sur les molécules anti- paludiques autres que l’artémisinine, présentes dans les différentes espèces d’Artemisia sp., doivent être plus financées.

Toutes ces considérations sont exactes, soutenues par des publications médicales et scientifiques, des articles de fonds rédigés par des scientifiques, et paradoxalement, elles sont contradictoires.
Chacun peut prendre les phrases qu’il souhaite et omettre les autres pour défendre ses intérêts.
Seul un débat approfondi, avec une prise en compte des lobbies du « bien et du mal », conduit par des acteurs de la santé pour tous, et non par les seuls acteurs du divertissement ou de la politique, permettra de progresser, dans une réflexion complexe et pluridisciplinaire, vers des recommandations prenant en compte les réalités scientifiques, médicales, et sociétales.

Liens d’intérêt : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.

Merci Pascal pour ces rappels indispensables !
Il ne suffit pas de ... Il faut surtout vérifier l'efficacité d'une méthode, qu'elle soit d'ordre pharmacologique, phytothérapie incluse, ou d'ordre organisationnel.
Ni la politique, ni la démagogie n'ont leur place en matière de traitement ou de prévention du paludisme : seules des techniques et des méthodes de mise en place éprouvées sont à retenir et à promouvoir.
Il est bien vrai que ...
En avant la musique !
Edouard Guévart

Merci Pascal,

Si tout ceci est vrai, ce dont nous n'avons jamais douté, alors il
appratient comme tu le dis d'ailleurs à chaque communauté, à chaque
gouvernement d'utilser le bout de phrase qui lui sied le mieux car les
problèmes et les possibilités en europe sont différentes de ceux de
l'Afrique et de l'Asie !

Best

*Dr Sosthène DOUGROU, PhD-MPh*
*Réseau Interafricain d'Accès Universelle à la Santé*
*Président de la Fondation Développement Santé*
*Expert en Politiques et Programmes de Santé*
*Spécialiste en Renforcement des Systèmes de Santé*
*Spécialiste en Qualité des Soins Hospitaliers*
*Diplomate Humanitaire, Spécialiste Santé en Situation de Crise*
*Santé Maternelle /VIH Sida et Santé Communautaire*
*Communication Pour Une Meilleure Santé*

*Tél.: 00221 77 426 44 40*