[e-med] Les prises de contrôles par des étrangers menacent l'industrie du générique en Inde

[remerciements à CR pour la traduction de ce message.CB]

E-DRUG: Les prises de contrôles par des étrangers menacent l'industrie du
générique en Inde
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NEW DELHI, selon une étude dont on a beaucoup parlé, les liens entre les
labos indiens et multinationaux étrangers n'ont pas amélioré les capacités
de la R&D locale.

Au contraire ils ont soulevé des craintes d'une perte réelle de la capacité
de production locale des médicaments pas chers dont on a besoin pour les
autres pays en développement.

Des labos indiens ont mis la main sur des firmes étrangères lors de la
dernière décennie, ou ont établi des liens marketing pour la promotion de
produits de labos étrangers en Inde. Pendant ce temps, des labos étrangers
ont acquis des labos indiens comme Ranbaxy, Nicholas Piramal India et
Shantha Biotech.

Une analyse par l'Institut National Indien des Sciences, de la Technologie
et du Développement (India's National Institute of Science, Technology and
Development Studies - NISTADS) montre qu'il n'y a aucune amélioration des
capacités de la R&D locale, ni transfert de technologie significatif de
l'étranger. L'étude sera publiée en juillet 2011 dans un numéro spécial de
International Journal of Institutions and Economies.

Les organisations de recherche clinique en Inde qui conduisent des études
pour bien moins cher qu'à l'étranger, ont grandement failli à améliorer leur
capacités technologiques. Une analyse de leur croissance annuelle de 20 à
25% montre qu'elle vient principalement de leur capacité à conduire des
études, et que seulement 20% dérivent de leur capacité à découvrir de
nouveaux médicaments, ces derniers étant principalement destinés à
l'occident.

Dines Abrol, scientifique du NISTADS, qu a conduit cette étude a déclaré à
SciDev.Net que l'une des raisons du problème était la perte de capacité à
produire localement des versions génériques bon marché de médicament qu'on
produirait par des procédés chimiques alternatifs, et donc libre de droits
sur les brevets.

L'ONG internationale Médecins Sans Frontières, qui dépend de l'Inde à
hauteur de 80% pour ses fournitures de génériques de produits du SIDA
qu'elle distribue dans les pays en développement, décrit l'Inde comme étant
"le laboratoire du monde en développement"

Abrol déclare que les labos étrangers ont acquis des labos indiens qui
avaient une forte présence des plusieurs pays en développement. Les labos
indiens ne seront alors plus capables de produire des versions moins chères
des nouveaux produits détenus par des labos étrangers, réduisant ainsi la
possibilité de fournir des médicaments pas chers à d'autres pays.

La législation internationale sur les brevets autorise les pays à lancer des
licences obligatoires pour produire ou obtenir des génériques lors
d'urgences nationales. Mais si l'Inde devait déclarer une urgence nationale
dans l'avenir, il y aura peu de labos de génériques capable de produire en
Inde en quantité suffisante, souligne Abrol

Un avant projet du ministère indien du commerce de novembre 2010 avertissait
en ces termes: " la prise en main de l'industrie indienne par des firmes
étrangères est un problème car elles seront dirigées vers des marchés
extérieurs, réduisant ainsi la disponibilité des produits qu'elles

. Ce qui pourra réduire la concurrence et servir de porte

d'entrée à une augmentation du prix des médicaments fabriqués localement".

Le ministère a aussi indiqué qu'on voyait de telles alliances se faire au
Brésil, en Egypte et au Pakistan, soulignant "une consolidation du marché"
qui pourrait "modifier le paysage pharmaceutique"

Abrol a ajouté que les labos indiens défient souvent les soumissions en
Inde des brevets des multinationales du médicament. "Les acheter pourrait
aussi conduire à moins de questions irritantes sur les brevets" a-t-il dit.

Un autre problème se pose pour la propriété intellectuelle des technologies
indiennes qui tombent dans des mains étrangères. Les entreprises indiennes
ont bénéficiés d'incitations fiscales et de clauses d'exemption sur les
brevets de produits issus de la recherche financée sur des fonds publics
indiens. Entre 1965 et 1980, le Conseil de la Recherche Scientifique et
Industrielle en Inde a abandonné ses droits sur 50 nouveaux procédés et 50
nouvelles réactions pour 100 médicaments essentiels.

L'objectif de ces exemptions était de pousser l'industrie indienne locale,
mais après une prise de contrôle le bénéficiaire final est une entreprise
étrangère.

Ces mêmes entreprises sont aussi maintenant le dernier bénéficiaire d'accord
bilatéraux entre pays en développement leur conférant des privilèges d'accès
au marché, y inclus le Brésil.

"Ce qui adviendra de ces accords est en jeu" a déclaré Sachin Chaturvedi, un
analyste en chef de Research and Information System for Developing
Countries.

Bonjour,

On se trompe de combat si on veut dicter aux industriels indiens du
générique de ne pas se laisser tenter par des labos étrangers. Leur
stratégie industrielle est de leur responsabilité et vouloir s'en mêler est
un non-sens sur le plan économique. Depuis le début de cette aventure, il
était écrit qu'ils chercheraient à se développer et à se tourner vers des
produits à plus forte rentabilité que les génériques. Déjà dans les années
80 Ranbaxy avait établi une joint-venture avec Eli Lilly.

Au lieu de se lamenter de cette situation il faut au contraire se tourner
vers d'autres pays ayant le potentiel de remplacer les Indiens. Fort de
l'expérience indienne, on sait maintenant dans quelles conditions on peut
assister ces nouveaux candidats, sans déstabiliser le marché au niveau
mondial.

Profitons de cette expérience pour créer un contre-front au lieu de vouloir
dicter à un industriel qu'il gagne suffisamment pour ne pas aller vers plus
de profit. C'est la logique même des affaires que de vouloir augmenter son
profit; vouloir la combattre est la preuve d'une méconnaissance des règles
de l'entreprise, c'est tout! et les industriels, indiens ou d'ailleurs,ne
se feront pas avoir à ce jeu : leur stratégie est de leur responsabilité,
je le répète, et ils ne peuvent accepter qu'on leur en dicte une autre.

Par ailleurs, je comprends que les officiels en Inde s'inquiètent que des
fonds publics utilisés pour développer la R&D par exemple résultent in fine
à améliorer le profit d'entreprises étrangères. Que l'Inde édictent une
législation empêchant leurs entreprises de se vendre au premier venu pour
que le bénéfice de ces incitations ne soient pas perdus, est acceptable. Il
appartient à l'Inde de développer cette législation.

On connaît en France des situations semblables où des investisseurs
étrangers sans scrupules ont bénéficié d'avantages financiers conséquents
pour faire une opération dont le seul but était financier puisque l'affaire
une fois faite, ils sont partis sans demander leur reste. Donc je souhaite
bonne chance aux Indiens pour réussir dans cette direction.

Mais pour tous ceux qui regardent la situation de l'extérieur, ONG,
organisations bi ou multilatérales, la question n'est pas là. Il leur
appartient de développer un contre feu là où c'est possible, pour éviter
notamment de devenir dépendant d'un seul fournisseur à terme : l'Inde.

Charles Rambert