Médicaments: Qui sont les contrefacteurs?
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· Des fabricants en Inde, en Chine et en Europe
· La contrefaçon représente 10% du marché mondial
· Un fléau qui a fait lessentiel du débat à la 5e édition dOfficine Expo à
Marrakech
Près de 2.000 professionnels de la pharmacie se sont donné rendez- vous à
Marrakech pour la 5e édition dOfficine Expo. Pour la première fois, le
salon international des pharmaciens sest tenu en dehors de Casablanca.
Fabricants, distributeurs, chargés de promotion ou fournisseurs du Maroc,
ont fait le déplacement en force.
De nombreux pays (Tunisie, Espagne, France, Algérie et le Sénégal) étaient
représentés, soit en tant quexposants, soit via les Ordres de pharmaciens.
Lexposition commerciale, avec 80 stands, a réuni la majorité des
laboratoires pharmaceutiques marocains, ainsi que plusieurs fabricants de
matériel médical et officinal sur un espace de plus de 3.000 m2 aménagés
pour présenter les dernières nouveautés de la profession. «Plus quun espace
dexposition, Officine Expo se veut un salon de formation destiné aux
pharmaciens», indique Fatim Zahra Belayachi, membre de lorganisation. «Il
ny a pas de secret. Lofficine doit être gérée comme une PME. Bien coachée,
elle peut augmenter son chiffre daffaires», insiste-t-elle. Doù les
ateliers de formation, les stages et les ateliers sur les techniques de
merchandising, le mangement, le Code du travail, la fiscalité officinale,
programmés tout au long de ce salon. Marqué aussi par de nombreux débats,
conférences, ateliers techniques et stages pratiques au profit des
professionnels du secteur. Au menu également, la présentation de nouvelles
thérapies et dinnovations pharmaceutiques.
Mais cest certainement le phénomène de la contrefaçon qui a fait
lessentiel de lactualité au cours de cette édition 2008. A noter que le
fléau mondial de la contrefaçon des médicaments est désigné aujourdhui par
lOrganisation mondiale de la santé (OMS) comme criminalité
pharmaceutique.
Le marché illicite des médicaments sest développé de manière considérable
et touche directement lAfrique depuis une dizaine dannée. Selon lOMS, il
représente, dans certains pays, jusquà 60% des volumes vendus. A léchelle
internationale, il représente 10% du marché des médicaments et est à
lorigine de millions de morts.
Sur ce marché illégal qui a généré en 2000 plus de 30 millions de dollars,
sont en vente libre les antibiotiques, les anti-inflammatoires,
analgésiques, anti-parasitaires et les produits cardio-vasculaires.
«Dans les pays pauvres, 1 médicament sur 4 est faux», rappelle Najia Rguibi,
pharmacienne. Au-delà de la catastrophe sanitaire quil génère, ce commerce
illicite de médicaments freine le développement socio-économique et
institutionnel des pays.
Cest dailleurs dans cet objectif quun organisme comme le Réseau
médicament et développement (Remed) a été créé. Il agit sur trois axes
prioritaires: linformation, la sensibilisation des populations aux risques
du marché illicite de médicaments, et la promotion de laccès à des
médicaments génériques dans tous les secteurs pharmaceutiques (public, privé
et confessionnel).
· Souk Fellah, à Oujda, plaque tournante du phénomène
Pour Serge Barbereau, vice-président du Remed, il faut distinguer entre deux
problèmes majeurs: le marché illicite avec une vente détournée des
médicaments et la contrefaçon industrialisée à travers des copies de
médicaments et qui na rien à voir avec les génériques. Durant les 3
dernières années, 2,7 millions dunités de faux ont été saisies. 31%
provient de lInde et 20% de la Chine. Le reste est originaire dEurope et
dAfrique. (statistique européenne)
«Au Maroc, le phénomène na pas encore de grosses incidences coté
fabrication grâce, notamment, à un processus de commercialisation
institutionnel plus au moins verrouillé», rappelle Rachid Essemar,
pharmacien et ex-inspecteur du médicament au ministère de la Santé. Mais le
Royaume est toutefois exposé de front à la contrebande des médicaments,
notamment dans le Sud et lOriental. Souk Fellah à Oujda est une des
adresses connues dans ce domaine (www.leconomiste.com). «Là, le
vendeur-rabatteur incarne le rôle de pharmacien-conseil, avec prescription.
Il fournit ainsi tous les besoins en médicaments sans aucune contrainte,
quil sagisse ou non de médicaments autorisés», indique Hayat Keddani,
docteur en pharmacie et membre de la Commission de pharmacovigilance de
lOriental. Pas moins de 20 produits sont vendus à Souk Fellah; et tous à
des prix très compétitifs. «Seule indication sur les emballages, les prix
exprimés en dinars algériens ou en euros. Lorigine de fabrication nest pas
indiquée et les dates de péremption demeurent suspectes. Pourtant, ce
commerce est exercé au vu et au su de tout le monde. Commerce qui met à mal
le marché institutionnel», conclut Keddani.